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Critique de DelleCL


Je referme ce livre et reprends mon souffle après avoir respiré au rythme saccadé de la voix de Marceline Loridan-Ivens.

On arrive dans la nuit est le témoignage qu'elle a donné en 2005, dans le cadre de la campagne menée par l'INA visant à recueillir des Mémoires de la Shoah.
Marceline. cette tornade rousse emportée par l'apocalypse hitlérien, raconte, se raconte. Son expérience de la déportation et l'après.
En murmurant ses mots pendant ma lecture, c'est sa voix rocailleuse qui a résonné à mes oreilles.
Je ne suis pas très objective lorsqu'il est question d'évoquer l'auteur, qui m'a touchée au plus haut point avec Et tu n'es pas revenu, et aussi L'Amour Après, où elle évoque dans le premier la mort de son père à Auschwitz et sa conception de l'amour après son retour à la vie dans le second.

Dans cet entretien, ces thématiques sont longuement abordées de manière tout aussi fulgurante : déportée à Auschwitz avec son père, elle seule en reviendra. Et toute sa vie, une phrase de son père ne la quittera pas : « toi tu reviendras peut être, mais moi, je ne reviendra pas. Elle évoque cette culpabilité du survivant et son difficile (impossible ?) retour à la vie normale, marquée par des combats politiques et un refus sans appel de maternité.

Et elle nous entraine avec elle, au coeur de l'intime, et de l'indicible, comme cette douleur qu'elle partage avec nous, de ne pas se souvenir du dernier billet de son père… Elle raconte son périple, se confie sur la manière dont la déportation l'a marquée, ses engagements politiques et ses réflexes de « voyou » qu'elle livre sans fards, qui me font sourire tout en m'étreignant à la gorge. Elle déroule le fil de sa vie, et au fil des pages, j'admire son intelligence vive, sa résilience et sa verve.

Mais parfois, ce minuscule bout de femme irrévérencieuse, qui chantait « Général, nous voilà » , qui répétait comme un mantra « Tant qu'on est pas devant la chambre à gaz, ca gaze », et qui a accueilli Dominique Missika qui venait l'interviewer pour l'INA en 2005 par un tonitruant « Vous n'avez pas de vodka et de hareng ? Et même pas du saucisson ? Et alors, à quoi vous pensez ? » avant d'éclater de rire, ce minuscule bout de femme est parfois à court de mots ou cherche les bons. Comme lorsqu'elle raconte la cruauté dans les camps ou lorsqu'elle avoue ne jamais en être complètement revenue. Ses mots se suspendent, j'imagine sa voix hésiter, et ma gorge se serre.

Un livre fort et poignant pour ne pas oublier.
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