J'ai pris une nectarine pour le dessert.
J'ai pensé à toi. Elle était ferme et juteuse.
Il faudrait se dit-elle mettre amour et toujours dans le même poème, mais elle sait que toujours n'existe que pour les framboises écrasées sur les nappes trop blanches alors qu'elle plonge dans la confiture, comme si l'on pouvait se noyer dans un bocal avec l'amour posé au bord.
Je n'ai jamais aimé un homme
aussi longtemps que toi,
et pourtant,
ce n'est pas la première fois
que je le crois.
Si j'écrivais un poème
chaque fois que je fais l'amour
il me faudrait de nombreuses
années comme celle-ci
pour faire un recueil.
Si j'écrivais un poème
à chaque jour sans,
on ne saurait plus quoi faire
de mes poèmes.
Si, au lieu d'écrire
quand j'ai besoin d'amour,
je pensais à toi,
peut-être reviendrais-tu.
Mais elle est amoureuse, elle oublie les histoires à dormir debout, elle laisse celui qu'elle aime grandir, grandir, grandir, dans sa bouche, avec son sourire.
Dans la nuit orange, Eva laisse la pomme et met dans sa bouche le sexe tout grandi de celui qu’elle aime qui du coup entend la chanson qui s’invente dans sa tête et ça lui donne un sourire si beau que toutes les pinces d’Eva tombent quelque part et ses cheveux sur ses épaules. Ça ressemble à une histoire qui commence, se dit Eva, ces cheveux à relever avec des pinces. Mais elle est amoureuse, elle oublie les histoires à dormir debout, elle laisse celui qu’elle aime grandir, grandir, grandir, dans sa bouche, avec son beau sourire.
Elle prend la pomme emballée d’une main, et de l’autre le bilboquet. S’il choisit la première, elle restera nue. S’il préfère l’autre, elle croquera la pomme comme un baiser croque une nuque, mais il prend les deux mains. La boule se pose sur le bâton et la robe sur le soleil. Ça fait une femme nue et un homme autour d’une pomme. Eva trouve ça très beau, pour une histoire. Elle a les yeux qui brillent et une chanson dans la tête, une belle chanson d’amour qui s’invente toute seule.
Eva est amoureuse. Elle met des pinces dans ses cheveux et sort son bilboquet. Si la boule au premier coup se pose sur le bâton, elle choisira une robe rouge, mais ses cheveux relevés laissent des baisers croquants se glisser sur sa nuque, ça fait trembler sa main. Clac. Si la boule au second coup se pose sur le bâton, Eva dessinera une histoire à dormir debout, mais sans sa robe, le vent sur sa peau fait trembler sa main. Clac. Si la boule cette fois, la troisième donc, se pose sur le bâton, Eva toute amoureuse ira à cloche pieds jusqu’au premier pommier. Mais en dormant debout, des baisers dans le cou, et sur la peau, le vent, sa main à cloche pieds ne pouvait que trembler. Clac. Alors Eva dépose son bilboquet et court jusqu’au pommier. Elle prend la plus belle des pommes et l’emballe dans sa robe rouge. Ça commence à ressembler à une histoire, se dit-elle, d’être amoureuse comme ça.