AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de itculture


Après avoir lu son premier livre La captive de Mitterrand, totalement séduite par son style et sa courtoise impertinence, j'ai accepté la proposition de masse critique Babelio pour recevoir celui-ci dont j'ignorais le sujet.
À la recherche de ses origines familiales qui le conduiront en France en Italie et en Espagne, le narrateur mène une véritable enquête, doublement marquée par l'ignorance complète du parcours de sa grand-mère depuis son Italie natale jusqu'à son suicide à Paris le 7/12/1987, et par son absolu attachement affectif à elle. D'ailleurs c'est à elle qu'il s'adresse dans son récit : souvenirs, questions, suppositions, explorations et découvertes. Une enquête sur un secret de famille de près d'un siècle, dont le déclic sera le décès de sa propre mère, en 2017.
A la mort de Pia Nerina de Cecchi, (qui fut sa mère de substitution), il a 13 ans et ne sait rien d'elle, de sa famille italienne, de son arrivée en France, de ses amours, de ses revenus ; et qui fut le géniteur de sa mère, donc son grand-père ? Il découvre alors un parcours où le mensonge, la tromperie, les omissions, le secret et certainement l'opportunisme furent le canevas de sa vie.
Suivons la chronologie des faits : née à Naples le 25/10/1907, arrivée en France probablement début 1935, elle michetonne vraisemblablement sur la côte d'Azur car elle est arrêtée à Cannes au Palm Beach le 10/08/1935 pour « prostitution clandestine » et « élément indésirable dans les salles de jeux ».
Pour devenir française et inexpulsable, elle fait un mariage blanc le 26/12/1935 et divorce en juin 1942, un mois avant la naissance de sa fille Victoria, le 24/07/1942. Enfant dont le mari n'est pas le père, car ils n'ont jamais vécu ensemble. Issue d'une famille italienne désargentée, sans avoir d'activité professionnelle, à 38 ans elle achète un appartement de 100 m2, sur les Champs Elysées le 18/08/45 pour la somme de 800 mille francs. Une fortune au sortir de la guerre !
Pour le suivre dans son labyrinthe d'exploration, l'auteur dépose des indices sous forme de périphrase, et pour la lectrice curieuse que je suis, j'ai développé les indications. Pia Nerina aurait été protégée et entretenue par un individu puissant, espagnol richissime, surnommé Pyrrhus (quelle idée ce pseudonyme !) Il s'agit en réalité de Miguel Mateu Pla, héritier de la firme Hispano-Suiza, franquiste et phalangiste, maire de Barcelone de 1939 à 1945, ambassadeur à Paris de 1945 à 1947 et mort à Barcelone le 1/10/1972, date à laquelle il a cessé ses versements. le glorieux CV d'un présumé grand-père.
Pia Nerina élève seule sa fille sans père, qui elle aussi décidera d'avoir un enfant sans père, David, né en 1974, mais qui aussitôt se libère de ses responsabilités éducatives sur Pia Nerina. Victoria est une mère toxique. Dans ce trio, elle instille l'angoisse et la peur au quotidien chez l'enfant et la grand-mère qui s'échappent de l'appartement pour ne pas subir ses assauts de violence. « Folle » dit-on.
Dans ce contexte de maltraitance, comment équilibrer le développement d'un enfant où les interactions sociales n'existent pas, les copains d'école jamais invités, où l'austérité et l'économie sont le menu quotidien ?
David le Bailly expulse comme d'autres avant lui, dont Edouard Louis ou Eddy Bellegueule, les métastases du mal pour se libérer et avancer. J'imagine la déchirure, oser mettre à nu ainsi son intimité profonde, c'est une mue pour permettre la renaissance et afficher son identité et sa légitimité longtemps refoulées. C'est un document dense où l'on perçoit son besoin vital de comprendre ses origines, de rendre un hommage lumineux à sa grand-mère et acter l'épilogue définitif avec sa mère. Car quelles que soient déceptions, amertumes, outrages ultérieurs, la famille demeure le creuset, ce lien privé d'où l'on ne peut s'extraire. Il nous moule, nous imprègne, et nous oblige à la référence. Tout est dit. Mais subsiste ma question finale : est-ce la réalité ou bien une fable ? seul l'auteur détient la réponse !
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}