ESPOIR
C’en est fait. L’hiver tient la nature en ses serres.
De la mort elle a pris la raideur et le teint.
La nature agonise et notre cœur se serre
De voir cette beauté paisible qui s’éteint...
C’en est fait. Des sanglots glissent de branche en branches
Comme une voix le vent se lamente parfois...
Les feuilles tombent. Dans cette grise avalanche
On ne retrouve plus les sentiers d’autrefois.
Adieu donc, bois chéris, coteaux baignés d’aurore,
Bosquets retentissants, ravins peuplés d’oiseaux!
Adieu vallons en fleurs, adieu beau lac sonore,
Où, dans l’or du midi, se penchent les bouleaux!
—Mais non, ne pleurons pas, car ces choses divines
Dont nos yeux ont souvent admiré le contour:
Fleuves, ruisseaux, buissons, plaines, forêts, collines,
Peuvent dans notre esprit renaître, tour à tour!
Ah! qu’importe l’hiver et ses heures moroses!
Et qu’importe novembre après le mois de mai!
Qu’importe un printemps mort si nous eûmes ses roses,
Et qu’importe l’oubli si nous avons aimé!...
Qu’importe un jour éteint s’il nous laisse sa flamme,
Si son reflet lointain est un feu continu;
L’univers tout entier peut tenir dans une âme:
Dans un lac tout le ciel n’est-il pas contenu ?
Qu’importe que le bois triste et mourant se voile,
Si nous avons l’esprit rayonnant de beauté,
L’esprit clair et léger comme la blanche voile
Et le cœur réjoui comme un matin d’été!...
Bonheur printanier
La feuille s’ouvre ainsi qu’une dentelle verte ;
Des senteurs de bourgeons flottent dans l’air léger,
Et la brise, soufflant dans ma fenêtre ouverte,
Apporte jusqu’à moi des parfums de verger.
Les enfants réjouis, oubliant l’hiver sombre,
Pieds nus, en robe claire et les cheveux au vent,
Dansent sur l’herbe, et leur groupe forme de l’ombre
Qui sursaute et s’allonge aux bords du bois mouvant
Le buisson recouvert de feuillages ondoie
Et s’orne vers le soir de reflets empourprés ;
Il monte de partout des murmures de joie ;
On dirait qu’on entend pousser l’herbe des prés.
La vie universelle et généreuse abonde,
L’arbre tend vers l’azur ses gestes infinis.
La sève bout aux flancs de la terre féconde,
Les oiseaux dans les bois recommencent leurs nids.
Que mon vers te célèbre et que ma voix te loue
Ô Nature, pour ta reposante beauté !
Pour le vent tiède qui vient caresser ma joue,
Pour les soirs odorants baignés de majesté !
Que je te loue, et qu’à te chanter je m’enivre
Ô Printemps ! Que mon coeur chante avec l’univers !
Je ne veux plus qu’aimer et que me laisser vivre
Puisque la feuille s’ouvre et que les prés sont verts !
Que je te loue, ô Nature, pour l’allégresse
Que j’ai de voir grandir l’herbe aux tons éclatants,
D’écouter dans les bois l’arbre qui se redresse,
De pouvoir attacher mes yeux sur le printemps !
Paysage
Le jour brille. Les portes s’ouvrent. Les coqs chantent.
Dans l’aube les maisons sont des fleurs de soleil.
La campagne rayonne, et les vieux bois s’enchantent
Du bonheur que répand le magique réveil.
La fermière gaiement, à son vieux seuil se penche.
Je vois aller, joyeuse avec un air badin,
Resplendissante dans sa robe rose et blanche,
La jeune paysanne au fond de son jardin.
Sur la mer les bateaux s’en vont, deux, trois ensemble,
Immaculés et comme incorporés à l’air,
Si blancs que leur voilure imprécise nous semble
L’aile d’un grand oiseau perdu dans le ciel clair !
Des senteurs de foin vert, des murmures étranges,
Vont à l’assaut des toits, des seuils, des escaliers.
Par les portes on croit voir sourire les granges,
Et les greniers ont des échos particuliers.
Les habitants heureux interrogent la plaine,
Parlent de leurs travaux, se jettent le bonsoir,
Cependant que la nuit couvre de son haleine
Le chemin où les boeufs s’en reviennent le soir...
Et le sol généreux, lourd d’espoirs, semble attendre
Le blé que va mûrir le soleil indulgent,
Tandis que la charrue, inerte en l’herbe tendre,
Tend aux rayons du jour ses oreilles d’argent.
Songe d’hiver
La forêt si vivante est maintenant déserte,
Et, comme elle, sa soeur la colline est inerte.
Un manteau de frimas recouvre le matin.
Déjà l’on ne perçoit plus rien dans le lointain.
La neige tombe. Il neige, il neige en avalanches ;
Les villages sont blancs, les montagnes sont blanches.
Ô vieillard qui reviens avec des fagots morts,
Viens t’asseoir sous mon toit, car il neige dehors.
Il est nuit. Le grand vent, qui sanglote et qui gronde
En de rudes assauts contre nos murs s’effondre
La neige tombe. Assise, et seule au coin du feu,
Je rêve à quelque ciel lointain et toujours bleu,
À la terre odorante et chaude d’Italie,
À ses lacs clairs où va la gondole jolie.
Portant, le cou noué d’un châle d’opéra,
Une belle, et robuste, et brune signora...
Je rêve au sol de France avec ses blondes vignes,
Et ses calmes étangs où s’endorment les cygnes,
À la Belgique où sont les beffrois et les tours,
Les clochers ajourés, les toits aux purs contours,
Les collines grouillant de moisson odorante,
Les enclos habillés de lys et d’amarante,
Où, dans son nid la blanche colombe s’endort
En fermant doucement, le soir, son aile d’or !
Laissez-vous émerveiller par de belles histoires lues à voix haute, agrémentées de pièces musicales. Histoires vraies ou imaginaires, légendes, biographies, récits de vie ou poèmes, ne manquez pas cette occasion unique de rêver et de vous souvenir!
Avec
Godelieve de Koninck, lectrice et fondatrice de Liratoutâge
Jeanne Guérard, cégépienne et libraire à la librairie le Mot de Tasse
Patrice de la Brosse, lecteur bénévole de Liratoutâge
Animation et interprétation des pièces musicales
Caroline Malo, bibliothécaire et responsable du développement des services aux aînés, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ)
Choix et agencement des visuels
Fanny Beaupré, technicienne en documentation, BAnQ
Enregistrement de l'activité et montage vidéo
Stéphane Viau, technicien en projet audiovisuel, BAnQ
00:00 Intro et musique 1
00:44 Présentation
02:23 Mise en contexte
02:48 Lecture d'un extrait d'Une tomate sur le trottoir
05:37 Mise en contexte
06:32 Lecture d'un extrait de Récits et légendes
15:01 Musique 2
17:36 Commentaire musical
18:26 Mise en contexte
18:45 Lecture d'un extrait de la plus belle chose du monde
25:19 Musique 3
26:48 Commentaire musical
27:39 Mise en contexte
28:17 Lecture d'un extrait de la naissance du jour
31:07 Musique 4
32:28 Commentaire musical
33:06 Mot de la fin
34:39 Musique 5
Oeuvres lues et entendues :
- Musique 1. Extrait de la Valse, op. 64 no 1 en ré bémol majeur, de Frédéric Chopin (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-70dd423e-0012-4a41-bfc6-a3b877dbc45d)
- Lecture d'un extrait d'Une tomate sur le trottoir, de Godelieve de Koninck (https://cap.banq.qc.ca/permalink/PN-a3201afb-88df-4ac8-84ea-11659e87eed3)
- Lecture d'un extrait du recueil Récits et légendes de Blanche Lamontagne-Beauregard (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-698077c6-e148-4e05-b348-a5793bfde434)
- Musique 2. Extrait de l'aria Ebben? Ne andrò lontana, tiré de l'opéra La Wally, d'Alfredo Catalani (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-fe62c74e-acfb-4986-90df-da0324ca66e8)
- Lecture d'un extrait de la plus belle chose du monde de Michelle le Normand (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-5b30a245-aff7-4ac3-8074-ce2171bac765)
- Musique 3. Extrait du Duo des fleurs, tiré de l'opéra lakmé, de Léo Delibes (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-1ee556b6-0d6b-48bb-80c9-e4af90ecc611)
- Lecture d'un extrait de la naissance du jour, de Colette (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-d6e067ad-2060-4b6c-8059-0d622c8a123b)
- Musique 4. Extrait de Salut d'amour, op. 12, de Edward Elgar (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-c7d5aa2b-2ad0-4829-bcd4-2e1e8fa3ea9a)
- Musique 5. Reprise de l'extrait de la Valse, op. 64 no 1 en ré bémol majeur, de Frédéric Chopin (https://cap.banq.qc.ca/permalink/P-70dd423e-0012-4a41-bfc6-a3b877dbc45d)
Les oeuvres de musique classique dont la vidéo contient des extraits peuvent être écoutées intégralement via Naxos Music Library, accessible dans BAnQ numérique.
La plupart des oeuvres littéraires lues dans la vidéo sont dans le domaine public et peuvent être trouvées en ligne facilement à partir de votre navigateur préféré.
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