Dis, Juvin, c’est quoi, une « tête d’andouille » ?
— Quoi ?
— Ben oui, tu m’appelles toujours « tête d’andouille ». Mais c’est quoi, une andouille ?
— …
Pris au dépourvu, Julien laissa s’installer un silence pesant. Ce qu’il pouvait être agaçant, ce gamin, parfois, avec ses questions débiles ! Voyant que le jeune homme ne répondait pas, le petit insista :
— C’est méchant, une andouille ?
— Heu… non.
— Alors, c’est quoi ?
— Heu… Eh ben… Heu… C’est mignon, bien au contraire ! C’est un petit animal tout blanc, avec de très jolis reflets jaune d’or, comme le soleil. Ça a une tête toute frisée, un peu comme un caniche, tu vois, avec de magnifiques yeux verts, brillants comme des émeraudes.
L’enfant ouvrait des yeux émerveillés :
— Ah ! Mais, alors, pourquoi j’en a jamais vu, moi, des andouilles ?
Julien, gêné, toussota :
— Hum… Hum… c’est que… heu… c’est que ça vit uniquement au Pérou ! Voilà. Et tu y es déjà allé, toi, au Pérou ?
— Non.
— Ben voilà. C’est pour ça que tu ne connais pas !
Il y avait, tout au fond de sa voix, les vents fougueux de l'Atlantique, l'écho des pluies d'automne et le murmure des feuilles de vigne dans les grandes plaines. Nostalgique, les yeux dans le vague, il poursuivit :
— Et puis, La Rochelle, son aquarium, la tour des Quatre Sergents…
— La tour d’Argent ? L’interrompit Tom, elle est vraiment en argent ? Comme dans les contes de fées ? L’enfant ouvrait de grands yeux incrédules, et Julien n’eut pas le cœur de le détromper. Avec un sourire, il affirma :
— Oui. En argent. Comme dans les contes de fées…
Le petit garçon souffla, admiratif :
— Eh ben dis donc, ça doit valoir cher, ça ! C’est le roi, qui doit être content d’avoir une tour pareille dans sa ville.