An American Family : The Kennans, the First Three Generations

+ UNE FAMILLE AMÉRICAINE : LES KENNAN, LES PREMIÈRES 3 GÉNÉRATIONS +

Il est triste de comparer les compétences de l'actuel habitant de la Maison-Blanche, qui risque fort d'être réélu en novembre prochain (comme on dirait en pur Américain "God forbid") et le politologue américain de la guerre froide le plus brillant, George F. Kennan.

C'est un George Frost Kennan qu'il nous faudrait aujourd'hui pour arrêter les conquêtes territoriales de Poutine, comme il a réussi à freiner cet autre humaniste au Kremlin, Staline, avec sa stratégie d'endiguement ("containment") de l'expansionnisme soviétique en 1947.

Seulement, on ne peut pas être et avoir été et George Kennan est décédé en 2005, à l'âge de 101 ans, après avoir influencé son époque comme peu de personnes sur notre planète. À 98 ans, il s'est encore mis sérieusement en colère contre ce génie de Fiston Bush pour sa connerie monumentale d'invasion de l'Irak, dont les séquelles - par le biais des réfugiés - perdurent à ce jour. Décidément chez les Républicains américains ce n'est sûrement pas l'intelligence qui domine.

Kennan a été à l'opposé de ces ignares, comme conseiller à la Maison-Blanche des présidents Franklin Roosevelt, Harry Truman, Dwight Eisenhower et John Fitzgerald Kennedy, et par sa longue carrière de professeur à l'université de Princeton.
Il est l'auteur d'une bonne vingtaine d'ouvrages, qui lui ont valu à 2 reprises le prestigieux Prix Pulitzer en 1956 et 1968.
Parmi ses livres il convient de signaler "La Russie soviétique et l'Occident " de 1962 et "Le mirage nucléaire " de 1983, qui sont disponibles en Français.

George Kennan a aussi passé une partie de sa vie comme diplomate. Déjà en 1931 comme 3e secrétaire à la légation américaine à Riga en Lettonie, ensuite comme collaborateur de l'ambassadeur, William C. Bullitt, à Moscou. En 1938, il travaillait à l'ambassade de son pays à Prague en Tchécoslovaquie, à un moment crucial de l'histoire de ce pays.
Au début de la Seconde Guerre mondiale, il fut transféré à l'ambassade de Berlin, jusqu'à l'entrée en guerre des États-Unis. En 1943, il était chargé d'affaires et tête de l'ambassade américaine à Lisbonne. Il en a profité pour aider de nombreux réfugiés du nazisme à sauver leur vie en les faisant passer par le Portugal au nouveau monde.

En 1961, le président Kennedy le nomma ambassadeur en Yougoslavie, où il est resté jusqu'en juillet 1963.
Son passage comme ambassadeur à Moscou a été relativement bref : 9 mois (de décembre 1951 au juillet 1952). L'année avant de mourir Staline a fait déclarer Kennan "persona non grata" pour avoir dit à un journaliste qu'il se sentait à Moscou aussi libre qu'en 1941 à Berlin. J'ignore s'il a fait cette déclaration exprès pour mettre en rogne le tsar rouge dont il avait profondément horreur ?

Kennan, contrairement à Trump qui ne parle aucune langue sans fautes, parlait couramment l'Allemand et le Russe, et avait de très bonnes connaissances du Français, Portugais et Norvégien, langue qu'il a apprise pour faire plaisir à son épouse, Annelise Sorensen, originaire de Kristiansand en Norvège. le couple a été marié... 74 ans ! Annelise Kennan est morte en 2008 au New Jersey, à l'âge de 98 ans.

Dans ce petit fascicule de 136 pages, l'auteur retrace l'histoire de sa famille, en démarrant avec James Kennan, née en 1647 à Dumfries en Écosse. Pour des raisons économiques et religieuses, comme presbytériens, les Kennan ont d'abord déménagé à Ulster en Irlande avant de traverser l'Atlantique et d'arriver, en 1718, dans le port de Boston. Pendant longtemps la famille Kennan a exploité des fermes dans le Massachusetts.

Pour être honnête, le récit par George Kennan des 3 premières générations des Kennan, écrit à un âge très avancé n'est sûrement pas ce que cet homme a écrit de mieux. J'ai acheté le livre par curiosité et en hommage à un homme pour qui j'ai beaucoup d'admiration, ainsi qu'en reconnaissance lorsque j'hésitais à interpréter certains événements politiques et internationaux.

La qualité que j'apprécie le plus chez George F. Kennan c'est certainement sa capacité d'interpréter avant tout le monde les risques et périls de mesures et même de tendances politiques. Son plus grand mérite restera bien sûr d'avoir été le premier Américain à interpréter correctement les ambitions démesurées et les agissements ultrasecrets de Joseph Staline (1878-1953). Mais il s'est aussi prononcé clairement contre la guerre du Vietnam et les manoeuvres américaines à Cuba. Il avait l'oreille de John F. Kennedy, et lorsque le président a fait fi des recommandations de Kennan, il y a eu, en 1961, le désastre de la baie des Cochons à Cuba.

L'historien Wilson D. Miscamble, qui a publié une biographie de Kennan, a conclu en exprimant le souhait que les actuels et futurs architectes de la politique étrangère "partagent un peu de son intégrité et de son intelligence".