Blood of Eden, tome 3 : Forever Humaine

- Dis-moi, soeurette,a-t-il repris, je me demandais : quand nous aurons rattrapé Sarren, comment crois-tu que nous devrions tuer ce sale fumier? Je pensais à le mutiler, à le torturer aussi longtemps qu'on le pourra. Qu'en dis-tu?
Il a claqué les doigts.
-Hé, on pourrait peut-être le ligoter une moitié à l'ombre, une moitié au soleil, c'est toujours intéressant. J'ai fait ça à un mort-vivant qui m'énervait, il y a quelques années. La lumière a commencé par ses pieds avant de remonter vers son visage, et il lui a fallu un bon bout de temps avant d'y passer. A la fin, il me suppliait de lui trancher la tête.
Il a ricané.
- J'adorerais voir Sarren crever comme ça. A condition que ça ne heurte pas ta sensibilité, bien entendu.

J'avais fini de faire semblant d'être autre chose qu'un monstre.

Si j’ai appris une chose après des siècles à observer les humains, (…), c’est bien leur entêtement et leu indomptable volonté de rester envie. En tant qu’espèce, il est quasiment impossible de les éliminer totalement. Ils ont survécu au Poumon Rouge. Ils ont survécu au fléau des enragés. Certes, beaucoup d’entre eux vivent dans des cités vampire, asservis et ignorant tout du temps d’avant, mais il en existe des petites populations en dehors des territoires des Princes. Des groupes d’humains qui vivent libres.

"Un grand arbre dénué de feuilles se dressait près de la grange, tendant ses branches tordues vers le ciel. Celles-ci grinçaient et oscillaient sous le poids de dizaines de corps, pendues têtes en bas par des cordes nouées à leurs chevilles. Des hommes, des femmes, et même quelques enfants, qui tanguaient sous le vent, les bras ballants, raides et blancs. Tous avaient été égorgés et le pied de l'arbre était taché de noir par le sang répandu sur ses racines et sur la neige."

J’ai avancé d’un pas en découvrant mes crocs.
— Dis donc, psychopathe, ai-je grondé, ramenant son regard sur moi. Et si tu commençais par la fermer un peu ? Tu es pire que Jackal, dans le genre pipelette, alors à moins que ton but soit de me souler de paroles jusqu’à ce que mort s’ensuive, finissons-en.
J’ai brandi mon katana d’une main en arborant un rictus provocateur.
— Je ne suis pas encore morte.

Je t'aime, petite vampire, m'a-t-il murmuré comme nous nous écartions l'un de l'autre. Et ça tombe bien, parce qu'on a l'éternité devant nous.

C'est toujours des gentils qu'il faut particulièrement se méfier.

— Moi, je peux vous le dire, a soufflé Jackal en dévoilant ses crocs dans un sourire mauvais. Il va mourir. En souffrant. Une fois que je lui aurai arraché le bras qu’il lui reste, et que je le lui aurai enfoncé tellement profond dans sa sale tronche de poète de mes deux qu’il s’étouffera avec. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi on reste plantés ici à bavasser alors qu’on devrait être en train de défoncer sa porte. Allez, venez, maintenant.
La voix de Jackal était railleuse, mais impressionnante de détermination.
— Allons descendre ce psychopathe. 

— La prochaine fois qu’on a un pneu crevé, vous vous débrouillez. Pour tout dire, je crois que certains petits flemmards que je ne nommerai pas auraient tout à gagner à apprendre à regonfler une roue.
— Ça ne devrait pas être difficile, lui ai-je répondu en m’installant à l’arrière avec Zeke. On n’aura qu’à se servir de tout l’air qui sort de ta bouche.
— Allison, a soupiré Kanin. S’il te plaît.

— Je suppose que tu n’as rien trouvé d’utile, l’ai-je provoqué. Comme une voiture qui marche, par exemple.
Jackal a levé les yeux au ciel.
— Si c’était le cas, je serai déjà en train de rouler vers Eden. Votre compagnie commence à me taper grave sur le système.
— Chiche, lui ai-je répondu du tac-au-tac. Je vais essayer de trouver un moyen de faire ça pour de vrai.
Brusquement, Kanin s’est écarté du parapet et nous a dépassés pour commencer à marcher sur la route, sans dire un mot. Jackal, Zeke et moi nous sommes regardés pendant quelques instants, l’air ébahi, avant que Jackal ne ricane dans sa barbe.
— Je crois que le vieux commence à en avoir marre de nous, a-t-il fait remarquer tandis que nous nous empressions de suivre Kanin.
Il m’a jeté un regard en biais, les yeux brillants.
— Tu devrais peut-être arrêter de faire ta mégère, frangine.
— Qui, moi ?
J’ai découvert mes crocs, et lui aurais décoché un coup de pied bien placé s’il s’était trouvé plus près, mais il ne me regardait déjà plus.
— Eh, le vieux ! a lancé Jackal d’un ton railleur. Tu as oublié de dire : « Ça suffit, les enfants, si vous n’arrêtez pas tout de suite, je fais demi-tour et personne n’ira à Eden. »
Kanin n’a pas daigné répondre, et nous avons poursuivi notre chemin — quatre vampires marchant sur une longue autoroute déserte, en direction de l’est.