Saviez-vous que
lullaby signifie berceuse en anglais?
Si vous aimez déambuler sans but, pour le plaisir, si l'art de ne rien faire ne signifie pas pour vous perdre son temps, si vous êtes capable de rester immobile des heures devant un paysage sans vous impatienter, alors vous pourrez comprendre ce livre.
Fille aux parents absents, dont le lycée semble le seul environnement,
Lullaby décide de se décadrer quelque temps. Elle se transforme en une sorte de coquille creuse qui se remplit de sensations. La plage est une sorte d'île déserte et enchantée (champs lexicaux de la piraterie et de la magie) où ne passent que de rares visiteurs: l'un amical (le garçon à lunettes), l'autre inquiétant (l'homme ) sorte de résurgence des contrebandiers...
Le début de l'escapade est insouciant: elle écrit des lettres à son père, se baigne, découvre la maison mystérieuse, se souvient. Une seconde partie nous conte les habitudes qu'elle prend, l'épanouissement des sensations qu'elle éprouve, seule sur la plage, livrée aux éléments. Mais l'irruption dans cet univers d'un jeune garçon, puis d'un inconnu qui lui fait peur, rappelle l'existence du monde extérieur. Lorsqu'elle revient, tout lui paraît incohérent, le lycée froid, les adultes hostiles; seul M Filippi, un professeur, peut-être capable de se souvenir de sa propre jeunesse, semble comprendre...
Ecrit en 1978 (
Lullaby porte un blouson marron, un pull de laine verte et un pantalon de velours brun...), ce livre fait très libération des perceptions, mais sans drogue, et nous emmène dans une parenthèse sans obligations (mais pas sans repères) paisible et féerique (la berceuse d'Ariel).
Les dessins de Georges Lemoine, fins, épurés et aériens, correspondent merveilleusement bien à l'ambiance du texte.
Un très beau livre, dans lequel on peut sentir la chaleur du soleil, entendre le vent, goûter le sel des embruns... et savourer un instant de solitude choisie.