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Elle s'appelle Séraphine.
Elle marche en silence, froide et determinée dans les plaines du Congo, du Mali, du Soudan, quelque part en Afrique.
Rendue étrangére à elle -même par un viol au récit difficilement soutenable et par le meurtre de toute sa famille, Séraphine part se retrouver au côté " des lionnes impavides" de l'armée régulière.
Celle à qui on a volé la légéreté ne marche plus qu'à l'obsession de la vengeance, de la justice, les deux notions se confondent dans un espace oú prendre le temps de la nuance signifie la mort.

C'est l'unique certitude.
Séraphine devient une idée, ne fait plus qu'un avec l'acte toujours à venir du meurtre de l'homme qui souille, humilie , déchire :Nous mourons trouées par le sexe des hommes "......
Devenues "des lionnes impavides" , respectées par les autres soldats, redoutées pour leur bravoure et leur ferocité par les milices qu'elles traquent, elles ont décidé de retourner la violence subie contre ceux qui l'infligent à d'autres femmes.


Le roman est fort, parfois écrasant tant la brutalité est omniprésente.
La répétition d'un "Je te tue" lancé en défi au désespoir instaure une politique du chaos qui souligne la crudité des chairs à vif.
La parole des personnages sous forme d'interviews à un lecteur journaliste alterne avec le récit intiatique de Seraphine.
Le style saccadé, brutal de l'auteur ajoute à la violence, à la crudité des scènes mais aussi l'empressement, l'acharnement qu'ont ces femmes à prendre leur revanche sur la vie en défendant leur corps, Leur pays.
On est happé par leur quotidien violent bouleversant mais aussi par leur courage, leur héroïsme et leur dignité!
Un livre puissant , charnel, à l'écriture tendue, violente ,crue, à la froideur méticuleuse pour dire l'horreur des sévices et l'exclusion sous toutes ses formes, à l'intense puissance psychologique qui nous tient en haleine!
Il est impossible de lâcher ce roman .
D'une justesse saisissante c'est un hymne à l'héroïsme des êtres qui transforment leurs silences en un cri de courage et de fureur!
Une interrogation sur la culpabilité et la légitimité de la vengeance.....
Est- ce mal de tuer celui qui s'apprêtait peut- être à le faire?
Une oeuvre violente toutefois pétrie d'espoir, de Liberté, de Vie !
Je ne connais pas l'auteur, j'ajoute que j'ai été attirée par la beauté de la première de couverture et le titre ! Aux éditions Viviane Hamy , synonyme de qualité !
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Qu'il est difficile d'écrire quelques mots pour parler d'un roman d'une telle qualité d'écriture. C'est avec une douce plume, poétique et maîtrisée que Céline Lapertot couche sur le papier ce récit terrifiant, violent, racontant l'enfer dans lequel sont emprisonnées les femmes au Congo ici, mais dans n'importe lequel des pays d'Afrique ou d'ailleurs dans lesquels sévissent de terribles conflits armés. Avec la magie de ses mots savamment choisis, l'auteure fait briller les âmes assombries de ces femmes, Séraphine, Blandine, Ina,… les « lionnes impavides » comme elles s'appellent à qui le destin de mères, d'épouses a été ravagé par des miliciens qui les ont violées, ont assassiné leur famille, ont rasé, brûlé leur village.

A l'image de nombreuses autres femmes, Séraphine, dont Céline nous raconte la terrible histoire a été violée devant les yeux de son père agonisant. Plus qu'un viol de son intimité physique et des conséquences psychologiques, c'est son avenir qui est dévasté. Promise à un mariage, vivant heureuse et insouciante, il ne reste aucun espoir à Séraphine.

Emmenée à l'hôpital, c'est Blandine, une « lionne impavide », une guerrière de l'armée régulière arrivée à temps pour éviter encore plus de déchaînement de haine et de violence, qui lui insufflera l'envie de se battre, de vivre, pour se venger d'une part mais pour faire cesser la barbarie et sauver d'autres femmes. La douce jeune femme d'une vingtaine d'année, se transformera en une rugissante lionne, entourée d'une nouvelle famille, celle de ces femmes à qui l'on a enlevé le droit d'aimer et d'être aimé.

Ce roman nous désarçonne, nous met une claque dans la figure, de celle provoquée par l'horreur du monde qui nous entoure mais que l'on préfère souvent ne pas voir. Mais derrière cette noirceur, ce cache un hymne à la vie, à la féminité, une réponse à la domination masculine. Les femmes ne sont pas les souffre-douleurs des hommes et jamais elles ne sont aussi fortes que quand elles font front ensemble contre la tyrannie.

Lien : http://imaginoire.fr/2020/10..
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Dans un pays d'Afrique dévasté par la guerre civile, Séraphine voit sa famille et ses voisins massacrés par les rebelles.
Sauvée de justesse de la mort par un raid de l'armée régulière, elle rejoint Blandine et devient une lionne impavide, rejoignant une armée de femmes.
Au fil des jours et des rencontres, la résistance se transmet d'une femme à l'autre comme autrefois les gestes simples d'un quotidien que l'horreur a balayé.
Parce qu'elles découvrent que c'est possible : on peut refuser de vivre l'échine courbée, une terreur foudroyante rivée au coeur et au corps, on peut choisir de tout risquer si c'est pour ne plus être qu'une victime.

Dès les premières pages de ce roman extraordinairement puissant, très minutieusement construit et magnifiquement écrit, on épouse la cause de ces femmes, marchant dans la forêt à leurs côtés, ressentant leurs souffrances, leurs peurs, mais surtout cette immense force capable de soulever des montagnes.

Ce roman est un coup de poing, un de ces livres qui bouscule, dont l'écriture poétique et âpre de Céline Lapertot résonne encore longtemps après la lecture.
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« Quelque part en Afrique. Aujourd'hui. »

...où la guerre civile fait rage, brise des vies, décime des familles, violente, torture, achève, condamne, brise tout sur son passage, rêves, illusions, paisibles cocons familiaux, le petit nuage de coton doux et paisible dans lequel la vie aurait pu être si belle, si facile ... pour laisser place au chaos.

Ce récit est poignant, sidérant, cru, convoquant rage et colère face à tous ces actes immoraux et sanglants perpétrés ... au nom de quoi ? du pouvoir ?
Dominer pour mieux régner, sans loi ni foi, sans retenue aucune, sans états d'âmes, des dominants rebelles masculins, miliciens barbares, sauvages qui font naître la haine dans le coeur des femmes résistantes.
Face à la barbarie, la défense se met en place, incarnée par des "lionnes impavides", qui ont fait le choix de s'armer, de se battre, de tuer...dépassées par leurs actes "La vie échappe à notre contrôle, la vie au milieu de la guerre échappe à tout contrôle.", mais n'exprimant aucun regret "Les doutes sont pour les faibles. Les regrets, pour les femmes qui ont encore des choses à perdre.", poussées par une rage indicible, un besoin évident de justice, de vengeance, de lutter corps et âmes, de danser sous les bombes pour ne pas être réduites au silence, pour recouvrer leur dignité.

«Quiconque étouffe mes mots, je le tue.
Ce n'est pas que c'est facile, mais à présent ça a l'air tellement plus abordable. Tuer est devenu une nécessité. le sang glisse dans les mains, s'écoule entre les phalanges. On vomit son dégoût. Puis on avance.»

«Vous ignorez ce qui brûle, ce qui ronge, les muqueuses, la peau des cuisses. Vous ignorez les tambours du ventre quand les poings s'enfoncent. Vous ignorez, je vous envie. Je vous souhaite un quotidien sans encombre.»

La construction du récit est très intéressante : des femmes, des hommes témoignent, se confient à des journalistes, et ce procédé d'écriture renforce la dimension humaine de ce récit. L'auteure nous invite à mieux les connaître, les comprendre et c'est tout naturellement, que l'on se sent proche d'eux, que l'on s'y attache, que l'on partage leur haine, leur colère, leur dévouement pour leur pays.
La force des ces femmes est inouïe, leur engagement est remarquable, héroïque, force l'admiration, elles incarnent le courage et un amour infini pour la Vie.
Une image me hante encore, celle des enfants de la guerre, "des enfants qui n'ont pas dans la bouche
le goût de l'innocence.", enrôlés par la force des choses dans cette barbarie.
Un récit qui ne peut laisser indifférent, qui m'a transportée bien loin de mon quotidien, qui m'a émue aux larmes et résonne encore au fond de moi comme un très bel hommage rendu à ces combattantes, puissantes et héroïques face aux horreurs qu'une guerre civile inflige.

« Séraphine est une de ces femmes qu'on sous-estime parce qu'elles sont des femmes. On les peint fragiles et précieuses, mais on détruit ce qu'on pensait ériger au rang d'oeuvre d'art. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Cécile Lapertot manie avec excellence une écriture dense et prenante, rythmée par des refrains sombres et cruels, à la manière de mantras récités pour se donner du courage, se déconnecter de la réalité et auxquels le lecteur s'accroche, comme envoûté.
Dans ce pays d'Afrique, la guerre fait rage, et si on n'agit pas, on subit. On se soumet au racket, aux tortures, aux mises à tabac, au vol, et pour les femmes, aux viols.
On le sait, le viol est une arme de guerre. Les miliciens qui saccagent le petit village paysan de Séraphine le savent bien. Une fois les maisons pillées et brûlées, les hommes égorgés, les enfants enlevés pour être enrôlés en tant que soldat - guetteur, les femmes sont violées. Toutes. Plusieurs fois.
Comment se remettre de ce crime?
Séraphine n'a plus d'avenir: plus de maison, plus de famille, plus de fiancé car celui qui lui était promis ne voudra plus d'une femme déshonorée.
La troupe des "Lionnes impavides", menée par la spectaculaire Blandine, sera la seule porte ouverte vers un futur possible: tuer pour ne plus être soumise.

Un roman captivant, difficile à lâcher durant les 150 premières pages, puis qui, malheureusement, perd un peu de son souffle, lors des passages reprenant les réflexions des personnages secondaires. Toutefois, Céline Lapertot posède un réel talent d'écriture que l'on rencontre assez rarement. Une auteure à suivre!


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J'avais tellement aimé ma précédente lecture de Céline Lapertot que j'avais découvert avec Ne préfère pas le sang à l'eau que je voulais découvrir les deux autres ouvrages qu'elle a écrit.

Celui-ci est son deuxième roman (le premier « Et je prendrai tout ce qu'il y a à prendre ») m'attend sur mes étagères mais je vais laisser passer quelques jours car on ne ressort pas indemne d'une telle lecture.

Dès les premières pages, comme précédemment, on entre dans le vif du sujet avec l'attaque du village de Séraphine et le massacre de sa famille : son jeune frère, sa mère et son père qui assistera à son viol avant de mourir.

L'action se déroule en Afrique, mais qu'importe le pays, elle se déroule là mais pourrait se dérouler ailleurs, dans un pays en guerre. Séraphine est une jeune fille de presque 20 ans, qui rêvait d'épouser Sumpun dont elle était amoureuse, les fiançailles étaient proches mais les miliciens qui vont croiser son chemin vont changer le cours de sa vie. Adieu les rêves, plongeon brutal dans la réalité d'une guerre.

Elle a échappé à la mort de justesse, mais n'aurait-elle pas préférer mourir, et va se trouver projetée dans une armée principalement composée de femmes, les « Lionnes impavides » qui ont toutes subies outrages et violences et qui n'a qu'un seul but, chasser et tuer les miliciens responsables de ses douleurs familiales, physiques et mentales.

Elle partira rejoindre Blandine, la chef de cette armée, celle qui était à son chevet et qui lui a insufflé l'envie de se lever, de marcher, de lutter et de rejoindre celles qui se battent. Elle sera son étoile, son modèle, celle qu'elle voudra devenir.

La marche est notre socle, le fondement de notre petite civilisation. Nous marchons pour vendre, nous courons pour fuir mais nous marchons encore pour tuer. (p22)

Séraphine n'a plus rien à perdre car elle a déjà tout perdu : sa famille, sa vie future car aucun homme ne voudra d'elle désormais et puis elle veut se venger : elle ne veut plus subir, si on la touche : elle tue, si on l'empêche de parler : elle tue, si on l'empêche de penser : elle tue. C'est une véritable machine de guerre.

Et ce ne sont pas que des mots, car sur sa route elle rencontrera Nerine qu'elle sauvera d'un viol et d'une mort certaine et devra passer aux actes en tuant son agresseur, elle sait désormais qu'elle peut tuer.

Ce que j'aime dans les romans de Céline Lapertot, et plus particulièrement dans celui-ci c'est qu'elle se glisse littéralement dans la peau de ses personnages et s'imprègne de ce qu'ils vivent : pesant le pour, le contre, analysant leurs sentiments, leurs réactions en fonction des événements, des rencontres.

La narration est faite à plusieurs voix, parfois face aux journalistes, comme un reportage. Chacun parle de soi mais aussi des autres ce qui permet d'avoir un regard extérieur sur chaque personnage, confrontant les différents points de vue,les différents ressentis : Séraphine, Blandine, le Docteur Basonga, Nerine, Mélusine avec qui elle nouera une relation oscillant entre doute, jalousie, amitié, car enrôlée alors qu'elle faisait partie d'un groupe ennemi et Kadhi, jeune homme troublé par Mélusine et qui donne une note d'espoir dans toute cette noirceur.

Chacun sa vision : la blessée, la chef, le médecin, la rescapée. Celle qui commence, celle qui sait, celui qui soigne et celle qui n'avait peut être pas le choix.

Il y a la violence, la haine, la détermination de ces femmes qui n'ont plus peur de rien : ce sont les « lionnes impavides » que peut-il leur arriver qu'elles n'ont déjà subi : les larmes, le sang elles savent ce que c'est, on les a amputés de leur vie de femme, parfois d'une future vie de mère, elles n'ont plus rien à perdre que leurs vies et tant qu'elles avancent elles ne pensent pas au passé, elles sont encore en vie.

Les phrases sont courtes, les mots sont durs et implacables, le rythme est soutenu. Pas de faux-semblants, pas d'édulcorant on est dans le vif du sujet, face à ceux qui violent, qui égorgent et qui humilient.

Il y a Blandine, la meneuse, la guerrière, qui détecte au premier regard ceux qu'elle va enrôler dans son armée et qui fait preuve de discernement dans ses choix. Elle se tient droite, elle sait où elle va et qui elle emmène avec elle.

La haine exige tellement moins de force que le pardon. (p159)

Mais elle peut être aussi un colosse aux pieds d'argile car pour tenir ce poste il faut être solide, entière et le combat est rude.

Les femmes dansent sous les bombes mais leurs corps et leurs âmes ont tellement soufferts que la danse n'est pas tendre. Elles sont broyées, blessées mais elles deviennent de vraies guerrières. Elles dansent ensemble, la douleur les unit.

C'est avec le même souffle que j'avais trouvé dans Ne préfère le sang à l'eau que l'auteure nous parle de l'injustice, de la violence, des femmes mais aussi des enfants pris dans la tourmente de la guerre, jeunes, très jeunes, trop jeunes et qui deviennent également des armes de guerre.

Les deux romans que j'ai lus de Céline Lapertot sont des cris sur notre monde, sur sa brutalité, sur les innocents qui payent le plus gros tribut, parce que plus faibles.

Quelle force l'auteure met dans ses récits : on ouvre le livre et malgré les horreurs décrites, on est happé par le récit, on tourne les pages, oscillant entre émotion, douleur et admiration, oui admiration pour ces femmes qui se battent afin d'obtenir, non pas réparation car rien de ce qu'elles ont subi n'est réparable, mais justice pour le mal qu'on leur a fait.

Oui quand on ouvre un livre de Céline Lapertot on part pour un voyage dont on revient bouleversé par le rythme et les mots, par la colère qu'elle glisse dans chacun, c'est une claque mais aussi une prise de conscience.
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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Cette année, j'ai rencontré pour la première fois la plume de Céline Lapertot et ce fut un coup de coeur. Avec son autobiographie, elle m'avait tellement bouleversé que je m'étais juré de partir à l'assaut de ses autres oeuvres. Pour une fois, j'ai rapidement tenu parole.

Dans ce court roman, elle s'intéresse de près à des femmes devenues soldats dans un pays en guerre. En alternant en différents points de vue, elle nous dépeint la vie de ces combattantes. On assiste à leur passé, leurs blessures, leurs espoirs, tout ce qui les amenées à devenir des « lionnes impavides ». Mais le talent de l'auteur ne se contente pas de dresser des portraits de femmes et va beaucoup plus loin. Elle s'engouffre dans leurs entrailles pour nous délivrer leurs pensées les plus intimes. Alors les sensations deviennent palpables et les sentiments deviennent authentiques. On est dans leur corps, on subit leur destin.

En osmose avec elles, on découvre que, sous leur apparence de machines, ces soldats restent des êtres humains. Leur comportement ne s'est pas complètement déconnecté de leur nature propre, malgré les traumatismes qu'elles ont vécus. Elles restent jalouses, envieuses, impressionnables, ressentent la vengeance, l'amour, la tristesse… comme les femmes qu'elles étaient.

Grâce à ce texte sombre d'une puissante humanité, l'auteure prouve que la littérature est un art à part. Elle peut faire ce que aucun film, aucune peinture, aucune musique ne peut matérialiser. Elle creuse l'âme humaine et en extirpe les émotions. On peut ainsi vivre les évènements de l'intérieur et devenir les témoins de ces drames, qui touchent et détruisent les femmes à travers le monde.

Après avoir lu « Ce qui est monstrueux est normal », j'avais affirmé que Céline Lapertot semblait appartenir aux auteurs qui, quoi qu'ils écrivent, m'enthousiasment à tous les coups. « Des femmes qui dansent sous les bombes » me donne raison ! Courez vite découvrir cette écrivaine de talent !
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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Un pays, une terre en Afrique, peu importe l'emplacement géographique exact. Un pays où depuis des années des miliciens sèment la terreur, violent femmes et jeunes filles, volent, égorgent, transpercent et massacrent les villageois.
Voilà huit mois que Séraphine a les chairs meurtries par le viol des miliciens et l'âme torturée par le massacre de sa famille.
Elle gomme sa féminité désormais inutile, pour ne laisser place qu'à la guerrière, une guerrière vengeresse. Elle fait partie de l'armée régulière pour combattre afin que son pays revive.
Tuer ne fait plus peur, tuer est son seul avenir. Tuer est nécessaire pour sauver, pour protéger les autres.

« Quiconque tente de grignoter ma maigre parcelle de vie je le tue »
Tout au long du roman, des phrases prophétiques du même type sont scandées par les guerrières.

Plusieurs voix se livrent à la caméra et au micro d'un ou d'une journaliste. Des jeunes qui sont nés dans ce monde habité par la violence.
— La voix de Séraphine qui donne les raisons de son douloureux cheminement vers son statut de guerrière. Avait-elle d'autres choix ? Toutes ces femmes violées et déchirées ont-elle réellement le choix ? Elles sont nées dans ce pays en guerre et en tant que femmes quel avenir s'offre à elle ? Elle a quitté ses tongs pour chausser des Doc Martens et marcher vers la guerre. La mort de son ancien bonheur est d'autant plus dur qu'elle n'en mesurait pas le prix lorsqu'elle pouvait encore le vivre.
— La voix du médecin qui lutte pour sauver les vies cassées de son pays.
— La voix de Nerine, une paysanne sur le passage de Séraphine et qui, grâce à cette rencontre unique, va pouvoir continuer à travailler au champ.
— La voix de Blandine, avec sa rage de vaincre, qui forme des nouvelles lionnes impavides pour défendre ce pays meurtri.
— La voix de Mélusine, la renégate, celle qui faisait partie du clan des miliciens.
— Et enfin, parmi toutes ces voix féminines, celle de Kadhi, jeune homme qui ouvre une fenêtre au milieu de cette noirceur.

Céline Lapertot met des mots sur l'innommable avec des phrases d'une dureté implacable. L'analyse qu'elle nous fait de la douleur, de la souillure du corps violé est dure. C'est glaçant.
Beaucoup de questions souvent sans réponse. L'auteure en supprime même les points d'interrogation. Il y en aurait trop tout au long de l'histoire de Séraphine et de ses soeurs africaines.
Son roman est touchant, poignant mais ne manque pas non plus de lumière et d'espoir. N'hésitez pas à suivre ces femmes déterminées qui avancent pour triompher de la barbarie des hommes en se battant et en continuant à danser, des danses de souffrances mais aussi des danses de survie.

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Une incroyable histoire, que j'ai lu d'une traite ! le résumé pourrait vous faire croire qu'il s'agit-là d'un roman où les larmes et les Kleenex seront vos compagnons de lecture... Pas du tout ! Ce livre est une petite bombe de courage, d'héroïsme et de liberté. Il est bien évident que les sujets traités sont plus que graves et dramatiques, mais la façon dont il nous est narré, le lecteur n'aura pas d'autre choix que de lever le poing face au courage de Séraphine. (Bon, j'exagère un peu, mais pas tant que cela !)

J'ai adoré ce livre. Sans avoir à parler de son côté prenant, puisque je n'ai pas réussi à le lâcher, ce roman porte la couleur de la justesse. Sans être morbide, l'auteure a su préserver un certain équilibre entre la sensibilité et la retenue, mélangée à une touche de sauvagerie et de bravoure. On accompagne ces femmes de la première à la dernière page, sans aucune difficulté.

La plume de Céline Lapertot, que je ne connaissais pas, est simple et efficace et c'est ce genre de plume qui me plaît le plus. Pas la peine de palabrer sur des dizaines de pages pour dire ce qu'il y a à dire. C'est direct et ça fonctionne très bien ! Ce que j'ai également apprécié, c'est le rythme de cette histoire et la façon dont elle a été construite. Ca va vite, ça bouge et ça mord comme une lionne.

Pour conclure, il s'agit, évidemment, d'un livre que je vous souhaite de découvrir, mais pas seulement. Je pense que Céline Lapertot est une auteure française qu'on se doit de tenir à l'oeil. J'ai hâte de la découvrir dans un tout autre univers.

Lien : http://avoslivres.canalblog...
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Séraphine vit tant bien que mal entourée de sa famille au Congo, tandis qu'une guerre civile ravage le pays. Mais tout bascule lorsque des miliciens saccagent son village, tuent et détruisent tout sur leur passage. C'est à ce moment-là qu'elle découvre réellement ce que c'est, la guerre. Un univers sans pitié où les plus forts massacrent, molestent et abusent tous ceux qui ne sont pas de taille à résister.

« Il ne faudrait pas créer la vie, voilà ce qu'il pense en se confrontant au regard de sa fille, immobile, sur le dos, le cou penché vers lui, on ne devrait vraiment pas créer la vie. »

Séraphine perd sur le coup sa famille, son avenir, son innocence et ses rêves. Mais au lieu de rester à terre, elle va se relever, poussée par une rage nouvelle, une colère insatiable. Elle va rejoindre l'armée régulière et devenir une "lionne impavibe". Aux côtés de femmes qui se tiennent debout malgré leurs ecchymoses, elle se battra, elle tuera, elle sauvera, elle aimera aussi - mais surtout, elle dansera sans cesse sous les bombes qui pleuvront sur elle.

« Vous ignorez ce qui brule, ce qui ronge, les muqueuses, la peau des cuisses. Vous ignorez les tambours du ventre quand les poings s'enfoncent. Vous ignorez, je vous envie. Je vous souhaite un quotidien sans encombre. »

« Nous n'avons jamais fini d'avoir tout à prouver. Il faut sans cesse recommencer, sans cesse tomber et se relever, sans cesse prouver que nous valons mieux que ce que, parfois, nous projetons dans le regard des autres. »

Séraphine est un personnage d'une rare force. Comment survivre après ce qu'elle a vécu. On admire sa rage de vivre, sa force impavide. Elle va trouver le courage de se relever et de se battre en devenant une guerrière, une lionne. Cette haine, cette rage, cette soif de tuer, qui brule au fond d'elle, nous fait un peu peur, et pourtant… on ne peut qu'aimer et admirer cette femme qui se consume et brule tout sur son passage.

« Quiconque étouffe mes mots, je le tue.
Ce n'est pas que c'est facile, mais à présent ça a l'air tellement plus abordable. Tuer est devenu une nécessité. le sang glisse dans les mains, s'écoule entre les phalanges. On vomit son dégout. Puis on avance. »

Face à des journalistes, à des caméras, les différents protagonistes se confient, parlent de leur histoire. La construction du récit est donc particulière, ce qui donne encore plus d'ampleur au roman. Chaque personnage a sa profondeur, ses blessures, son passé. Mais ils sont tous animés par une même force indicible, cette même volonté de sauver avant même de se sauver soi-même. Je me suis attachée à chacun d'entre eux, mais j'ai une pensée particulière pour le docteur Bosango que j'ai aimé de tout mon coeur.

« Séraphine est une de ces femmes qu'on sous-estime parce qu'elles sont des femmes. On les peint fragiles et précieuses, mais on détruit ce qu'on pensait ériger au rang d'oeuvre d'art. »

Le style littéraire de l'auteure m'a entièrement conquise. Céline Lapertot a une plume poignante qui nous fait tressaillir, qui nous remue les tripes, qui nous bouleverse. Les mots sont précis et tombent justes. Des femmes qui dansent sous les bombes est un roman plein de courage et d'héroïsme ; un roman qui déborde d'émotions si fortes qu'elles nous transcendent et nous frappent en plein coeur. Ce récit d'une force et d'une rage abyssales ne peut nous laisser indemne. On est happé par l'histoire de cette femme qui se bat pour quelque chose de bien plus grand qu'elle.

« Une femme vient d'enfiler son uniforme et ses rangers, mais ce qui la surprends dans cette vision, c'est ce qui dort contre son dos. Un bébé sanglé à même l'uniforme, un bébé qui repose sa tête sur le vert caca d'oie, un bébé qui ne sait pas dans quel monde il a réussi à s'endormir paisiblement. »

Des femmes qui dansent sous les bombes est un chant, une danse, un hymne, qui redonne puissance aux femmes.
Lien : http://attrape-mots.blogspot..
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