Dans ce court récit,
JMG le Clézio rend hommage à son père, qui durant 22 ans a exercé en tant que médecin militaire itinérant de l'empire britannique en Afrique. Lorsqu'il le rencontre pour la première fois en 1948,
JMG le Clézio a 8 ans. Son père est alors marqué par ses années de séparation avec sa famille durant
la guerre, années de solitude et d'isolement durant lesquelles son travail dans la brousse l'a vieilli prématurément. Pour le petit garçon, son père est un homme dur et autoritaire, en total contraste avec la liberté, la vie pleine et grouillante qu'il découvre en Afrique.
Souvenirs des années d'enfermement durant
la guerre, souvenirs des premières sensations sur le sol africain, souvenirs d'une terre foisonnante où les corps s'éveillent enfin…
JMG le Clézio enfant découvre un véritable paradis en arrivant au Nigéria. Mais le sujet de ce texte proprement biographique n'est pas lui mais bien son père, Raoul le Clézio, un homme pour qui l'Afrique était le continent d'adoption et dont il dresse le portrait. Racines mauriciennes, études de médecine, premières années aventureuses et enchanteresses avec sa femme dans l'ouest camerounais, cassure lorsque
la guerre éclate et le prive de sa famille, retrouvailles tardives puis retour « en exilé » en France, la vie de Raoul le Clézio se déroule à travers le récit de son fils. Car si l'enfant ne comprend pas la dureté voire la brutalité de son père, l'homme qu'est devenu l'écrivain sait réhabiliter un inconnu chéri.
JMG le Clézio a certainement retrouvé trop tard son père pour qui les années de séparation ont été une véritable blessure et l'ont privé de l'enfance de ses enfants. Entre ces derniers et lui-même, beaucoup d'incompréhension persistera, allant même jusqu'à des relations tyranniques. Pourtant, l'auteur ne cache pas son admiration pour cet homme qui
haïssait le système colonial et vivait au plus près des hommes et des femmes qu'il soignait, conscient de leur générosité tout comme de leur folie. L'Afrique ne quittera jamais Raoul le Clézio tout comme aujourd'hui elle est partie intégrante de la vie de JMG le Clézio. Alors, si
l'Africain a manqué les premières années de la vie de son fils, il est certain qu'il lui a transmis ses racines et ce goût pour l'
ailleurs, le voyage et les gens.
La beauté et la sincérité des mots alliées aux photographies du père de le Clézio dans mon édition font de ce petit livre un ouvrage qui atteint parfaitement son objectif : rendre hommage au père et louer la beauté d'un continent qui a marqué pareillement un père et un fils.