_Je vous ai répondu : c'est Louise qui porte en elle les clés de notre avenir, celui de Pierre, le sien, le mien...elle seule.
_Mais toi. Tu...
_Sa décision sera la mienne!
Je peux vous en parler, d'abord parce que je n'aime pas le secret, ensuite parce qu'il s'agit de notre patrimoine millénaire à tous: la vigne.
Souvent aussi, en semaine, après le travail, en robe à large jupe, foulard flottant au cou, couverte d'un chapeau cloche à ganse velours, Louise partait seule en virée de campagne.
Ces jours-là, personne ne s'occupait des sarments trop longs ni les laisses trop courtes. C'était la dernière fête avant l'arrivée de l'hiver, l'avant-dernière avant le réveil de la nature. Suivrait une léthargie à peine troublée par le passage de saint Nicolas et la naissance miraculeuse de Noël, nourrie de pommes fatiguées et de noix croquées au coin du feu, de vieilles histoires tricotées avec de nouvelles chaussette et de pipes grillées en sirotant de l'eau-de-vie de mirabelle, l'or du ciel lorrain.