AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de sylvieboop24


ON SE SOUVIENT DU NOM DES ASSASSINS – de Dominique MAISONSEditions de la Martinière - Lu en version « Points Thriller »



Ce roman est le second de Dominique que je lis. le précédent était « Le Festin des Fauves » pour lequel j'ai eu un gros coup de coeur.
C'est donc avec impatience que j'attendais la version poche de celui-ci qui me faisait de l'oeil depuis sa sortie en grand format.


L'histoire :

1909 –
Max Rochefort, feuilletoniste à succès travaille pour le journal « le Matin ». C'est grâce à lui que le quotidien connaît une expansion. Max c'est aussi un Dandy, un oiseau de nuit qui éclaire la vie Parisienne de sa présence et qui côtoie les grands noms de l'époque : Arthème Fayard (célèbre éditeur dont la pingrerie est légendaire), Gaston Leroux (avocat, chroniqueur judiciaire, journaliste et écrivain), et tant d'autres célébrités…

Le Directeur du Matin va confier à Giovani Riva, jeune employé au journal, une double tâche : devenir le secrétaire particulier de Max, et l'épier pour éviter qu'il ne cède aux sirènes de la concurrence qui le sollicitent constamment. le Matin ne peut pas se passer du talent de Max ! Giovanni est issu de la communauté Italienne de Belleville et fait la fierté de son quartier.
Autant dire qu'un monde sépare ces deux hommes.

Max vit dans l'appartement de sa mère défunte, à proximité du « boulevard du Crime » le bien nommé. Lieu où sa mère, actrice célèbre, avait vécu mille morts sur les planches. Ce nom lui est tellement précieux que c'est ainsi que se nomme son roman feuilleton « Boulevard du Crime » dédié à son commissaire Nocturnax. Son père, baron d'industrie fortuné ne l'a jamais reconnu. Et Max a aujourd'hui la reconnaissance dont il avait tant rêvée enfant.
Giovani découvre cet appartement tenu d'une main de fer par Marguerite, la gouvernante des lieux, au caractère aussi prononcé que son accent, mais qui arrive à faire fondre de plaisir les gourmands avec ses madeleines d'exception et ses bons petits plats.
Giovanni, ébahi, apprend que Max n'écrit plus depuis longtemps ses feuilletons. Il donne des directives sur un grand tableau noir à une équipe efficace : Georges pour la documentation, Oscar le rédacteur hors pair et Victor le brillant grammairien et linguiste.

Max est un visionnaire :
Extrait P.24 : « Vous voyez, Giovanni, il est là notre ennemi : le spectacle est partout. de plus en plus de moyens sont mis à disposition de l'homme pour le distraire. le gramophone, le cinématographe, les illustrés, les cabarets…
Il pointa une colonne Morris annonçant la reprise des soirées dansantes au Bal Tabarin et ajouta :
Tout est fait pour détourner le public de la littérature. Si on veut rester au centre de leurs intérêts, il faut aller vers eux, être partout, être l'événement ! Je vous le prédis, mon ami, bientôt les gens seront célèbres parce qu'ils seront célèbres, on oubliera pourquoi ils l'étaient initialement. »

Puis Max, en Dandy qui se respecte prend soin de sa personne. Pour la forme il fait du Tai-Chi-Chuan chaque jour. Pour son apparence, ses costumes faits sur mesure viennent de chez Paul Poiret. Sa vie est faite de 1ères à l'Opéra, de courses automobiles, de voyages en 1ère, de dîners fins chez Escoffier. Bien loin de la misère de Belleville d'où vient Giovanni. Bien loin de la misère que subissent les plus défavorisés qui luttent au quotidien contre la faim et la maladie et se terrent dans les sous-sols parisiens.

Giovanni va suivre Max partout et noter toutes ses idées qui serviront aux prochaines aventures de Nocturax. Pour simplifier sa fonction Max le loge dans une chambre de service. Et voici notre Italien qui souffle un peu, loin de la pression de sa mère italienne. C'est qu'il est en âge de se marier et que sa mère, opiniâtre, ne cesse de lui présenter de jeunes italiennes célibataires.

Contre toute attente, entre Max et Giovanni, une complicité et une amitié vont naitre.
Et voilà les deux compères qui filent, dans la Bugatti Hermès Type 7 de Max vers Enghien et ses bains afin de faire une cure.
Une soirée festive à l'hôtel où le champagne coule à flots, et où se côtoient des députés, des actrices, même un cardinal, émissaire du Vatican, venu rencontrer Aristide Briand. Il faut dire que depuis la séparation de l'église et de l'état en 1905, les relations entre la France et le Vatican sont tendues. Des pourparlers sont en cours pour tenter d'apaiser la situation.
Giovanni n'écoute que d'une oreille distraite toutes les explications que Max lui délivre lors de cette soirée. C'est qu'il a croisé, avant de rejoindre cette assemblée brillante, le sourire innocent et la blondeur divine d'une femme de chambre de l'hôtel, Justine, et son esprit ne rêve plus que d'elle. Si différente de ces brunes italiennes que sa mère s'entête à lui présenter.
Le lendemain matin, un cri, des voix qui grondent. Sur le palier les gardes suisses du Cardinal brutalisent la douce femme de chambre. le Cardinal a été sauvagement assassiné et Justine est la coupable toute désignée.
Sur le mur au-dessus du corps, d'étranges symboles liés à la Franc-maçonnerie ce qui ne peut que mettre le feu aux poudres d'une paix civile bien fragile.
Le commissaire Juvard est appelé sur les lieux.
Il y a trop d'incohérences pour que nos deux apprentis détectives en restent là. Giovanni refuse que Justine soit condamnée.
Max et Giovanni tentent de convaincre Célestin Hennion, Directeur de la Sûreté Générale et créateur des célèbres « Brigades du Tigre » de l'innocence de leur protégée. Mais curieusement les symboles sur le mur ont disparu et Justine est incarcérée à Ste Anne.

Ce meurtre tombe à un moment crucial et l'unité nationale est en jeu. L'affaire doit donc être résolue au plus tôt. L'hystérie féminine est à la mode, Merci au professeur Charcot.
Et pour museler les deux journalistes, quelques menaces bien senties, sur la fermeture du théâtre de Max (le Grand-Guignol), et l'incarcération de la famille de Giovanni devenue subitement « anarchiste ».
Extrait P.83 : « La convivialité du moment était aussi factice que la vertu d'une fille de joie. La violence de l'échange, tout en sourdine, avait été dévastatrice. Elle laisserait des traces. »

Les traitements à Ste Anne, à l'époque, sont les électrochocs, les bains glacés, et si cela ne fonctionne pas une bonne lobotomie qui ne laisse plus que des légumes en lieu et place des humains confiés à l'institut. Justine est en danger. le temps presse. Elle est orpheline et n'a qu'eux pour la sauver.

Les recherches des deux amis les conduisent à penser que les assassins, les vrais, ont pu repartir par les airs. Mais comment le prouver ?
C'est qu'un dirigeable c'est énorme, sauf s'il s'agit d'un petit appareil électrique tel que ceux utilisés pour l'espionnage et le sabotage. En partant de cette hypothèse, ils retrouvent le lieu où l'engin a été entreposé. Hélas envolé ! Et l'un des coupables, le seul qui aurait pu parler est mort. Comment convaincre la police ?
Puis une opportunité s'offre à eux : une rencontre internationale de montgolfières parrainée par Alberto Santos-Dumont est organisée dans le parc aéronautique de Meudon.
L'occasion de retrouver les assassins !
Et nous voilà entraînés dans une course poursuite en dirigeables qui va nous conduire jusqu'à la frontière Allemande. Mais qui se cache derrière ce plan machiavélique ?
Qui en est l'instigateur ? Quel est son but ?
Puis un autre corps martyrisé est retrouvé. Celui d'une femme enceinte. Elle ne survivra pas. L'enfant oui, et il sera confié à Marguerite.
Cette histoire ne finira donc jamais ! Justine ne sera jamais en sécurité ?


Ce récit nous entraîne dans le Paris du début du XXème siècle, de ses personnages extraordinaires, de ses découvertes aussi.
Il nous parle de Franc-maçonnerie, de la Golden Dawn, de magie noire, d'occultisme, de la misère humaine, de Nietzsche, du Marquis de Sade, de la folie déclenchée par des souffrances hors normes et qui transforment une victime en un monstre pire que ceux à qui il a eu affaire.

Une fois encore Dominique m'a fait vibrer à chaque page, car la grande Histoire se mêle à la petite pour mon plus grand plaisir. Ce roman est formidablement documenté, le lecteur est en total immersion dans l'époque décrite. Un immense merci pour ce moment de lecture de grande qualité.

Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}