"Anéantis" est du grand théâtre. La guerre s'y dévoile comme le pire des cauchemars que peut vivre l'humanité, sauf que ce n'est pas un cauchemar, et qu'on ne s'en réveille pas. Après l'horreur, une autre horreur, toujours, jusqu'à l'anesthésie et la mort.
La puissance de l'écriture de Sarah Kane ne brise pas la complexité des situations et les sentiments sont rendus à la perfection dans leurs subtils renversements : comment l'amour peut s'exprimer dans un macabre jeu de pouvoir ; comment on glisse du rôle de victime à celui de bourreau ; comment celui qui croit n'avoir plus rien à perdre a encore tout à perdre ; comment l'instinct nourricier se conserve au seuil de l'anéantissement ; comment enfin le collectif, sombre et implacable, se substitue à l'individuel lors des "grandes marées".
Sarah Kane a écrit ce texte à 25 ans. Elle est incontestablement une grande artiste et une visionnaire.
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