Ah çui-là, j'te jure !... On en fera un soldat le jour où les généraux auront un cerveau... L'a rien à faire ici ! Il serait une souris qu'il serait capable d'aller pioncer dans la gamelle d'un chat !
La guerre est quelque chose de sonore, quelque chose de très sensible, en fait... sons assourdissants... images d’horreur ancrées au fond de la mémoire comme une vieille huître malade sur une épave... odeurs suffocantes et si prégnantes qu’on en sent encore le fumet mauvais et douceâtre des années après... mais si je voulais résumer la guerre, je garderais ceci: le son des cloches par lesquelles tout a commencé, puis le silence. Ce silence que seule la guerre peut engendrer, épais comme dans le ventre d’une mère sous la tombe, épais comme des millions de silences se chevauchant et se recouvrant les uns les autres.
L'idéal est toujours une chose inaccessible.
- Patron ? Pouvez-vous me renseigner ?
- Dites toujours lieutenant …
- Je cherche une tombe.
- Ah ! Lieutenant c'est pas ça qui manque par ici !
HA HA HA ! [...] Des meurtriers ?!
Avant qu'ils n'arrivent sur le front, non.
Mais ici, on l'est tous désormais...
Mes hommes sont prêts à mourir pour la France. Mais comment mener sereinement une guerre si l'on tue nos femmes dans notre dos ?
Au lieu de quoi, je finis par atterrir seul et désorienté, en plein cœur d'un ventre de boue humide et glacée.
J'avais trouvé la guerre, et je n'avais pas mis une heure à m'y perdre.
La guerre avait pris ses quartiers à quelques kilomètres de là. Elle envoyait bien quelques obus, parfois. Elle charriait surtout son immense fleuve de soldats montant au front et buvant pour se donner du courage. Et revenant puis buvant pour oublier leur terreur.
- Vous lisez beaucoup ?
- Non. À quoi bon ? Les écrits mentent...
J'aimais tant la nuit.
Son intrigante et douce enveloppe et ses promesses feutrées annonçant le rapprochement des corps.
Mais la nuit ici est un cercueil, et les corps qui s'approchent n'amènent que la mort.
Qu'il est loin le temps des aubes chaudes, celles de l'été où, depuis ma fenêtre, j'admirais le défilé de nos beaux soldats, les enjoignant de courir sus à l'ennemi en échange de mon blanc mouchoir.
Les chevaliers à la flamboyante armure rouge et bleu ne sont plus que des bêtes de poils et d'argile.
Mon mouchoir est depuis longtemps devenu un inutile pansement, torchon gorgé de sang.