A Suspicious River

Dans ce premier roman prometteur, Laura Kasischke ne se dépare pas de sa plume si poétique et de cette atmosphère pesante et angoissante qui lui est chère. Roman noir, sulfureux, où aucune violente n'est épargnée, on assiste dans Suspicious River impuissant à la lente descente aux enfers de Leila dans sa quête identitaire. Elle abandonne son petit couple ordinaire mais salutaire pour se jeter à corps perdu dans les bras d'un homme dangereux et violent, qui l'aimera à mort… La cause de ce martyre, un événement traumatisant qui a marqué son enfance et la certitude qu'une malédiction inéluctable pèse sur elle. Est-elle condamnée à reproduire les mêmes erreurs que sa mère et à connaitre le même destin funeste?
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Roman très noir et glauque. C'est mon 2ème livre de cette auteur et après "rêve de garçons" où l'on sent un malaise sourd, dans celui-ci l'horreur s'étale au grand jour et on la sent qui va crescendo.
C'est frustrant et effrayant, on sent que l'on ne peut rien faire pour arrêter la folie ambiante. L'héroïne se jette droit dans la gueule du loup et nous pauvres lecteurs on assiste à la réalisation du drame...

Leila est une jeune femme mariée, apparemment sans histoires et qui travaille comme réceptionniste dans un hôtel. Sa vie peut sembler paisible à première vue... mais ce n'est qu'une apparence. Parce qu'en fait Leila cache un secret, un secret qu'elle traine chaque jour où elle travaille au Swan Motel, un secret qu'elle entretient chaque fois où elle accroche le petit pannonceau indiquant que la réceptionniste revient dans un instant. Une déchéance à laquelle elle prend goût et qui lui fait prendre des risques. Et derrière tout ça, et en parallèle, on découvre un terrible secret de famille.

Pour ce roman, j'ai envie de vous en parler en long en large et en travers ! Mais je n'ai pas envie de vous en dire TROP pour que vous appréciez cette lecture du début à la fin, sans avoir pû vous douter de quoi que ce soit. Quoi qu'il en soit Leila est une jeune femme impressionnante de détermination. Elle a un plan en tête, elle souhaite s'en tenir coûte que coûte peu importe ce que cela entrainera. On se prend de compassion pour elle au début mais on a envie de la remuer au fil des pages pour lui remettre les idées en place ! Mais on comprend rapidement aussi que derrière ses agissements se cache un véritable traumatisme d'enfance.

Avec À Suspicious River on se prend une véritable claque de violence et de cruauté. Et cela parait tellement réel que ça en devient même angoissant. Angoissant d'assister à cette histoire en tant que spectateur, de subir cela avec Leila et paradoxalement ce roman est plaisant à lire malgré la crudité et la cruauté de certains passages. Laura Kasischke rend le lecteur un peu voyeur à travers ce roman, mais c'est plus fort que nous on veut savoir la suite, connaître le dénouement et s'imaginer notre propre fin.

En bref, comme tout bon roman peu importe si certains passages peuvent nous déplaire ou, comme ici, nous angoissent ou nous "choquent" on veut connaitre la fin et on dévore finalement chaque page avec plaisir. le signe de la qualité non ?
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Premier roman intéressant, moins abouti que d'autres de ses écrits comme "Esprit d'hiver" ou "En un monde parfait", il n'est cependant pas dénudé de qualités ! Assez sombre, avec les thématiques et les symboles qui sont chers à l'auteure, il permet de découvrir son univers particulier, oppressant et envoûtant, mystérieux... C'est une écrivaine dont j'apprécie particulièrement le style et la sensibilité.

Très cru... Mais qui vous tient en haleine jusqu'à la fin. Un film en a été tiré.

Suspicious River est une petite ville du Michigan. Leila y est réceptionniste dans un motel : le "Swan Hotel". Elle est mariée à Rick, avec qui elle mène une vie en apparence paisible. Mais, pour quelques dollars supplémentaires, elle suit certains clients dans leur chambre. Ce ne sont pourtant ni l'argent ni le plaisir qui la motivent. Petit à petit, on remonte le fil de son histoire, jusqu'à sa mère, Bonnie, dont Leila imite le comportement monstrueux, comme pour en expier les fautes. Un jour, Gary, pousse la porte d'entrée de l'hôtel et avec lui, Leila, va aller plus loin...
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À vingt-quatre ans, Leila traine son existence misérable entre un mari épousé trop vite et dont la volonté de maigrir vire à l'obsession, et un travail comme réceptionniste dans un motel miteux qui accueille le plus souvent des touristes de passage. Elle porte en elle les traces d'un drame familial, la mort de sa mère sauvagement assassinée quasiment sous ses yeux. Elle rêve d'une nouvelle existence, d'un « ailleurs » meilleur. Alors, pour tromper son ennui et mettre de l'argent de côté, elle couche avec les clients du motel. Pour le prix d'une nuit d'hôtel, elle se rend disponible. Certains hommes finissent par ne venir que pour elle, jusqu'au jour où débarque un dénommé Gary Jensen, aux allures de faux durs, qui la frappe dès leur première rencontre. Mais le mal est fait : Leila se sent attirée par cet homme louche qui ne dévoile rien de son passé, qui fait penser à ces voyous d'opérette des sixties. Il lui promet monts et merveilles, lui fait des déclarations pour mieux l'endormir. Car Gary n'est rien d'autre qu'un proxénète ayant abandonné femme et enfant pour se livrer au trafic sexuel…
En alternant les chapitres de la Laura actuelle et de celle de l'enfance, à la première personne, Laura Kasischke nous offre un roman très sombre et désespéré. Les pages les plus troublantes sont celles où Laura, détachée des réalités, se livre à des fellations ou offre son corps à des rapports aussi brefs qu'oubliables. On la sent morte à l'intérieur, et pourtant elle est prête à tout compromettre pour quitter l'ennui de sa vie et suivre cet inconnu beau-parleur. Une histoire si désespérée même qu'on ne parvient même plus à souhaiter que tout s'arrange pour elle. Parce que dès les premières pages, le lecteur sent intuitivement que Laura est perdue.
Je ne ferai que deux reproches en ce qui concerne ce livre, pas dans le contenu, l'histoire en elle-même glaçante, mais plutôt dans la narration. Tout d'abord, le changement intempestif de temps de conjugaison, du présent au passé et à l'imparfait, parfois sur un même paragraphe, nuit au déroulement du récit. Comme je n'ai pas lu le texte en version originale je ne saurais dire si c'est une volonté de l'auteure, mais cela peut se révéler inconfortable. Ensuite, c'est l'abus de comparatifs qui alourdit l'ensemble. Je ne pourrais dire combien de fois le mot « comme » est utilisé, au moins une fois sur chaque page, parfois de façon curieuse, étonnante ou peu compréhensible. Sans ces deux petites limites, À Suspicious River (un A avec un accent, et non pas le A anglais, a été ajouté lors de la traduction, ce qui n'était pas indispensable) est un roman remarquable, dur et froid, où le lecteur ne parvient pas à détacher ses yeux de la dégringolade inévitable de Leila.
Je remercie les éditions Folio pour leur confiance.