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Citations sur Dans les imaginaires du futur (9)

Croire que l’on pourrait revenir aux certitudes d’avant-hier pour répondre aux angoisses de demain n’est-il pas le plus désespérant des leurres ?
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La catstrophe nous terrifie, et pourtant quelque part elle nous séduit. Car rien ne se reconstruit sans la crise et la petite mort qu'elle porte, lorsque bien sûr est évitée la destruction totale. La catastrophe est paradoxale. Elle vit en nous, trouble et troublante. Elle nous hante. Oh !, bien sûr, notre peine pour les victimes du tsunami en Thailande, de l'ouragan Katrina à la Nouvelle-Orléans ou des crashs d'avions de ligne partout dans le monde n'est pas feinte. Et ce, d'autant que notre réflexe immédiat est de nous identifier aux sacrifiés - surtout quand certaines victimes sont de chez nous, selon la cynique loi de proximité journalistique du "mort au kilomètre".
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Lors d'une urgence sanitaire comme celle du printemps 2020, "Contagion" nous présente un miroir de nos espoirs et de nos désespoirs, de notre lâcheté ou de notre courage, face à une catastrophe qui nous dessille les yeux sur nos fragilités et notre aveuglement.

"Contagion", film de Steven Sodebergh
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Dans sa postface à la réédition en 1997 du roman Stalker, dont le titre original était Pique-nique au bord du chemin, Boris Strougatski donne le sens de ce mot inventé, né de l’anglais to stalk, qui signifie « traquer », « rôder » et surtout, selon lui, « s’approcher furtivement », « marcher à pas de loup ». Le stalker est un voyageur, un chercheur incroyablement attentif au nouveau et dangereux terrain qu’il découvre peu à peu. Il est à l’écoute du bruissement des herbes et des feuilles, aux aguets des ombres, des signes venant des pierres et des arbres, en éveil face aux frémissements des limaces, des mouches et des moustiques. Bref, sans cesse, il met ses sens en interaction, en symbiose aux êtres, objets, mouvements et phénomènes vivants ou non, visibles ou invisibles. C’est un passeur du monde terrestre ou plutôt d’un territoire a priori apocalyptique, né de la fusion du terrestre et de l’extraterrestre. Sans lui, entrer dans « la Zone » revient à y mourir. Il est l’explorateur de l’inconnu, qui emmène à ses côtés d’autres personnes, prêtes comme lui à risquer leur vie, si ce n’est leur âme, dans un espace non pas mort tel celui de La Route, mais ouvert à tous les changements, que ceux-ci s’avèrent in fine positifs ou négatifs, destructeurs ou constructeurs, porteurs d’espoir ou de désespoir.
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Les imaginaires de l’écologie et de la technologie ne s’opposent pas selon quelque loi à jamais figée dans le marbre. Leur antinomie théorique, entre retour pur et simple aux limites d’avant-hier et transgression absolue de ce que seraient les limites de l’humanité, est factice ou du moins circonstanciée et subjective. C’est ce que montre le détour par les imaginaires de l’espace, eux-mêmes contradictoires et immensément pluriels. De leur analyse, ainsi que de l’étude, via le meilleur de la science-fiction, des mythes et des représentations de l’intelligence artificielle et des scénarios d’effondrement sous le prisme post-apocalyptique, il ressort deux conditions indispensables pour réunir ces imaginaires de l’écologie et de la technologie dans une construction commune plutôt que de les laisser continuer à torpiller nos devenirs : d’une part la prise en compte du temps long des changements nécessaires, à l’échelle non pas de notre vie, mais de celle à venir de nos enfants, petits-enfants, arrières-petits-enfants et plus encore à échéance de plusieurs siècles ; d’autre part la nécessité de choix politiques tranchés, en amont et en cours de toute transition qui ne soit pas le leurre d’un retour au même.
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L’auteur de science-fiction ne clôt pas le débat d’idées. S’il semble en phase avec les Terrestres de Bruno Latour pour affirmer qu’il n’y a guère à l’heure actuelle de Plan B pour la Terre, il ne fige pas ses personnages. Il ne bloque pas leurs yeux vers le sol et la lithosphère. Point selon moi essentiel : au contraire de James Gray dans Ad Astra, jamais il ne convoque Dieu dans le théâtre de ses réflexions. Même pas son ombre, que l’on perçoit par exemple, bien que discrète, dans les circonvolutions intellectuelles de Bruno Latour. Mieux : par la voix de l’un des procureurs du procès qu’il intente sans le dire dans Aurora aux apôtres furieux de la conquête de l’espace, aux obsédés de la fuite vers un salut factice à court ou moyen terme, Kim Stanley Robinson prend acte de l’existence potentielle de vies indigènes sur des planètes pour nous inatteignables. Il reconnaît même la crédibilité de l’hypothèse qu’il pourrait exister dans le très vaste univers des extraterrestres tels Starman et son double Newton, joué par David Bowie dans L’Homme qui venait d’ailleurs, ou plus probablement comme la créature de la lune Europe de 2010 : Odyssée deux d’Arthur C. Clarke, dont il continue à creuser le parcours intersidéral. Kim Stanley Robinson préserve ainsi une figure de l’altérité radicale, quelque part dans nos étoiles, sans la réduire au statut de divinité. Sa lucidité dans le temps long de l’espèce humaine, d’un pessimisme justifié et légitime d’ici le quatrième millénaire sur le devenir de la Terre comme sur nos perspectives vis-à-vis de l’espace, ouvre des pistes pour nous extirper de la double impasse des imaginaires de l’écologie et de la technologie : d’un côté, elle encourage la révolution « terrestre » qu’un Bruno Latour appelle de ses vœux ; de l’autre, à rebours des analyses de l’anthropologue et philosophe, elle maintient et alimente la possibilité, voire la nécessité d’une écologie « hors limites », c’est-à-dire hors de Gaïa, laissant la porte ouverte à nos futurs – aussi compliquées que risquent d’être les prochaines décennies. Chercheur d’utopies, nourri de sciences humaines autant que du système Terre, Kim Stanley Robinson doute… Et ne veut surtout pas gommer les horizons de nos imaginaires.
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Cette pluralité de voix, je le répète est cruciale. Pour les uns, la catastrophe a déjà eu lieu. Pour les autres, elle est en marche, voire n’est pas encore suffisamment avérée pour justifier d’un radical changement de vie ou de politique. C’est cette diversité de points de vue, de l’intérieur des personnages, qui rend si prémonitoire Le Troupeau aveugle, livre pourtant publié en 1972, une année avant Soleil vert. Le concert de voix disparates, la diversité des imaginaires de l’écologie mais également des techniques que l’auteur décline face au désastre, permettent de laisser ouverts une multitude de devenirs, pas tous négatifs.
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Comme déjà souligné, toutes les narrations élaborées, quels que soient leurs supports et leurs publics, fonctionnent telles des usines de retraitement des valeurs qui circulent dans la société. Elles contribuent à façonner les principes, idéaux et convictions « au nom desquels nous prétendons conduire nos conduites ». Ce travail des récits sur nos êtres se construit le plus souvent inconsciemment. C’est sans l’avouer, de façon peu visible, qu’il tisse et retisse nos pelotes de sentiments et de convictions dans le chaos de nos désirs et de nos croyances. Il se fraye un chemin grâce ou en dépit de nos représentations sociales, de nos habitus installés le plus profondément, de nos règles et façons de voir et d’agir sur le monde. Enfin, ce labeur d’appropriation, de bonne ou de mauvaise digestion des fictions que nous choisissons ou qui se proposent à nous, se joue selon une multitude de critères aux influences contraires.
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La démesure technologique et l’apocalypse environnementale se conjuguent pour susciter une sidération, une sorte de court-circuit qui fonctionne dans le long métrage [Blade Runner 2049, cité en introduction] exactement comme dans notre esprit de citoyen du troisième millénaire. Dans les imaginaires du futur est né du désir de sortir de ce paradoxe violent, de trouver des parades au sentiment d’être coincé entre ces deux imaginaires de polarité opposée. Son pari est d’abord de refuser une première voie sans issue : la technologie comme unique réponse aux effondrements écologiques – dont la crise du Covid-19, catastrophe virale, pourrait être une modalité. Croire qu’il n’y aurait d’autre possibilité que de laisser les technologies les plus sophistiquées de demain réparer les destructions de celles du capitalisme industriel d’hier a quelque chose d’aberrant. Mais au-delà du refus d’un usage aliénant des techniques contemporaines, entre contrôle des individus et aveuglement vis-à-vis de la planète, cet essai cherche à repérer les ruelles pouvant permettre d’éviter une seconde impasse : l’idée qu’il faudrait choisir l’écologie contre toute technologie, l’une et l’autre devant rester totalement séparées, condamnées à une irréversible incompatibilité…
La prospective pourrait contribuer à nous extirper de ces culs-de-sac. Son défi serait dès lors non seulement d’intégrer les enjeux environnementaux, comme elle le fait déjà, mais aussi de marier les apports de son volet traditionnel, inspiré de sciences sociales, à ceux de ses variantes plus « technoscientifiques ». La promesse est belle. J’ai pourtant l’impression que ses scénarios pour le futur peinent à prendre la mesure des conflits et ambivalences qui aboutissent aux impasses à la source de cet essai. Raisonnable, retenant les leçons de l’histoire et à l’écoute des signes forts ou faibles de notre actualité, la prospective éclaire des routes pour demain sans changer les règles du jeu de nos sociétés. Elle aide à la réflexion pour définir des stratégies, puis pour agir sur le réel. Mais elle ne rebat pas suffisamment les cartes pour creuser des chemins de traverse, perçus au départ comme impossibles et pourtant in fine plausibles. Elle a du mal à remettre en cause les hypothèses qui fondent l’économie capitaliste telle que nous la subissons aujourd’hui. Bref, elle s’interdit de transformer un jeu de Monopoly en une partie de marelle. Est-ce la subjectivité qui lui manque pour échapper aux paradigmes dominants de son époque ? Pour porter son regard loin, de façon aussi libre, diverse et irrévérencieuse que les meilleures œuvres de science-fiction ? Nourris comme elle d’enquêtes méticuleuses, les mondes de la série Black Mirror ou des romans de Kim Stanley Robinson, pour ne citer qu’eux, radiographient nos sociétés au filtre de la discordance, de l’imprévisibilité humaine et non humaine, sociale ou climatique. Les enjeux croisés et contradictoires des technosciences et de l’effondrement de nos écosystèmes vibrent depuis longtemps au coeur de la science-fiction la plus affûtée, mais aussi la plus engagée politiquement. Repérer et analyser en profondeur nos imaginaires de demain me semble essentiel à toute démarche de prospective radicale, et sur un autre registre, à toute action sur le long terme de transformation du monde. Ainsi s’explique le parti pris de ce livre : considérer les séries et les films de cinéma, les nouvelles, les romans, les BD d’hier et d’aujourd’hui mettant notre futur en fiction comme un corpus de pistes et de savoirs non seulement pour comprendre les impasses contemporaines de l’écologie et des technologies, mais pour en entrouvrir des voies alternatives. Ce parti pris ne positionne pas Dans les imaginaires du futur à rebours de la prospective traditionnelle ou technologique, mais en complément critique et engagé de son travail. Histoire d’ajouter de la subjectivité à son objectivité, des récits dissonants à ses scénarios aux critères multiples, de l’imagination débordante à ses explorations bordées d’avenirs potentiels.
Dans les imaginaires du futur cherche à répondre à une question, en creux des deux Blade Runner de 1982 et de 2017 : comment tracer les chemins d’autres futurs, refusant l’inféodation de l’écologie aux pouvoirs du numérique, mais rejetant aussi l’opposition entre l’imaginaire technologique de transgression des limites et l’imaginaire environnemental d’affirmation des limites d’un système-Terre enchevêtré aux êtres vivants, végétaux et minéraux ? Autrement dit : n’y a-t-il pas moyen, en puisant dans les imaginaires de science-fiction, de refuser de choisir entre, d’un côté, l’abolition des limites de l’humain et de la Terre par la technoscience et, de l’autre, le retour pur et simple à ces mêmes limites telles que les trace un certain type d’écologie ?
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