AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de bobfutur


Un monument.

Tel Joseph Heller et son « Catch 22 », Vonnegut choisit la voie la plus difficile pour nous parler de la guerre : la loufoquerie.
Probablement l'approche la plus réparatrice... s'imposer un deuil rigolard, alors que des visions d'horreur vous poursuivront jusque dans votre tombe.

Car c'est en grande partie autobiographique, même si la partie concernant les extra-terrestres semble légèrement exagérée… encore que… rien qui n'arrive au degré d'horreur du bombardement de Dresde : un véritable crime de guerre, un gigantesque pétage de plomb qui démontre, encore une fois, qu'il n'y rien de plus dangereux et de foncièrement faux, erreur perpétuelle et tristement humaine, que d'attribuer des rôles de bons et de mauvais…

L'Histoire nous enseigne que cela aurait pu être pire (fou-rire nerveux à s'envoyer une larme dans l'occiput), et qu'ils auraient tout aussi bien pu raser Berlin.
Vous avez raison, les multiplications, c'est toujours plus facile à poser que les divisions…
Mais je n'ai rien vécu de tout cela, et c'est bien pour cela que ces quelques lignes prennent le poids du plomb.
Le talent, c'est d'arriver à faire voler tout ceci plus haut que les galaxies. C'est d'y convoquer jusqu'à la quatrième dimension.

La première moitié du livre, Kurt vise tout juste à chaque phrase.
Un déluge d'inventivité, de pétillance, sans trêve, obligeant le lecteur, même bien entrainé — encouragé par un découpage en courts paragraphes, dynamique — à de fréquentes pauses afin de souffler / exulter.

La suite se perd probablement quelque peu, sans doute du fait des très nombreux sauts dans le temps, coupant la circulation émotive comme une paire de rangers lacées trop serré, l'équilibre entre le plombant et l'abracadabrant perdu dans toute cette fumée.

Aussi, quelques doutes sur la traduction.
On entrevoit, pour cette fois, l'espace pour un coup de frais… Actes Sud ? (oui, bon, cette fois-ci, il faudra négocier avec le Seuil… ou bien attendre, comme à leur habitude, la libération des droits…).
Le fameux leitmotiv de ce roman : « So it goes » permettrait à lui seul la constitution d'une équipe de quatre traducteurs vétérans — mettons Brice Matthieussent, Marianne Véron, Claro et le petit-fils d'André Gide (hein ?) — afin de nous pondre autre chose que le très irritant « C'est la vie », et ses 106 occurrences dans le roman, chacune me renvoyant à l'image de mon ami Joost, batave du Brabant Inférieur, être au demeurant adorable, mais horripilant lorsqu'il s'essaye à parler le français, avec sa voix guindée montant dans les aiguës, et son air satisfait recouvert de bonnes grosses dents carrés : « c'est la vie ! »… ou pire… de ce groupe venu de Styrie, « Opus », et son hélas inoubliable morceau « Live is life » (LA-LA-LAA-LALA)…. navré….
Bref, il y avait sans doute moyen de faire mieux… ou simplement de le lire en V.O….

Car ce « Slaughterhouse-Five, or, The Children's Crusade: A Duty-Dance with Death » est à coup sûr un livre à lire plusieurs fois, parmi les grands classiques anti-militaristes, bien à sa place dans toute liste récapitulative de la littérature mondiale.
Commenter  J’apprécie          7711



Ont apprécié cette critique (70)voir plus




{* *}