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sur 571 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un après-midi d'été très chaud, installée dans une chaise longue, j'ai lu ce court roman de Jean-Marie le Clézio et j'ai été véritablement transportée. Par l'évocation magique d'un continent que je ne connais pas. Par la poésie et la beauté des phrases. Par l'évocation de l'enfance de l'auteur sans son père, puis la découverte de celui-ci et de l'Afrique, de sa liberté de petit garçon à peine entravée par l'autorité de ce médecin anticolonialiste. Un homme revenu en France à l'âge de la retraite, seul et désabusé, africain pour toujours comme le sera son fils.
Une expérience incomparable que peu de livres m'ont donné de vivre.


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En fait, lire une oeuvre de J.M.G le Clezio, c'est ne pas prendre de risques, car c'est une valeur sûre. Je ne dis pas cela parce qu'il a reçu le prix Nobel de littérature en 2008, mais simplement, parce que ses livres sont merveilleusement bien écrits, qu'ils soient romans ou récits peu importe. On retrouve toujours la même qualité, la même poésie, la même quête d'authenticité. Ici, l'auteur nous entraîne en Afrique de l'Ouest, tout particulièrement au Cameroun où son père fût médecin. Il n'y a pas d'exotisme, pas de regard entaché d'une quelconque supériorité ou de condescendance. C'est la réalité brute, la vie en Afrique, loin des villes et des colons... La vie avec les autochtones. Une vie en communion avec la nature, les éléments, sans fioritures, dans toute sa simplicité et sa réalité.
Un texte assez bref, ponctué ça et là de photographies appartenant à l'auteur.
Un livre magnifique!
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Ecrit 10 ans après Onitsha, dans lequel J M G le Clézio parlait de sa mère et des amies de sa mère, et de la difficulté qu'il a eu à faire connaissance avec un homme qui selon lui, ne pouvait être son père, dans l 'Africain il fait non seulement connaissance avec ce père, il essaie de comprendre son passé, son amour pour sa mère, et son attachement si fort à l'Afrique.

Pas l'Afrique des cocktails et de l'hypocrisie des colons.
Pas l'Afrique des palmiers et des bougainvilliers,
Ni une Afrique idéale et rêvée.

Plutôt l'Afrique sauvage, libre, puissante, presque dangereuse, violente et très humaine. Il court avec son frère dans la plaine d'herbes folles, comme une mer immense, ils sont libres, ces enfants. Libres aussi de massacrer les termitières, comme prise de possession par cet acte sadique devant l'immensité de la nature, la forêt équatoriale, la violence des orages.
Oui, les enfants, seuls blancs parmi tous leurs amis, se croient africains, d'abord parce que dans cette région ce qui compte ce n'est pas la naissance mais la conception, pour définir l'appartenance d'un être. Eux, ils ont été conçus au Nigeria.

Leur mère aussi, à sa façon , se fait africaine. Elle est gaie, sûre de faire le bon choix en suivant son mari au Cameroun, et répondant à ses amies parisiennes qui lui disaient : « Quoi, chez les sauvages ? » « ils ne sont pas plus sauvages que les gens à Paris ».

Quant au père, entre ses rêves de médecin itinérant, sa volonté de pas entrer dans le moule colonial qu'il haïssait, son intégrité, sa vraie connaissance des personnes qu'il soigne, lui, c'est le vrai africain. Les enfants le découvrent sûrement trop tard, et Le Clézio essaie de lui rendre justice, alors qu'étant enfant, il le prenait pour un ennemi, à qui il faisait une guerre sournoise. Mais.

Très longtemps, le père a parcouru ( à cheval, avec sa femme)les campagnes camerounaises, aimé surtout la marque et les traces de ces collines, de ces forêts et de ces herbages, et des gens qu'il a connus, qu'il a soignés, et puis la terre rouge, l'eau bleuie par le permanganate. le bonheur.

Le charme africain prend fin pour lui, lorsqu'il il connaît la solitude, la désespérance des jours. Epuisé par son travail incessant, alors que sa femme repartie accoucher à Nice est bloquée par la guerre, coupé du monde, sans nouvelles de sa famille, ne pouvant rejoindre femme et enfants, c'est vieilli prématurément par le climat équatorial qu'il les retrouve.

Il découvre, en quittant le Cameroun pour le Nigeria, où il se retrouve d'abord seul, que son rôle de médecin s'approche du rôle des autres colons, les policiers ( qui essaient d'interdire les meurtres rituels et les exactions entre villages), les juges et les soldats. Tous, ils exercent un pouvoir, surveillent et interdisent, entre autres la sorcellerie, les envoutements, les poisons, les amulettes cachées destinées à porter malheur, les amputations sauvages y compris certaines formes de cannibalisme.

Et puis, comme si la lèpre et l'éléphantiasis, les enfants agonisants, la gangrène, toute cette humanité souffrante ne suffisait pas, comme si l'indépendance des pays devaient leur apporter la renaissance, aurait dû leur apporter le renouveau, mais ne l'avait pas apportée, la guerre du Biafra, provoquée par les puissances occidentales à la recherche du pétrole, un des plus grands génocides du siècle, le néo colonialisme commerçant ( la vente d'armes, de chars d'assauts, mines antipersonnel, ceci dans les deux camps) sème l'horreur.

(Dans mon édition, des photos prises par le père ponctuent le livre, malheureusement pas toutes, que l'auteur décrit et que l'on aurait bien voulu voir. ) Heureusement pas celle des enfants martyrs que nous avons tous vu.


Le père , cet Africain ne rêve plus, pourtant Le Clézio conclut : « Peut être qu'en fin de compte mon rêve ancien ne me trompait pas. Si mon père était devenu l'Africain, par la force de sa destinée, moi, je puis penser à ma mère africaine, celle qui m'a embrassé et nourri à l'instant où j'ai été conçu, à l'instant où je suis né. »

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Dans ce court récit, JMG le Clezio revient sur la vie de son père, né à l'Ile Maurice, de nationalité britannique, devenu médecin après des études en Angleterre et qui a exercé toute sa carrière aux Colonies (Guyanne puis Cameroun et Nigéria) et est revenu ensuite passer sa retraite en France, à Nice. La guerre aura séparé la famille : la mère restée en France, y élève ses deux enfants, tandis que le père est resté en Afrique. JMG ne rencontrera son père qu'à l'âge de 7 ans quand, en 1948, il se rendra avec sa mère et son frère en Afrique où ils resteront quelques années. Le Clézio avait déjà raconté cet "épisode" africain de sa vie dans son roman Onitsha, que j'avais adoré. J'ai retrouvé avec délices ces paysages africains dont il a l'art de nous décrire toute la beauté, à la fois étrange et familière à l'enfant qu'il était. Et dans l'évocation des noms de villages ou de pays, on entend battre le coeur de l'Afrique : Benso, Bamenda, Ijama, Nyonnya, Bawop, Bakalung, Obudu, ... et le fameux sanctuaire de Aro Chuku, dont il avait amplement parlé dans Onitsha.

Dans ce récit qu'il veut davantage autobiographique que le précédent, Le Clézio tente de décrire cette rencontre entre l'enfant espiègle qu'il était, élevé par sa mère et sa grand-mère dans une grand liberté, avec cet homme austère, maniaque et brutal qu'était devenu son père, après des années de solitude affective et d'acharnement au travail dans cette ville d'Ogoja au Nigéria, si différente du pays enchanteur de Benso, au Cameroun, où il avait vécu avec sa femme avant la guerre. Quelques souvenirs, relatés avec beaucoup de pudeur, nous monteront à quel point cette rencontre fut difficile pour l'enfant.

D'un point de vue formel, ce livre est un vrai régal et Le Clezio s'y montre une nouvelle fois un merveilleux conteur. Sur le fond, je suis tout de même un peu frustré qu'il nous parle si peu de sa mère et de son frère, pourtant tous les deux présents lors de ces années africaines de l'auteur. De même, est escamoté ce qui s'est passé à l'île Maurice, ce "drame de Moka", qui a poussé le père à quitter cette île dont il gardera le souvenir comme d'un paradis perdu. Ces ellipses font bien-sûr partie du "style" de l'auteur qui raconte tout en retenant sa plume : les non-dits sont une partie de l'histoire. En témoigne aussi l'absence insolite de tout prénom dans ce récit, comme s'il s'agissait là d'un tabou. Comme le signe que le réel jamais ne peut se dévoiler tout-à-fait.
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J'ai lu presque tous les livres de J.M.G. le Clézio qui se place en tête de mes auteurs préférés. A chaque lecture, je suis emportée par la magie de son écriture envoûtante, dans un voyage coloré, aux multiples sensations, à la rencontre d'un pays, d'un continent, d'une civilisation.
Cette fois, il part à la rencontre d'un père qui lui a été si si longtemps étranger. C'est aussi une rencontre avec l'Afrique de l'Ouest, loin du système colonial, au Nigéria et au Cameroun où son père a été nommé médecin militaire sous l'autorité de l'administration britannique. A l'âge de huit ans, en 1948, J.M.G. rejoint son père en Afrique avec sa mère et son frère. Ils ont été séparés par la guerre et il découvre un homme inconnu, meurtri et amer qui, après avoir connu un intense bonheur en compagnie de sa femme et vécu en symbiose avec l'Afrique et ses habitants, s'est retrouvé pris au piège de ce pays et sans nouvelles de sa famille restée en France après la déclaration de la seconde guerre mondiale. Vingt ans plus tard, J.M.G. le Clézio a refait le voyage sur les traces de ce père autoritaire, inflexible et redoutable en cas de désobéissance, rendu amer par la solitude et les souffrances côtoyées, l'impuissance face aux ravages occasionnés par les guerres tribales et la colonisation. Les souvenirs qui submergent parfois soudainement l'auteur le rattachent indéfectiblement à l'Afrique, mais aussi à la vie de ses parents, celle d'avant sa naissance.
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Court mais intense moment de lecture . Le Clezio revient sur son enfance africaine , lorsqu'il a rejoint avec sa mère et son frère son père , médecin dans l'est du Nigeria et l'ouest du Cameroun.
Un dicton africain dit que l'on est né là où l'on a été conçu que cette trace perdure en nous.
Ce livre est tout d'abord celui consacrer à son père : Sa personnalité , l'évolution de son caractère, son amour de l'Afrique , sa rigueur, sa dureté.
C'est un livre sur les rapports familiaux et l'éducation.
C'est surtout un énorme cri de liberté: La liberté du médecin et de sa jeune épouse dans les contrées reculées africaines, loin du colonialisme ( on est entre deux guerres) où la magnifique écriture de l'auteur fait suinter la beauté du moment, le bonheur dans la simplicité , la vie rude mais belle, simple des africains.
La liberté , le petit le Clezio l'a côtoyée, au coté des fourmis et des termites , au milieu des autochtones alors que son père était d'une rigueur absolue, dans les courses vers l'horizon infini du Nigéria. Il la relate ici, visiblement ému et évoque la trace indélébile que l'Afrique a laissé sur lui. Il a eu la chance d'être loin du colonialisme , entouré par des villageois qui étaient son quotidien.
C'est un magnifique livre, court, trop?, intense, un cri de liberté, une tentative de compréhension d'un père trop dur .
Une très belle lecture.

Je finirai par cette magnifique citation , extraite du livre, qui me suivra longtemps:

Non, aucune Vierge à l'Enfant ne pourra égaler
Le tableau de la tendresse d'une mère
Envers ce fils qu'elle devra bientôt oublier.


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Le Clezio cherche son père ; il trouve une seconde mère : l'Afrique. Peut-être même la première…
Il y a bien des livres sur la quête du père. Celle-ci résonne des tambours et des chants qui s'élèvent sur les plaines du Nigéria Elle s'écorche sur les pistes sèches de la brousse. Elle est inondée de la lumière rouge d'un soleil chaud, omniprésent, mais jamais brûlant. Elle se nourrit de mille rencontres avec des femmes et des hommes aux accents de vérité. Elle remonte le long des routes du passé et se fait même histoire d'humanités : celles qui ont été ballotées, malmenées, écrasées par les enjeux de pouvoir, par ces petits esprits plein de soi et de déni des autres, cette toute petite humanité, tant par le nombre que, plus encore, par la bassesse de ses vues, cette frange des hommes qui arpenta l'Afrique comme un terrain de conquête et traita ses habitants comme des esclaves tout en vantant la fraternité, populations rabaissées, humiliées, arrachées à leur dignité, qu'ils disaient devoir maltraiter pour leur bien, quand seul le leur importait.
L'Africain ne se paie pas de mots. C'est un roman qui a la puissance des simples, des justes, de cette authenticité qui semble, de plus en plus, nous faire défaut. L'Africain c'est Le Clézio qui se fait fils de cette humanité qu'une partie des hommes a décidé d'assassiner.
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L'Africain est un roman autobiographique de le Clezio. L'auteur raconte son enfance au Nigéria. En 1948, il rejoint avec sa mère et son frère, son père resté en Afrique pendant la guerre. C'est à ce moment là qu'il fait connaissance avec son père.
Pour JMG et son frère, ce fut un choc. Jusque là, les deux frères pouvaient faire et avoir ce qu'ils voulaient grâce à un entourage permissif. Fini, les caprices.
Le père, médecin de brousse employé par l'Angleterre, est d'une grande rigueur. "Dès le premier contact, mon frère et moi, nous sommes mesurés à lui. Il nous a sévèrement battus". Il ne tolérait pas la moindre manifestation d'irrespect.
Bien plus tard, après la mort du père, Le Clezio reconnaît qu'il leur a transmis la part la plus difficile de l'éducation: l'autorité, la discipline, l'exactitude, le respect... Adulte, on a une autre vision de son père. A travers ce livre, on repense à sa propre relation avec son père.
En prenant connaissance du parcours de l'écrivain, on voit la grande influence du médecin de brousse anticolonialiste qu'était son père.
Cela me donne envie de lire le livre écrit par JMG, en hommage à sa mère.
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Le clézio revient sur la passé de son père, de sa famille... Ce père qui né à l'île Maurice et devenu médecin aura passé bon nombre d'années en Afrique dont il restera imprégné jusqu'à la fin de sa vie. Comment se pourrait-il en être autrement ? Sous la plume élégante de le Clézio, avec beaucoup de poésie, l'homme austère est évoqué autant que l'Afrique avec grand A, celle qui vous obsède et dot vos souvenirs ne peuvent se détacher. On sent mot après mot la nostalgie de ce continent détaillée à la manière d'un orfèvre.
C'est un grand roman de le Clézio. Un de ceux qui à mes yeux figurent au sommet de son oeuvre avec d'autres comme Désert ou Onitsha.
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J'aime les auteurs qui interrogent leur vie. Comprendre un père qui, à huit ans, l'âge où il le découvre, lui apparait comme un étranger c'est aussi tenter de percer le mystère de tout être humain en laissant le jugement aux portes de l'enfer.
Et ce père médecin est en effet pétri d'humanité malgré son rigorisme et sa rigidité. Il y a dans sa trajectoire la fierté, le refus de l'humiliation. Sans carte de visite, autrement dit sans argent et sans possibilité d'ouvrir un cabinet à Londres, il a préféré s'expatrier en Afrique plutôt que de se soumettre au conformisme et affronter le mépris de classe de la société anglaise. De l'injustice il avait été victime, et il ne pouvait que la reconnaitre dans les yeux de ses patients torturés par la pauvreté et les maladies ; il ne pourra pas non plus évacuer la responsabilité des Occidentaux dans ce drame de la misère qu'exacerbe la colonisation qui a engendré des laissés pour compte et distillé les germes de la corruption; sans oublier que la cupidité (mainmise sur le puits de pétrole) a provoqué un génocide et une famine sans précédent au Biafra. Et puis il y aura la guerre et lorsqu'il voudra rejoindre sa famille pour la protéger on l'arrêtera et on le condamnera à un exil forcé loin des siens dans une solitude nue pendant de longues années.
Alors se dessine un portrait haut en couleur d'un homme authentique désabusé, violent, parfois amer, qui pourtant a mis sa vie au service des autres avec une rare abnégation au point qu'il a épousé la cause de l'Afrique et que l'auteur le surnomme l'Africain.
Un magnifique récit émaillé de descriptions luxuriantes d'une nature encore vierge et sauvage vue par les yeux de l'auteur enfant qui y a vécu exempt des préjugés coloniaux.
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