Les proto-khmer du Cambodge

Ouvrage acheté au Book Center de Phnom Pehn, sans mention claire d'édition on devine que Michel Tranet en est l'éditeur scientifique et commercial. Je n'ai pas encore trouvé beaucoup d'informations sur Michel Tranet ; il a collaboré à la revue Péninsule, je suppose qu'il est d'une manière ou une autre rattaché à l'EFEO. Contrairement à ce que laisse penser son nom, il est certainement Cambodgien ; il a occupé des fonctions au ministère de la culture du royaume. Son nom est cité dans la presse cambodgienne (contentieux Thaï/Khmer sur le temple Preah Vihear). Michel Tranet a beaucoup travaillé sur les peuples qui occupaient la péninsule indochinoise avant l'expansion de l'empire Khmer. A ce titre, les observations des premiers ethnographes et missionnaires européens constituent une source précieuses de données scientifiques ; elles apportent des éléments de descriptions d'ethnie aujourd'hui disparues ou quasi disparues.
Le titre général du livre "Les Proto-khmer du Cambodge" n'est donc pas de Adhémard Leclère. L'ouvrage contient trois textes:

- Visite au Peunongs Tamoeul (un texte plutôt journalistique et anecdotique)
- Les Pnong : Peuple sauvage de l'Indo-chine : une étude systématique de ce peuple que l'administrateur colonial a souvent fréquenté et étudié.
- Les Sâauch, une étude sur une ethnie qui était alors en voie de disparition. Adhémard Leclère relate ses propres observations, les informations qu'il a tirée de la fréquentation du chef de ce peuple et il cite la relation plus ancienne d'un missionnaire (le père Gagelin).
Ces documents contiennent des informations linguistiques qui peuvent être utiles aux comparatistes qui voudraient reconstituer l'histoire des populations d'où a émergé le monde khmer.
D'où cette édition cambodgienne de ces textes ethnographiques de Adhémard Leclère qui fut administrateur colonial au Cambodge durant une vingtaine d'années. Cette édition contient de nombreuses coquilles et mots oubliés; on soupçonne une conversion par ORC des pdf de la BNF mal corrigés. On ne trouve pas non plus de référencement clair des sources. Michel Tranet n'a sans doute pas eu accès aux originaux qui se trouvent à Alençon. Un sérieux travail d'édition reste à entreprendre.
Malgré cela les documents présentés sont passionnants. Ils consistent en la description des ethnies Pnong et Sâauch (mais aussi par incidence, les chong auxquels Adhémard Leclère rattache les Sâauch qu'il considère comme une branche dérivée).
Adhémard Leclère distingue ces ethnies des khmers. Michel Tranet, peut être suite aux travaux de Georges Coedès, considère ces peuples comme des cousins des khmers (proto-khmers, les khmers d'avant les khmers); Adhémard Leclère abusé pas des différences physiques aurait négligé les nombreuses caractéristiques linguistiques communes qu'il n'ignorait pas pourtant. Pnong, Sâauch et Chong sont les descendants non hindouisés des proto-khmer dont seuls ceux qui habitaient le plaines ont subi l'influence religieuse et politique de l'inde brahmanique. Les proto-khmers des montagnes sont restés à l'écart de ces mutations culturelles ; les Pnong, Sâauch et Chong que Adhémard Leclère a pu observer et décrire durant la seconde moitié du XIXe siècle en étaient les descendants. Dans le dernier texte sur les Sâauch, Adhémard Leclère cite longuement la relation du Père Gagelin, premier observateur de ce peuple dont l'histoire est tragique (extrait d'une lettre du 27 juillet 1830) .