AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Voyage à Rodrigues (117)

La mer profonde, violente, d'un bleu sombre au-delà des barrières de corail, aux vagues hautes comme des collines mouvantes que frangent les nuages d'embruns. La mer lourde et lisse des journées qui précèdent l'ouragan, sombre sous le ciel chargé de nuages, quand l'horizon est trouble et fume pareil au bord d'une cataracte. La mer presque jaune du crépuscule, en été, nappe d'huile sur laquelle passe des frissons, en cercles brefs, où s'allument les étincelles du soleil, sans aucune terre qui ferme l'espace. La mer comme le ciel, libre, immense, vide d'hommes et d'oiseaux, loin des continents, loin des souillures des fleuves, avec seulement, parfois, au hasard, des poignées d'îles jetées, si petites, si fragiles qu'il semble qu'une vague pourrait les submerger, les effacer à jamais. La mer, le seul lieu du monde où l'on puisse être loin, entouré de ses propres rêves, à la fois perdu et proche de soi-même.
Commenter  J’apprécie          71
Aller à la recherche de ces mers et des îles où passèrent autrefois les navires, parcourir l'immense champ de bataille où s'affrontèrent les armées et les hors-la-loi, c'était prendre sa part du rêve de l'Eldorado, chercher à partager, près de deux siècles plus tard, l'ivresse de cette histoire unique : quand les terres, les mers, les archipels n'avaient pas encore été enfermés dans leurs frontières, que les hommes étaient libres et cruels comme les oiseaux de la mer, et que les légendes semblaient encore ouvertes sur l'infini.
Commenter  J’apprécie          50
Maintenant je le sais bien. On ne partage pas les rêves.
Commenter  J’apprécie          70
Les oiseaux ne meurent pas, sauf quand les hommes les engluent dans leurs pièges. Ils vivent entre le ciel et la mer, puis un jour ils disparaissent, avalés par l'espace, sans qu'on sache où ils se sont enfuis.
Commenter  J’apprécie          40
Le chercheur de chimères laisse son ombre après lui.
Commenter  J’apprécie          20
Sans ces tracés de lignes, mesures d'angles, repérages, axes est-ouest, calculs méticuleux des points, est-ce que cette terre aurait existé, est-ce qu'elle aurait eu une signification, est-ce qu'elle aurait pris forme sous ses yeux, je veux dire, non plus comme n'importe quel point indifférencié de la planète, mais comme cette "Anse aux Anglais" choisie par le Privateer pour y cacher son or et ses diamants, c'est-à-dire l'un des lieux les plus puissants et les plus secrets du monde ? Ainsi faisaient les premiers hommes, lorsqu'ils donnaient leurs nom aux endroits de la terre, montagnes, rivières, marécages, forêts, plaines d'herbes ou de cailloux, pour les créer en même temps qu'ils les nommaient.
Commenter  J’apprécie          10
Dans la vallée, on entend le bruit de la mer, le vent, les cris des enfants au loin, de l'autre côté des plantations de cocos. On voit le ciel, les nuages, on est libre de penser à autre chose, d'oublier. Mais ici, l'on est enfermé dans sa propre folie, tourné vers la pierre, vers le stérile, l'infranchissable. Le soleil brûle, le vent fait glisser la poussière ocre et noire vers le fond des crevasses, les herbes sèches sont une toison morte. À l'entrée du ravin, chaque fois que je me suis approché de cette faille, j'ai ressenti un frisson, cette sorte d'instinctive répulsion que me donnent les grottes. Ce n'est qu'en retrouvant les traces de l'homme qui est venu ici avant moi, en découvrant les signes qu'il a laissés, ces signes de souffrance, d'espoir, d'illusion, que je peux accepter d'entrer dans le ravin. Il me semble que je touche alors au coeur même de cette légende, au lieu le plus chargé de sens et de mystère. Il me semble qu'ici chaque parcelle de terre et de roche, chaque relief du sol, chaque blessure sur les parois de pierre ont une signification qui résonne au fond de moi. Il me semble que je suis enfin parvenu tout près de celui que je cherche, si près que j'entends le son de sa voix, le bruit de ses pas, que je sens son regard, son souffle. Dans cette tranchée vide, quand le soleil de l'après-midi brûle mon dos et fait briller mon ombre sur le fond du ravin, jusqu'au cercle noir du puits comblé, peut-être qu'enfin je ne fais qu'un avec mon grand-père, et que nous sommes unis non par le sang ni par la mémoire, mais comme deux hommes qui auraient la même ombre.
Commenter  J’apprécie          70
La mer, le seul lieu du monde où l'on puisse être loin, entouré de ses rêves, à la fois perdu et proche de soi-même. C'est cela , j'imagine, que cherchait mon grand-père, quand il a pris la mer pour la première fois (vers 1901 ou 1902) pour aller à Rodrigues sur la goélette Segunder, commandée par le capitaine Bradmer.
Commenter  J’apprécie          30
Les oiseaux ne meurent pas, sauf quand les hommes les engluent dans leurs pièges. Ils vivent entre le ciel et la mer, puis un jour ils disparaissent, avalés par l'espace, sans qu'on sache où ils se sont enfuis.
Commenter  J’apprécie          160
Au fond de cette vallée, où tout semble si abandonné, si désert, semblable à une planète morte, ce ne sont pas la mémoire ni les désirs des visiteurs passagers qui comptent, mais au contraire tout ce qui est resté intact loin des hommes, cette braise qui palpite encore.
Commenter  J’apprécie          90






    Lecteurs (238) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Voyage au pays des arbres

    Quel est le personnage principal ?

    Jules
    Pierre
    Mathis

    3 questions
    8 lecteurs ont répondu
    Thème : Voyage au pays des arbres de J.M.G. Le ClézioCréer un quiz sur ce livre

    {* *}