Katia est partagée entre le bien-être que lui offre l’endroit- elle ne s’est jamais sentie aussi à l’aise de sa vie, c’est peu de le dire- et la peur sourde que lui procurent ces hallucinations. La terreur de ne plus se contrôler, d’être à la merci de son imagination et de perdre pied.
"Ils ne t’apparaissent pas par hasard, ça ne fonctionne pas comme ça. Ils apparaissent parce que tu peux les voir. Ils sont attirés vers toi particulièrement, parce que tu agis comme un aimant. Tu as une certaine aptitude que la plupart des gens n’ont pas, et ces esprits le sentent. Ils parlent à travers toi." (Dixit Caroline Grunwald)
Dans le cas des fantômes, c’est différent. Ils ont quelque chose à exprimer, ils sont réels dans le temps présent, ils traversent les âges. Ce sont des êtres à part entières, généralement tués de façon violente ou inattendue. Des êtres dont la vie a été retirée trop tôt, et qui cherchent le sens de cette mort. (Dixit Caroline Grunwald)
Chaque lieu garde en lui la mémoire des événements tragiques qui s’y sont déroulés.
Katia la fixe. Ses yeux sont l'unique partie de visage émergent de son épaisse écharpe. , admire recouvert des courte mèche noire lui tombe de la capuche. Laura ne peut déchiffrer sa tristesse. Katia se lève, lui tourne le dos. Par reflex, Laura lui emboîte le pas et la retient par l'épaule. Pas réflexe. Comme toujours. Katia fait un bond sur le côté et cri de surprise. Repousse sa mère en arrière d'un geste brutal, instinctif. Primal. Laura on a le souffle coupé.
Elle s’empare du crayon gras fixé au carnet avec une cordelette élastique. Les canards escaladent la rive, trois d’entre eux couinent à moins de deux mètres d’elle. Elle trouve une page blanche et immortalise la scène par des traits élancés, jouant sur l’épaisseur, noircissant le grain du papier, croisant les lignes. Le croquis devient dessin, les formes deviennent oiseaux, rivière. Elle frotte la mine en biais, imprime du relief aux ailes, varie la densité du coloriage monochrome. Les secondes se gonflent en minutes, elle ne ressent plus le froid raidir ses articulations. Elle n’entend même plus le clapotis de l’eau contre les piliers du pont.
À VUE D'ŒIL fait une sélection soignée de livres parmi le meilleur de l'actualité littéraire en corps 16 ou 20, afin que les amoureux de la lecture, qui souffrent de malvoyance, puissent renouer avec le plaisir de lire.
La forme vaporeuse du spectre se fond dans l’obscurité de la pièce, faisant corps avec les ténèbres. Seule Katia a conscience de sa présence. Les autres ne la voient pas, elles.
page 111
La vieille ferme commence à délivrer ses secrets à Katia, les événements dissimulés par les années, oubliés ou tus, qui demeurent gravés dans la mémoire du lieu. Des images volatiles, que seul un esprit sensible aux flux invisibles peut capturer.
page 174
Qui sait où ils partent quand ils sont comme ça ? Honnêtement je crois qu’ils sont juste « déconnectés ». Elle n’est pas dans le coma ta grand-mère, elle est seulement absente. Comme si son esprit était dans un autre monde. Je ne pense pas qu’elle perçoive ce qui se passe dans ce monde-ci…