AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,74

sur 25 notes
5
4 avis
4
2 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
«J'étais en fin de droits et je ne toucherai rien pendant neuf mois ; mon dernier boulot, livreur d'annuaires, je l'avais perdu une semaine plus tôt parce que le pot d'échappement de ma voiture était mort et que je n'avais pas de quoi le remplacer ; j'étais radié des allocs parce que j'avais gagné 250 dollars le mois d'avant ; et on allait bientôt avoir deux mois de loyer en retard. le proprio allait changer les serrures d'un jour à l'autre.»

Une citation qui résume assez bien la situation de Billy le héros du roman Vulnérable de Richard Krawiec.

Dans une Amérique déboussolée, le roman est censé se dérouler fin des années 1980, début des années 1990 après huit années de Reagan et avant quatre année de Bush, Billy vit de petits boulots qui incluent le deal et quelques braquages d'épiceries ou de stations service.

Il est en rupture de famille. Ses parents Jake et Phyllis, sa soeur Carol et son frère Randy, qui ont choisi la voie de la légalité, un travail régulier, une assurance-santé et un fonds de pension attractif voient leur avenir s'assombrir, mais ne comprennent pas pourquoi.

Dans la préface, Krawiec explique que les électeurs de Trump ont connu la même trajectoire de sortie du rêve américain. Il partage cette analyse avec Micael Moore.

L'écriture sans fioritures et sans détours de Krawiec sert le propos avec justesse.

Quand la maison des parents de Billy est vandalisé, ce n'est pas à la police qu'ils pensent, mais à leur fils.

Le retour de Billy est aussi une illusion. Que pourra-t-il régler, lui qui a une vision de la réalité faite de ses échecs successifs et de sa dérive sociale.

«Et moi, à mon âge, où est-ce que je devais en être ? Qu'est-ce que j'aurais dû accomplir ? A mon âge, mon père avait acheté cette maison, il avait trois gosses et un boulot. Moi ? J'ai regardé mon blouson en cuir râpé, mon jean usé à la corde, mes bottes avec la semelle qui se décollait, les fringues minables éparpillées sur la table de la salle à manger. (...) Je n'avis nulle part où aller. Personne à retrouver. L'avenir ?»

Le roman est une suite hallucinante de récits de l'enfance de Billy, de la désagrégation des liens familiaux, du repli sur soi, de la méfiance entre ceux qui partent et ceux qui restent.

Krawiec évite le manifeste social en suggérant plus qu'en décrivant le contexte économique et social qui enferme les personnages dans leur trajectoire de sortie de route. La lucidité n'est pas leur point fort. Sauf peut-être Billy et son introversion mortifère qui l'amène quand-même à penser :
«Est-ce que je pouvais prétende à l'existence ? Au fond la question n'était pas qui j'étais, mais simplement, est-ce que j'étais ?»

Un livre sans concessions qui met le lecteur face à ce qu'il peut refuser de voir dans sa vie quotidienne, mais qui ressort des études et des sondages aujourd'hui dans la plupart des pays développés, la peur du déclassement et le choix paradoxal de solutions politiques qui vont accélérer ce déclassement.

A méditer. Livre reçu dans le cadre de la masse critique «Mauvais genres» merci Babelio et les Editions Points-Seuil.
Lien : http://desecrits.blog.lemond..
Commenter  J’apprécie          140
Une fois de plus les éditions Tusitala se distinguent avec la parution d'un roman noir aussi original que beau.
Original, au sens premier du terme, parce que le roman de Richard Krawiec contant le retour de Billy Pike dans sa ville d'origine après que ses parents ont été cambriolés, écrit à la fin des années quatre-vingts n'a jamais trouvé d'éditeur américain, les services commerciaux des maisons d'éditions se trouvant incapables, ainsi que l'explique Krawiec dans la préface de son roman, d'imaginer qu'un quelconque public puisse avoir envie de lire ce genre de livre. Car, comme le dit un ami de l'auteur : « Je sais que les pauvres existent, mais je n'ai pas envie de les voir dans les livres que je lis ». Ce sont donc les éditions Tusitala qui, après avoir publié Dandy il y a quelques années, ont eu l'occasion, l'envie et – disons-le – l'audace de publier en premier Vulnérables. Qu'elles en soient remerciées.
Beau, parce que, une fois encore, après Dandy, Krawiec choisit de montrer ceux que l'on voit pas, que l'on ne voit plus ou que l'on n'a plus envie de voir, sans misérabilisme, sans pathos inutile et sans essayer de faire croire que d'hypothétiques solutions miraculeuses existeraient pour sortir de l'ornière. S'il met bien en avant la façon dont une société modèle ceux qui qui en font partie – y compris à la marge – il ne nie pas non plus l'importance du libre arbitre et des choix de chacun.
Au centre de Vulnérables, il y a donc Billy Pike, pas loin de quarante ans et une vie de fuite – loin de sa ville, loin de sa famille – de cambriolages, de trafics et d'agressions. Lorsque sa soeur lui demande de revenir pour aider ses parents qui viennent de subir un cambriolage qui les laisse traumatisés, Billy revient, à peu près certain de connaître le coupable et peut-être aussi avec l'espoir de faire reculer les fantômes de son passé et de renouer une relation qui puisse avoir un semblant de normalité avec sa famille. Mais le retour aux sources dans une famille et une ville grises est douloureux.
« Et d'un coup, j'y étais, dans le centre de ma ville natale délabrée, fabriques de chaussures condamnées et vitrine basses aussi incolores du carton. Des gens gris qui marchaient lentement, tête basse en entrant dans les banques, dans les grands magasins, les épiceries devant lesquelles, assis sur des tabourets, des clients en veste de mauvaise toile buvaient du café amer.
[…] Même si tout ça me rendait triste, bizarrement ça m'a réconforté. Ou peut-être parce que ça me rendait triste. »
Cette histoire finalement banale, c'est celle d'une Amérique qui marche sur le fil ténu entre la petite classe moyenne et la pauvreté. Ce sont les parents de Billy, qui alternent boulots alimentaires sans intérêt et périodes de chômage en essayant de s'accrocher à leur petit statut social, à leur maison et leur télévision qui rendent leur vie supportable. Et ce sont Billy et ses semblables, génération qui a grandi seule, justement parce que leurs parents jonglent avec plusieurs emplois pour se maintenir à flots, et qui parfois finissent par basculer un peu plus bas dans l'échelle sociale avec l'impression que la vie n'a rien à leur offrir et qu'ils n'ont rien à lui offrir en retour. C'est aussi, comme le montre une particulièrement étouffante scène de réunion de famille, la déliquescence de la cellule familiale quand la famille ne devient plus que le réceptacle des frustrations d'une vie qui ne cesse de décevoir mais dont on a conscience qu'il suffirait d'un rien pour qu'elle devienne pire encore.
L'errance de Billy dans une ville et une famille qui lui renvoient ses échecs et son incapacité à trouver une place dans le monde n'est pourtant pas une complainte. C'est un parcours initiatique tardif, une manière de confronter le personnage à ses propres échecs, à ses failles, mais aussi l'occasion pour lui d'entrevoir, aussi étroites soient-elles, quelques issues possibles. Et de la violence d'un récit tout en tension, du malaise palpable, émerge la compassion de Krawiec à l'égard de ses semblables, de ceux qui souffrent, qui insuffle à Vulnérables une bouffée d'espoir. Reste à pouvoir la saisir. C'est tout cela qui fait de ce roman un livre âpre, violent et d'une rare beauté.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
Commenter  J’apprécie          60
Un texte crado et nécessaire, juste regard sur la misère et ses dérives dans une Amérique qui pourrait bien, finalement, être aussi un peu la France : la pauvreté fait ses armes partout. A lire !
Lien : https://horizondesmots.wordp..
Commenter  J’apprécie          10
Fin des années 80, début des années 90. Une famille moyenne américaine rentre du travail et se retrouve face à l'impensable, leur maison cambriolée, salie, violée. C'est alors qu'ils nécessitent l'aide de leur fils, le délinquant, celui qui n'a rien construit dans sa vie et qui ne construira rien. Billy le narrateur approche des quarante ans et est encore et toujours un raté. Il survit de petits boulots, il ment, il est incapable de garder une femme à ses côtés. Dès le retour de Billy dans sa ville natale, ses souvenirs reviennent, sans cohérence, nous dévoilant la raison de la dérive sociale du narrateur. Entre viol pendant l'enfance, début de délinquance, adultère et j'en passe, le récit du passé de Billy est ignoble. Grâce à une rencontre fortuite, Billy entamera une histoire d'amour avec Sharon, une femme boiteuse qui créera un peu d'espoir dans sa vie totalement déconstruite.
Richard Krawiec dresse ici un roman sombre sur la désillusion du rêve américain, la solitude et les liens familiaux. J'ai été très touchée par cette lecture, où les personnes pauvres ont une place à part entière dans une société qui les a oubliés suite au différents changements économiques et sociaux.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (69) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2883 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}