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EAN : 9782080439673
256 pages
Flammarion (17/01/2024)
4.29/5   17 notes
Résumé :
"Oui, nous avons souffert collectivement. Oui, nous avons vécu des choses horribles collectivement. Mais chaque homme est une personne unique, chaque femme a ses propres souvenirs. C'est l'ensemble de tous ces souvenirs qui fait l'Histoire."

Elle était une adolescente rebelle, frondeuse. Un soir de février 1944, elle est arrêtée avec son père, dans leur maison du Vaucluse, puis déportée à Birkenau. Arrivée par le même convoi que Simone Veil, dont ell... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Je referme ce livre et reprends mon souffle après avoir respiré au rythme saccadé de la voix de Marceline Loridan-Ivens.

On arrive dans la nuit est le témoignage qu'elle a donné en 2005, dans le cadre de la campagne menée par l'INA visant à recueillir des Mémoires de la Shoah.
Marceline. cette tornade rousse emportée par l'apocalypse hitlérien, raconte, se raconte. Son expérience de la déportation et l'après.
En murmurant ses mots pendant ma lecture, c'est sa voix rocailleuse qui a résonné à mes oreilles.
Je ne suis pas très objective lorsqu'il est question d'évoquer l'auteur, qui m'a touchée au plus haut point avec Et tu n'es pas revenu, et aussi L'Amour Après, où elle évoque dans le premier la mort de son père à Auschwitz et sa conception de l'amour après son retour à la vie dans le second.

Dans cet entretien, ces thématiques sont longuement abordées de manière tout aussi fulgurante : déportée à Auschwitz avec son père, elle seule en reviendra. Et toute sa vie, une phrase de son père ne la quittera pas : « toi tu reviendras peut être, mais moi, je ne reviendra pas. Elle évoque cette culpabilité du survivant et son difficile (impossible ?) retour à la vie normale, marquée par des combats politiques et un refus sans appel de maternité.

Et elle nous entraine avec elle, au coeur de l'intime, et de l'indicible, comme cette douleur qu'elle partage avec nous, de ne pas se souvenir du dernier billet de son père… Elle raconte son périple, se confie sur la manière dont la déportation l'a marquée, ses engagements politiques et ses réflexes de « voyou » qu'elle livre sans fards, qui me font sourire tout en m'étreignant à la gorge. Elle déroule le fil de sa vie, et au fil des pages, j'admire son intelligence vive, sa résilience et sa verve.

Mais parfois, ce minuscule bout de femme irrévérencieuse, qui chantait « Général, nous voilà » , qui répétait comme un mantra « Tant qu'on est pas devant la chambre à gaz, ca gaze », et qui a accueilli Dominique Missika qui venait l'interviewer pour l'INA en 2005 par un tonitruant « Vous n'avez pas de vodka et de hareng ? Et même pas du saucisson ? Et alors, à quoi vous pensez ? » avant d'éclater de rire, ce minuscule bout de femme est parfois à court de mots ou cherche les bons. Comme lorsqu'elle raconte la cruauté dans les camps ou lorsqu'elle avoue ne jamais en être complètement revenue. Ses mots se suspendent, j'imagine sa voix hésiter, et ma gorge se serre.

Un livre fort et poignant pour ne pas oublier.
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Un témoignage essentiel.

Marceline Loridan-Ivens raconte ses souvenirs comme ils lui viennent, sans langue de bois, sans fioritures et sans tenter d'en amoindrir la gravité, ni l'horreur de ce qu'elle a vécu et traversé. Elle parle avec sincérité, s'exprime avec émotion, cherche ses mots parfois, use d'ironie aussi. Elle a l'esprit rebelle et de l'audace, depuis toute petite, ce bout de femme ne se laisse pas faire. Et bien qu'elle soit meurtrie, marquée à jamais, elle avance, elle continue d'avancer car après tout : “Tant qu'on est pas devant la chambre à gaz, ca gaze”. Et ce mantra la suivra toute sa vie.

Elle va nous conter son enfance, ses parents, puis son arrestation avec son père, et la prison, et la déportation, et les camps. Et l'après. le décalage entre ceux qui reviennent et ceux qui découvrent l'ampleur et l'horreur des camps de concentration. Cette incompréhension qui creuse des fossés. Il faudra parler, au nom de tous ceux qui y sont restés, mais aussi se heurter à tous ceux qui ne veulent pas y croire. Son oncle le lui dira d'ailleurs quand elle descendra du train pour rentrer chez elle : “ne parle pas, ils ne te croiront pas”.

Mais chez elle, ce n'est plus chez elle. Sans son père, sa famille n'en est plus une. Tout est brisé et elle porte cette culpabilité qui ne la lâchera plus. Ce syndrôme de l'imposteur.

Tout le long du récit, j'avais l'impression d'être assise en face d'elle, à l'écouter, captiver par sa voix qui nous entraîne dans les heures sombres de l'Histoire, de son histoire. C'est important de savoir. Important d'avoir accès à ce genre de témoignages.

Tout de cet entretien est retranscrit à la lettre près, avec exactitude, avec empathie. Un témoignage historique indispensable pour les générations passées et à venir.

Un grand merci à Babelio et aux éditions Flammarion pour l'envoi de cet ouvrage !

Challenge Multi-Défis 2024
Masse Critique Babelio Février 2024 - Non-Fiction
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Dans cet entretien menée par Antoine Vitkine, Marceline Loridan-Ivens se raconte avec les moments heureux de sa vie, les horreurs vécues, la reconstruction très difficile, les moments de détresse et de découragement mais quelle force mentale malgré toutes les épreuves.
Une vie bouleversée comme beaucoup durant la seconde guerre mondiale et une histoire que chacun d'entre nous doit connaître parmi les destins qui doivent restés gravés dans notre inconscient collectif. Femme de parole, de justice et de conviction qui a toujours combattu le racisme, l'antisémitisme, l'arbitraire, la violence physique et morale par les moyens de communication suivants : l'écriture, la parole, la réalisation de films pour des causes dépassant nos frontières. Livre à mettre entre toutes les mains y compris au collège et au lycée.
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Je continue avec ce livre de lire les témoignages recueillis par l'Ina pour les mémoires de la shoah.

Ici la narratrice est Marceline Loridan-Ivens.
Elle sera dans plusieurs camps , dans un premier temps avec son père puis seule .
Elle nous raconte la survie dans les camps, ses amitiés, ses combines pour survivre.
Elle dira souvent une phrase que je trouve tres forte émotionnellement

«  tant qu'on est pas devant la chambre a gaz , ca gaze »

Marceline est revenue de ces camps.
Elle s'engagera un peu en politique , mais elle fera connaitre son histoire de films .
Pour elle témoigner est important.

D'ailleurs a son retour des camps elle sera confronte a ceux , sa famille notamment, qui n'ont pas connus les camps et qui ne souhaitent pas que ce sujet soit aborde.

Pour ma part j'aime lire ses témoignages j'en lis un ou deux par an et je les trouve nécessaires pour notre devoir de mémoire.

Encore un témoignage d'Histoire qui devrait être lu dans chaque classe.
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Flammarion/Ina publie le témoignage de Marceline Loridan-Ivens, rescapée de Birkenau et morte en 2018. L'entretien a été réalisé par Antoine Vitkine dans le cadre de la collection "Mémoires de la Shoah" à l'initiative du Mémorial de la Shoah et de l'institut national de l'audiovisuel. Des survivants de l'Holocauste ont été interrogés et filmés. Parmi eux, on trouve aussi le témoignage de Simone Veil (publié en 2023).
Marceline, connue pour son franc-parler et sa rage de vivre, raconte toute sa vie, de sa naissance à 2005, année de l'entretien. Elle dit comment elle a été amenée à Drancy, déportée à Auschwitz-Birkenau avec son père dont elle a été séparé à l'arrivée (et qu'elle ne reverra jamais en dehors d'une promenade où elle le croise par hasard et où elle est violemment battue pour lui avoir parlé).
Les conditions horribles dans le camp de Birkenau, le travail forcé, la faim, la souffrance sont dits dans ce témoignage non littéraire, à vocation documentaire. On y lit l'audace et le courage de cette femme, à l'esprit rebelle dès son plus jeune âge.
L'une de ses phrases revient plusieurs fois, une manière pour elle de tenir et de résister :

"Tant qu'on est pas devant la chambre à gaz, ça gaze."

Quand elle est transférée fin 1944 à Bergen-Belsen, c'est presque un soulagement pour elle car il n'y a pas de chambres à gaz ni de crématoires, malgré le manque de nourriture et les maladies.
Parmi toutes les informations qu'elle donne sur le quotidien dans les camps, on peut par exemple retenir l'histoire de Mala, une jeune juive qui avait réussi à s'enfuir de Birkenau avec son amant, mais qui a été rattrapée par les nazis. Condamnée à des jours de "Bunker" (prison minuscule où on ne peut ni s'asseoir, ni se mettre debout, ni se coucher), elle est ensuite traînée sur la place du camp pour y être exécutée. Mais elle parvient à s'ouvrir les veines et à crier des paroles d'espoir aux autres détenues, en dépit de la torture et de ce qu'elle risque de subir encore. Les pires rumeurs courent sur ce qu'elle est devenue après cet acte, dont l'une dit qu'elle aurait été jetée vivante dans le four crématoire. Marceline raconte son histoire car c'est un exemple de courage.

On voit combien l'horreur de la déportation a marqué sa famille, puisque l'un de ses frères et l'une de ses soeurs se sont suicidés après la guerre. Marceline, qui fait partie des filles de Birkenau (avec Ginette Kolinka, qu'elle évoque à peine, et Simone Veil), parle aussi de son retour en France après la guerre, de ses deux maris et de ses engagements. Elle explique qu'elle n'a jamais voulu avoir d'enfants car elle en a trop vu mourir ; persuadée que tout allait recommencer dans vingt ans, elle ne voulait pas avoir un corps qui l'aurait conduite directement à la chambre à gaz.
Le livre se termine sur quelques photographies et un commentaire de son film La petite prairie aux bouleaux, un film documentaire sur son internement à Birkenau.
Lien : https://lemanoirdeslettres.f..
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critiques presse (2)
OuestFrance
18 mars 2024
Dans son récit « On arrive la nuit », la réalisatrice rescapée des camps de la mort offre un magnifique témoignage d'espérance.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
LesInrocks
01 février 2024
Trois ans après sa disparition, Flammarion publie On arrive dans la nuit, transcription d?'un témoignage donné par la réalisatrice et écrivaine à l'INA
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Etre avec mon père, c'était très important. Je ne suis dit : "Quelle chance, c'est moi qui pars avec lui." Je pense que ça a été très, très dur pour mes frères et soeurs, par pour tous parce que tout le monde ne se ressemble pas dans la famille. Mais j'ai toujours pensé que ce n'était pas moi qui aurais dû rentrer. Jamais mon frère et ma soeur ne se seraient suicidés si je n'étais pas rentrée. Une soeur, on en a d'autres, mais un père... Un père qui tient toute sa famille, on n'en a qu'un, vous savez... (elle est bouleversée). C'est ce qui me touche le plus, ce qui me fait le plus de mal, même aujourd'hui. Après tant d'années, plus de quarante-cinq personnes de ma famille mortes en Pologne, tout le monde, on n'a pas de famille, on n'est que des petites familles.
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La chose dont je me souviens à l'hôtel Lutetia, c'est les dizaines et les centaines de gens dehors, devant la porte, qui forment un passage pour les déportés. Ils nous montrent des photos et nous disent : " Vous n'avez pas rencontré ma mère avec ses trois enfants ? Vous n'avez pas rencontré mon père ? " Nous, on n'a rencontré personne. Et moi, je suis... nous sommes toutes très dures. On a la même dureté que les déportés qui nous ont reçu quand on est arrivés à Birkenau. On dit : "Ah oui ? Déportée avec trois enfants ? Ils sont tous morts. Ils sont passés au gaz. " La seule chose que je me souviens avoir dite, c'est : " Ils sont tous passés au gaz. Il n'y a plus personne. Personne ne reviendra. Des enfants, vous dites ? Des enfants ? Non. Pas d'enfants, aucun enfant ne reviendra. "
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On me demande à quel moment j'ai fait le deuil de mon père, à quel moment j'ai compris qu'il était mort. Mais moi, j'ai jamais fait le deuil de mon père. Comment voulez-vous que je fasse un deuil ? Je sais pas où il est. Je sais pas où il est mort. Je ne sais rien. C'est impossible de faire ce deuil. C'est le deuil impossible. C'est le deuil qui me marquera toute ma vie, qui me fera faire aussi un certain nombre de choix et qui conduira à la mort de mon petit frère et de ma soeur aînée, qui se suicideront quelques années plus tard. J'ai tenté de me suicider. Oui, bien sûr. Bien sûr. Je n'y suis pas arrivée. La force de vie était plus grande en moi, sans doute.
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Je n'ai jamais quitté le camp. Je n'ai jamais fonctionné dans la vie autrement que comme j'étais dans un camp. (...) Toutes mes références se rapportaient au camp. Toujours.
p147
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Une fois, il y a eu un allemand qui a voulu être gentil avec moi, parce que j'étais petite sûrement, il a voulu me faire plaisir, alors il a m'a dit : " Dans le tiroir, là-bas, fais attention, il y a quelque chose pour toi." Et quand j'y suis allée, c'était un cornet d'épluchures de pommes de terre que j'ai partagé avec Marie.
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Videos de Marceline Loridan-Ivens (32) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marceline Loridan-Ivens
Rencontre avec Frédérique BerthetFrédérique Berthet a publié en 2018 aux éditions P.O.L La Voix manquante – texte qui retrace l'apparition fugitive et inoubliable de Marceline Loridan dans Chronique d'un été de Jean Rouch et Edgar Morin. Ce film de « cinéma-vérité » évoque les souvenirs poignants de la déportation de Marceline. La Voix manquante raconte les coulisses de ces images. Frédérique Berthet a reçu pour La Voix manquante le Prix du livre de cinéma 2018 décerné par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).Rencontre animée par Alexia Vanhee
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