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Citations sur Au temps du fleuve Amour (32)

Dès sa naissance, le village n'était pas conçu pour abriter l'amour. Les cosaques du tsar qui l'ont fondé, il y a trois siècles de cela, n'y pensaient même pas. Ils étaient une poignée d'hommes écrasés par la fatigue de leur folle équipée au fond de la taïga infinie. Les regards hautains des loups les poursuivaient même dans leurs songes tumultueux. Le froid était tout autre qu'en Russie. Il semblait ne pas connaître de limites. Les barbes, recouvertes de givre épais, se dressaient comme des lames de hache. Dès qu'on fermait les yeux un instant, les cils ne se décollaient plus. Les cosaques juraient de dépit et de désespoir. Et leurs crachats tintaient en retombant en petits glaçons sur la surface noire d'une rivière immobile.
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L'enfant, pour construire son univers personnel, a besoin de peu de choses. Quelques repères naturels dont il perce facilement l'harmonie et qu'il dispose en un monde cohérent.
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Nous redécouvrions l'Occident. Ce monde où l'on vivait sans ce soucier de l'ombre lugubre des cimes ensoleillées. Le monde de l'exploit pour la beauté du geste. Le monde des corps fiers de la puissance des beaux mécanismes charnels. Le monde qu'on pouvait prendre au sérieux parce qu'il n'avait pas peur de se montrer comique.
Mais surtout son langage ! C'était un monde où tout pouvait être dit. Où la réalité la plus embrouillée, la plus ténébreuse trouvait son mot : amant, rival, maîtresse, désir, liaison... La réalité amorphe, innommable, qui nous entourait, se mettait à se structurer, à se classifier, à révéler sa logique. L'occident se lisait !
Et, amoureusement, nous épelions les vocables de cet univers fantastique...
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Le village n’a rien su préserver de son passé. Dès le début du siècle, l’histoire, tel un redoutable balancier, s’est mis à balayer l’Empire par son va-et-vient titanesque.. Les hommes partaient, les femmes s’habillaient en noir. Le balancier mesurait le temps : la guerre contre le Japon ; la guerre contre l’Allemagne ; la Révolution ; la guerre civile... Et, de nouveau, mais dans l’ordre inversé ; la guerre contre les Allemands ; la guerre contre les Japonais. Et les hommes partaient, tantôt traversant les douze mille kilomètres de l’Empire pour remplir les tranchées à l’ouest, tantôt pour se perdre dans le néant brumeux de l’océan à l’est.
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Oui, je murmurais le nom de ce fleuve - Amour - en plongeant dans sa sonorité comme dans un corps féminin rêvé, conçu d'une même matière souple, douce et brumeuse.
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Olga dit que le corps d'une femme arrête le temps. Par sa beauté. Tout le monde court, s'agite... Et toi, tu vis dans cette beauté...
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A quoi, en effet, pouvions-nous comparer l'inimaginable complexité sentimentale de l'Occident qui nous était révélée ce soir? En quels termes exprimer l'érotisme tout en nuances de cette scène de séduction? La femme assise dans son fauteuil, une jambe savamment mise à nue. Une femme qui continue à écouter les aveux douloureux du jeune amoureux trahi, qui fait apparaître toutes les marques de compassion et qui, en même temps, relève imperceptiblement le bord de sa robe… Non, cette dialectique sensuelle n'avait pas d'équivalent dans notre langage d'hommes de la Taïga !
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Ô, ces divines jambes! Elles se déplaçaient sur l'écran, suivant le déhanchement sensuel de deux jeunes créatures bien en chair. Des cuisses bronzées qui semblaient ne pas avoir la moindre idée de la présence, quelque part sur le globe, de l'hiver, de Nerloug, de notre Sibérie. Et du camp dont les barbelés embrouillaient le soleil-balancier. Ces jambes démontraient avec une rare persuasion, mais sans vouloir convertir qui que ce soit, la possibilité d'une existence sans Kremlin, sans métiers à tisser et autres performances de l'émulation socialiste. Des cuisses souverainement apolitiques. Sereinement amorales. Des cuisses en dehors de l'Histoire. A l'écart de toute idéologie. Sans aucune-arrière pensée utilitaire. Des cuisses pour des cuisses. Tout simplement de belles jambes féminines bronzées!
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Cependant, la vie est ainsi faite : ce que nous désirons ardemment arrive souvent sous les traits de ce que nous redoutons le plus.
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Les Américains me rappellent souvent des singes s’amusant avec un jouet mécanique. Ils appuient sur un bouton, le ressort fonctionne, le bonhomme en plastique se met à faire des culbutes. Le résultat est atteint … et dans leur culture, c’est pareil. Ils fabriquent un nouveau génie, le gonflent par la télé, tout le monde se fiche de ses livres, pourvu que la machine marche. Le bouton, le ressort, le bonhomme en plastique gigote. Tout le monde est content. C’est très rassurant de pouvoir fabriquer des génies. A l’aide du mot … Ils jonglent avec les idées vieilles comme le monde, les combinent indéfiniment en leur sacrifiant la vie. Des mots, des mots, des mots …
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