Citations sur Marx & Sherlock Holmes (16)
La différence entre les criminels et les innocents n'est pas dans la conception, mais dans le pouvoir et la force de transformation d'une pensée en acte.
Quand on s'est engagé tête baissée dans la voie sans issue de l'imbécillité et de l'aveuglement, quand on a accompli des efforts répétés pour s'aliéner toute capacité de réflexion et de déduction, il est difficile de faire marche arrière.
Continuant à m’examiner, il fronça les sourcils et me dit, sur le ton d’un professeur prêt à coller un cancre :
— Que savez-vous de l’Association internationale des Travailleurs ?
Sur l’instant, je ne sus que répondre. Ce nom soulevait bien de vagues échos, mais du diable si je pouvais en dire ne fût-ce que quelques mots.
Marx, au lieu de se fâcher, comme l’eût fait un professeur, se remit à rire, mais plus doucement.
— Vous autres Britanniques, êtes incroyables ! Vous donnez asile, sans presque y penser, à la tête d’une organisation qui fait trembler, à tort ou à raison, tous les bourgeois et les gouvernements du continent, et vous ne connaissez même pas son existence !
A cinquante ans passés, je possède tout ce qu’un homme peut souhaiter avoir : une solide et fidèle amitié, le respect et l’estime de quelques personnes intelligentes, peu nombreuses il est vrai. Quant à mes ennemis — eux sont légion — je peux me flatter d’inspirer une peur salutaire, et même de la terreur, à quelques centaines de canailles, aussi bien à Londres et en Angleterre que sur le continent. Pour compléter mon autoportrait, passons aux plus notables défauts : un tempérament parfois coléreux, et la pratique de deux vices, assez inoffensifs, mais qui ont une particularité amusante : l’un augmente dans des proportions inquiétantes la tension de mon ami (il s’inquiète, à tort, pour ma santé), et l’autre m’attire les foudres des locataires de l’immeuble, brutes imperméables à la beauté de la musique.
Mais à vingt ans et quelques, même si l’on a choisi de devenir un pilier de la justice et le plus grand ennemi des bandits, on ne fait pas le difficile devant une des premières affaires qui se présentent à vous.
La proverbiale tolérance du sujet britannique n’était pas tout à fait exempte d’une certaine exaspération à la vue de ce fourmillement et de ces convulsions de haines continentales. Ajoutons que la guerre franco-prussienne n’avait fait que multiplier le contingent habituel d’agités par deux ou trois, ainsi que la frénésie de leurs comportements.
Allemands, Français, Russes, Hongrois, Polonais... Londres, seule capitale démocratique du Vieux Monde, était — est encore plus que jamais — remplie d’une foule bigarrée et cosmopolite de réfugiés, de comploteurs, d’anarchistes de tous bords, doublé chacun par au moins un espion à la solde du gouvernement qu’ils combattaient
Je confesse que ce nom ne sonna aucune cloche dans ma tête. La même lettre aurait-elle été signée Friedrich Von Kekulé, ou Archibald Scott Couper, mon cœur de jeune chimiste se fut sans doute arrêté de battre. J’étais bien plus versé — je le suis toujours — en chimie qu’en politique. Ce nom, Karl Marx, évoquait une origine continentale, probablement allemande et juive.
Cher Monsieur,
Une connaissance commune m’a dit le plus grand bien de vous. Malgré votre jeunesse, il n’est de mystère complexe que vous ne puissiez débrouiller. Voilà encore ce qu’on m’affirme.
Pourriez-vous m’accorder quelques instants, le 13 au soir, afin que je vous dise ce qui me préoccupe (souligné).
Bien à vous
Karl Marx.
— Merci pour votre geste. Je crois pouvoir en conclure que vous acceptez.
— Excusez-moi, mais je ne saisis pas très bien. Accepter quoi ?
S’il fut déçu par mon manque de rapidité d’esprit, Marx n’en montra rien.
— Accepter de me défendre contre cet individu qui veut m’éliminer. Vous comprendrez aisément que la police officielle est à peu près désarmée devant une telle entreprise. Tout au plus pourrait-elle me faire accompagner par quelques balourds qui se feront, avec la conscience qui caractérise la police anglaise, tuer pour moi, avant que j’y passe à mon tour. Sans compter que je deviendrai la risée de mes amis, s’ils apprennent que la police me protège.