A l'entour
A l'entour de ma vie
- par désir d'un rempart
contre bises mortelles -
j'ai tassé des poèmes.
Parfois je les culbute.
Pour m'ouvrir une fugue
je marche sur les mots.
Je les entends craquer.
Mais le soir je ramène
des paroles nouvelles.
Je les prends par poignées
et colmate la brèche.
Pour la sauvage veille,
l'écoute des musiques,
je refais mon rempart
en un cercle serré.
Chanson
Je porterai mes ans ainsi qu'un chaud butin.
J'aurai mon juste poids de jours frappés de songe.
Face à l'eau des miroir que sonde le matin
je laisserai blanchir mes cheveux sans mensonge.
Touchez longtemps ce qui se touche
l'écorce, l'eau, l'herbe, la bouche,
avec l'ardeur au creux des doigts
touchez le chaud, touchez le froid,
pour en faire votre aventure
touchez la mer et la voiture,
le mont, la plaine au cri de blé.
Un soir touchez vos doigts usés
comme un drap où les corps roulèrent.
Touchez enfin - noces dernières
aux feux assourdis du couchant
vos souvenirs mêlés au vent.
(Mains, I)
J'écris pour te faire souffrir.
Pour danser la vie devant toi.
Regarde se ployer ma taille,
vois-tu comment l'été me tient?
Je t'échappe. Mon coeur galope.
Mon sang sous tes yeux fait le beau.
Je fais un voeu : que mon poème
soit le bref aspic qui te morde.
Puisses-tu pardonner
mes razzias voraces
- ma famine exaucée
tout au long de ton corps.
(Variations pour un calendrier, IV)