Ecrire, c'est comme le métro. Vous savez où vous allez, vous n'avez pas un choix infini de destinations, il y a des horaires à respecter, des zones obscures et de plus, ça n'est pas toujours agréable. Mais il y a tout ce que vous ne pouvez pas prévoir, ce qui vous transporte (sans jouer sur les mots), vous expose, vous atteint momentanément ou durablement. Je veux parler des secousses, du rythme, des rencontres. Les regards échangés, parfois glissant sur le bouclier des glaces, les mots captés, les bouts de phrases, conversations, monologues, instantanés insensés, fractures, fractionnés, opus incertum de bris et de débris dans toutes les langues, gestes arrêtés, expressions détachées de leur contexte, sourires extraits de visages, commissures tombantes, paupières voilées, éclats sur les verres des lunettes, soupirs, lâchers, borborygmes.
Elle m'a répondu en montrant ses doigts de pieds: "J'ai onze ans." Maintenant que l'été est venu je l'emmène à la rivière. Elle est pieds nus dans des tongs.Nous nous déchaussons et marchons sur les galets pour voir les poissons, quelquefois ils viennent mordiller les pieds par derrière. L'eau brille sur ses pieds nus, sur ses ongles d'orteils peints. Nous nous asseyons sur le sable, elle est en jupe et en T-shirt. et je la chatouille partout, dans le cou ,sous les bras, sous ses pieds, elle rit et elle dit: "Arrête, Yo, ça chatouille".
... le crépuscule est un breuvage qui enivre et endort la terre et le ciel, ...
Ujine avait toujours aimé les pieds grands et minces. , l'orteil médiant qui dépassait des autres. Elle détestait ses propres pieds, elle détestait leur forme, trop plats, la couleur pâle, les orteils boudinés. Elle était avec les filles, au camps d'été, au bord de la rivière, il faisait chaud, elle avait retroussé son pantalon pour laisser couler l'eau froide sur ses jambes. Une fille avait dit à Ujine : "Alors mademoiselle-gros-orteils "? Depuis elle portait des sandales à bouts fermés, jamais des claquettes.
Elle tend les tongs à Sita, elle lui fait signe qu'elle les lui donne "Take, take !" Pas besoin de faire de longues phrases Sita a regardé les tongs et lentement elle les a enfilés Elle a de jolis pieds, fins, bruns, ses orteils s'écartent, le gros doigt de pied calé contre la tige de plastique comme si les tongs avaient été faites pour ses orteils Fatou regarde Sita, elle a des iris dorés, une petite lumière y danse
L'attente est un monstre vorace, cannibale.
Ecrire c'est comme le métro. Vous savez où vous allez, vous n'avez pas un choix infini de destinations, il y a des horaires à respecter,des zones obscures et de plus, ça n'est pas toujours agréable.
On nait seul, on meurt seul, on dort seul, c'est la seule chose dont on soit sûr.
A ras de terre, là où passe le vent qui soulève de petits nuages de poussière. C'est là que nous vivons, sans faire de bruit, presque sans bouger, presque sans rien faire. Il y a tellement de jours, tellement de nuits, là-haut, au-dessus de la terre, au-dessus des grands arbres, dans le ciel nu, au sommet des montagnes.
- Nos vies d'araignées -
Elle a demandé à Marc, son petit ami, de prendre son gros orteil dans sa bouche. "Quel goût ça a ?"
"ça a le goût du vinaire a-t-il dit". Elle a retiré son orteil. "Espèce de pervers" a-t-elle dit.
Cela s'appelle donc la solitude. Etre seul comme un gros orteil. Bien sûr la compagnie des autres orteils, les deux pieds.