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Citations sur Face à Gaïa : Huit conférences sur le nouveau régime climatique (17)

Agir signifie faire venir son existence [...] du futur vers le présent.
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On ne se guérit pas de l'appartenance au monde. Mais à force de soin, on peut se guérir de croire qu'on n'y appartient pas; que ce n'est pas la question essentielle; que ce qui arrive au monde ne nous regarde pas [...] Ce qu'il faudrait par conséquent c'est découvrir un parcours de soin.
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Personne, littéralement personne, ne peut jouer le rôle impossible de l'Anthropocène, et c'est là tout l'intérêt de la notion. Parler de l'origine anthropique du réchauffement climatique global n'a aucun sens, en effet, si l'on entend par "anthropique" quelque chose comme "l'espèce humaine". QUi peut prétendre parler de l'humain en général, sans susciter aussitôt mille protestations ? Des voix indignées vont s'élever pour dire qu'elles ne s'estiment en aucune manière responsables de ces actions à l'échelle géologique - et elles auront raison ! Les nations indiennes au coeur de la forêt amazonienne n'ont rien à voir avec "l'origine anthropique" du changement climatique - du moins tant que des politiciens en campagne électorale ne leur ont pas distribué des tronçonneuses. Pas plus que les pauvres des bidonvilles de Bombay qui ne peuvent que rêver d'avoir une empreinte carbone plus importante que celle laissée par la suie émise par leurs foyers de fortune. Pas plus que l'ouvrière obligée de faire de longs trajets en voiture parce qu'elle n'a pas pu trouver un logement abordable près de l'usine où elle travaille: qui oserait lui faire honte de sa trace carbone ? C'est pourquoi l'Anthropocène, malgré son nom, n'est pas une extension immodérée de l'anthropocentrisme. [...] C'est bien plutôt l'humain comem agent unifié, comme simple entité politique virtuelle, comme concept universel, qui doit être décomposé en plusieurs peuples distincts, dotés d'intérêts contradictoires, et convoqués sous les auspices d'entités en guerre - pour ne pas dire de divinités en guerre. L'anthropos de l'anthropocène ? C'est Babel après la chute de la tour géante. Enfin l'humain n'est plus unifiable ! Enfin il n'est plus hors sol ! Enfin il n'est plus hors de l'histoire terrestre !
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Ils savent, ils entendent, mais au fond, ils n'y croient pas. C'est là, je crois, qu'il faut aller chercher l'origine profonde du climato-scepticisme. Ce n'est pas un scepticisme qui porte sur la solidité des connaissances mais un scepticisme sur la position dans l'existence. S'ils doutent ou s'ils dénient, c'est parce qu'ils prennent ceux qui crient à temps et à contre temps qu'il faut changer totalement et radicalement de mode de vie pour des zozos dans plus de crésdit que Philippus le Prophète qui effraie Tintin dans l'Etoile Mystérieuse avec son gong et son drap blanc. "Le changement de vie total et radical", mais ils l'ont déjà accompli, justement, en devenant résolument modernes ! Si la modernité n'était pas si profondément religieuse, l'appel à s'ajuster à la Terre serait facilement entendu. Mais comme elle a hérité de l'Apocalypse simplement décalée d'un cran dans le futur, elle ne suscite qu'un haussement d'épaules ou qu'une réposne indignée. "Comment pouvez-vous venir nous prêcher encore une fois l'Apocalypse. Où est-il écrit dans les Livres qu'il y aura une apocalypse après la première ? La modernité est ce qu'on nous a promis, ce que nous avons conquis, parfois par la violence, et vous prétendez nous l'arracher ? Nous dire que nous nous sommes trompés sur le sens de la promesse ? Que la Terre promise de la modernité devrait rester promise ! C'est insensé".
Et en effet, il n'est écrit nulle part que l'Apocalypse puisse être suivie d'une autre. D'où cette certitude indéracinable, ce calme total, cette froideur de marbre, de ceux qui lisent pourtant tous les jours l'annonce de catastrophes diverses. Il semble qu'ils aient droit à cett terre qu'on leur a en effet promise, mais cette terre n'a rien de terrestre, puisque ce qui est nié, justement, c'est qu'elle ait une histoire, une historicité, une rétroaction, des capacités, bref, des puissances d'agir. Tout tremble, mais pas eux, pas le sol sur lequel ils ont les pieds posés.Le cadre où se déroule leur histoire est forcément stable. La fin du monde n'est qu'une idée.
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Au moment même où il faudrait avoir autant de définitions de l'humanité qu'il y a d'appartenances au monde, c'est le moment même où l'on a enfin réussi à universaliser le même humanoïde économisateur et calculateur sur toute la surface de la Terre. Sous le nom de globalisation ou de mondialisation, la culture de cet étrange OGM - de son nom latin Homo oeconomicu - s'est répandue partout... Juste au moment ou l'on a un cruel besoin d'homodiversité ! Pas de chance vraiment: il faut affronter le monde avec un humain réduit à un tout petit nombre de compétences intellectuelles, doté d'un cerveau capable de faire de simples calculs de capitalisation et de consommation, auquel on attribue un tout petit nombre de désirs et que l'on est enfin parvenu à se convaincre de se prendre vraiment pour un individu, au sens atomique du mot. Au moment même où il faudrait refaire de la politique, on n'a plus à notre disposition que les pathétiques ressources du management et de la gouvernance. Jamais une définition plus provinciale de l'humanité n'a été transformée en un standard universel de comportement. Au moment même où il faudrait desserrer l'étreinte de la première Nature, la seconde Nature de l'économie impose sa cage de fer plus strictement que jamais.
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Ils ne voient l'avenir que sous la forme de romans d'anticipation. Rien de surprenant à cela: ils n'ont jamais fait assez attention à la direction dans laquelle ils s'engageaient, obsédés par l'idée d'échapper à leur attachement avec la vieille terre. Habiles au détachment, ils semblent vraiment naïfs quand la question se pose du rattachement à une nouvelle résidence, de la délimitation d'un nouveau nomos. Ils ressemblent à des astronautes se préparant à faire une sortie dans l'espace sans combinaison. Les Modernes sont extraordinairement habiles à se libérer des chaînes de leur passé archaïque, provincial, renfermé, local, territorial, mais quand il s'agit de désigner les nouvelles localités, les nouveaux territoires, les nouvelles provinces, les nouveux réseaux étroits vers lesquels ils émigrent, ils se contentent d'utopie, de dystopie, de publicité et de grands mouvements de poitrine, comme s'ils avaient vraiment des poumons aptes à respirer l'air subtil et toxique de la mondialisation.
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Aussi épouvantable que fut l'histoire, la géohistoire sera probablement pire puisque ce qui, jusqu'à maintenant, était resté tranquillement à l'arrière-plan, - le paysage qui avait servi de cadre à tous les conflits humains - vient de rejoindre le combat. Ce qui était une métaphore jusqu'à présent - que même les pierres crient de douleur face aux misères que les humains leur ont faites - est devenu littéral.
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Le piège est bien monté: alors que les puissants jouent sur les deux tableaux, discernant bien la charge prescriptive des faits et, en même temps, limitant le débat à la seule discussion des découvertes dont ils nient l'existence, les autres sentent bien que les faits entraînent une action, mais s'interdisent de les suivre de l'autre côté de la barrière que leurs adversaires traversent pourtant allègrement dans les deux sens ! Conséquence: les pseudo-sceptiques n'ont fait qu'une bouchée de leurs malheureux opposants.
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[...] les délégations dont le nom rappelle d'anciens éléments dits de la "nature" - "Sol", "Océans", "Atmosphère", "Espèce en voie de disparition" - ne sont pas là pour naturaliser la discussion en rappelant aux humains les nécessités de leur "environnement" mais afin de repolitiser la négociation, en empêchant des coalitions de se former trop vite sur le dos des autres.
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Maintenant qu'il n'y a plus le pouvoir commun de l'Etat de la NAture et de ses lois pour tenir toutes les entités "en respect", c'est une guerre de tous contre chacun, dans laquelle les protagonistes peuvent désormais être non seulement le loup et l'agneau, mais également le thon et le CO2, le niveau de la mer, les nodules des plantes ou les algues, en plus des nombreuses factions d'humains en désaccord sur à peu près tout.
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