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sur 79 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Shahriar Mandanipour est amoureux de son pays, l'Iran, mais l'amour ne rend pas forcement aveugle n'est-ce pas ?

S'aimer librement en Iran est quasiment impossible. Publier un livre évoquant ce brûlant sujet est interdit.

Alors dans ce livre plein d'humour et de références culturelles ou religieuses, il imagine une histoire d'amour entre Sara, jeune étudiante et Dara devenu peintre en bâtiment après avoir dû abandonner ses études.

Avec malice, il imagine même que ce roman sera publié dans son pays après avoir passé la censure !

On découvre avec effroi à quel point la marge de liberté des iraniens est fine dans un contexte économique peu florissant.

Les hommes et les femmes sont en permanence séparés et dans les lieux publics ils peuvent à tout moment être arrêtés arbitrairement par la milice et mis en prison sans pouvoir se défendre. La milice religieuse veille, épie en permanence. C'est insupportable et oppressant.

Découvrez comment, Sara et Dara se rencontrent dans une bibliothèque, communiquent et se revoient tout en vivant ce moment de grâce unique, la naissance tumultueuse du premier grand amour. Ils s'aiment, doutent, se disputent, désirent se revoir….

Les transgressions d'interdits religieux et les montées d'adrénaline face au danger d'être découvert pimentent la vie des amoureux mais on souffre avec eux de leur manque total de liberté. le poids des interdits est tel qu'il s'invite jusque dans l'intimité des familles. Il faut bien comprendre que tout cela n'est qu'une question de survie et en suivant le destin des deux tourtereaux, on rentre dans l'intimité du peuple iranien tout entier.

Un regard de l'intérieur qui vaut le détour.
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Shahriar Mandanipoor aime son pays, l'Iran, c'est indéniable. La censure, il connaît. Après avoir fait des études de sciences politiques il se met à écrire en 1989. Rapidement il est interdit de publication, échappe à une tentative d'assassinat commanditée par la police secrète et est contraint d'émigrer aux USA en 2006. Alors quand il écrit sur la censure dans son pays, il sait de quoi il parle.

C'est par le biais d'une histoire d'amour qu'il va régler ses comptes. le postulat est simple : un jeune ex-étudiant pauvre, Dara, tombe amoureux d'une jeune étudiante riche, Sara. Et c'est réciproque. Las pour eux nous sommes en Iran, sous le gouvernement de la République islamique. Tout s'oppose à leur amour : non seulement ils ne sont pas de la même classe, non seulement elle est déjà promise à un autre, non seulement la religion les oppose, mais ils ne sont pas du même sexe !

Parce que dans la République des mollahs s'aimer librement est impossible. Alors publier, lorsqu'on est écrivain iranien, publier un livre qui parle d'amour c'est chercher les problèmes.

Publié en 2011, alors que l'auteur était réfugié aux USA, « En censurant un roman d'amour iranien » est une peinture de la société iranienne. Avec humour et autodérision l'auteur dresse le constat d'une société figée, en manque de liberté. Avec force références culturelles, religieuses, historiques, il nous livre son amour pour son pays, sa douleur d'en être loin.

L'écriture est déroutante. L'auteur s'adresse beaucoup au lecteur, le prenant à témoin, l'interpellant, lui communicant ses réflexions. de plus le texte est livré comme une écriture automatique, avec ses hésitations, ses ratures, ses interrogations. Ce faisant il nous livre la difficulté pour l'écrivain, mais aussi pour le peuple iranien, de s'exprimer, de vivre tant les contraintes sont omniprésentes, tant tout peut être mal interprété. Quand l'écrivain imagine les critiques que lui fera le censeur il met l'accent sur les ruses que les amoureux iraniens doivent imaginer pour vivre leur amour.

Si le procédé amuse ou fait rire au départ, il finit par lasser. Dommage, car cette entrée dans l'intimité du peuple iranien n'est pas sans intérêt.
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C'est un livre que j'ai reçu dans le cadre de la Kube, donc recommandé par un libraire. Si j'ai trouvé le thème intéressant - les lendemains après la chute du Shah en Iran et l'avènement des ayatollahs - j'ai été en revanche moins convaincue par le traitement. L'auteur écrit ou essaye d'écrire un roman d'amour mais sa plume est sans cesse entravée par la censure, reflet d'une société entièrement contrôlée et qui, donc, vit dans la paranoïa. le traitement est original mais je n'ai malheureusement pas réussi entièrement à accrocher. J'ai trouvé l'écriture trop fragmentée, sans doute avais-je envie de lire une véritable histoire d'amour (sans censure). Une voix néanmoins à découvrir car les romans traduits du perse sur cette période historique sont peu nombreux.
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Comment peut-on être persan et amoureux ? Être amoureux à Téhéran, est-ce pareil qu'être amoureux à Paris, New York, Moscou, Tel Aviv ? Et même, de plus en plus fort, Mesdames, Messieurs, comment peut-on écrire un roman d'amour en Iran?
De vous à moi, c'est un euphémisme de dire que je connais mal la littérature iranienne. Si l'on excepte un détour par le très plombant et rapidement avalé La Muette de Chahdortt Djavann, disons que j'ai comme un blanc entre les quatrains d'Omar Kayyham et Marjane Satrapi. 1000 d'inculture, au bas mot. Et que je ne sois pas la seule dans ce cas n'est pas vraiment une excuse, n'est-ce pas ?
Inculte en la matière comme en tant d'autres, je sais de l'Iran ce que me souffle l'air du monde comme il va : dictature religieuse, uranium, droit de rien du tout. Alors, d'approximations en méconnaissance, sommes-nous condamnés à regarder ces persans sans rien chercher d'autre qu'un exotisme rendu menaçant par un contexte géopolitique plus que délicat ?
Or c'est tout le propos de Mandanipour que de rappeler que non, l'Iran ne se réduit pas à 30 ans de piétinement systématique des droits fondamentaux (par ailleurs bien plus ancien que la chute du shah), qu'il s'agit toujours et par devers tout de l'une des plus vieilles civilisations du monde et que, partant, surtout !, c'est une terre d'histoires. de contes, de poèmes, d'images. de romans. D'où le paradoxe fondateur : pourquoi et comment dans un pays dont la langue est si riche qu'elle peut sans fin inventer des métaphores sexuelles qui ne se répètent jamais est-il impossible d'écrire un malheureux récit d'amourette entre étudiants ?
En censurant un roman d'amour iranien n'est pas un roman d'amour. C'est l'histoire d'un roman qui tente de prendre forme, une manière de brouillon magnifique, revendiqué, bordélique à souhait. On suit vaguement l'histoire des amoureux de Peynet nouvelle formule, Sara et Dara ainsi nommés en hommage aux petits personnages des livres de lecture des écoliers iraniens. Sauf qu'ils ne sont jamais seuls, parce que leur auteur souffre visiblement du complexe de Dieu (oui, pléonasme, tout ça, je sais) et parce que c'est le pays qui veut cela, semble-t-il. Et parce que les plans se mélangent, les réalités s'interpénètrent. le fictif, le sur-fictif, le biographique, tout en même temps. Au premier plan, l'histoire de deux amoureux, très, très, très romanesque et donc très, très, très peu crédible. Il l'aime, il la cherche, il la séduit – chastement, ô combien chastement – elle hésite entre l'amoureux pauvre mais intègre, et le prétendant riche et parvenu, il se fâche, elle hésite un peu moins, etc., etc., etc. C'est mignon et d'un intérêt artistique digne d'un nanar Bollywood, avec en sus le risque permanent de finir lapidé dans un stade. Au détour d'un tendre tête-à-tête au dialogue stéréotypé resurgit l'actualité brutale, comme le fait – sordide – que le seul endroit où un homme et une femme peuvent se côtoyer sans crainte et donc se donner rendez-vous, c'est la salle d'attente des urgences. Quelques mètres plus loin, mirage d'Haschischin et de colporteur d'onguents magiques, fantômes de poètes morts et d'assassinés, souvenir de deux mille ans de littérature, silhouettes réchappées d'autres histoires, de la grande Histoire, trois petits tours et puis s'en vont…
Face à cela, l'Iran d'aujourd'hui, une dictature, une machine à broyer la pensée, l'art, l'humain. Sara est étudiante en littérature, oui, mais toute oeuvre de moins de 200 ans interdite et il n'existe pas de livre qui ne soit pas caviardé par la censure. Dara était étudiant en cinéma, oui, mais communiste également : plusieurs mois de prison et d'isolement plus tard, il est rayé des listes de l'université, ne soutiendra jamais sa thèse parce que tout simplement, il n'existe pas. Méthodiquement déconstruit par l'administration, Dara est peintre en bâtiment. L'administration, justement, thème universel s'il en est - rappelez-moi de vous faire une Page Arrachée à ce sujet. Comme si rien ne rapprochait plus les peuples que de devoir passer six heures devant un guichetier revêche ceint d'une armada de procédures contradictoires : la référence à Kafka est manifeste, assumée (la thèse avortée de Dara portait d'ailleurs sur l'adaptation par Orson Wells du Procès. Ironie du sort). Terrifiante. Affolante de bêtise (voir la scène tragi-comique où l'auteur essaie de faire enregistrer les prénoms de ses enfants). Elle ne broie pas l'humain, elle le découpe en petites cases disjointes. L'autre versant de l'administration, c'est la censure, incarnée, entre autres, par ce fonctionnaire chargé de visionner tout programme avant sa diffusion. Un aveugle, au sens propre.
Pendant ce temps-là, entre les plans, se promène notre auteur… Je fais la maline depuis le début de cet article en faisant des références à la mords-moi-le-doigt à la littérature des Lumières, mais le fait est qu'on y pense souvent. Non pas tant à Montesquieu qu'à Diderot et Jacques le fataliste, car l'auteur-narrateur ne cesse haranguer son lecteur, de se moquer gentiment de ses attentes de lecteur de roman. « Demandez-moi comment… et je vous répondrai… » ne cesse-t-il de répéter, ce que l'on peut aussi lire comme un souvenir des poèmes épique, dont les refrains et retours soutiennent la narration et aident à la mémorisation. L'auteur occupe le devant de la scène, partout, sans arrêt, dans un style brillant-voyant tout en (auto)dérision et effets de manche parfaitement assumés. Grosses ficelles ? Un peu, mais il s'amuse manifestement, et nous avec (moi avec, en tout cas – j'avoue être bon public et avoir éclaté de rire et de bon coeur à une ou deux reprises). Face à lui, sa Némésis, le censeur Pétrovitch. On se souviendra que c'est par ailleurs le nom du juge qui condamne Raskolnikov au goulag. le Pétrovitch iranien, lui, poursuit le malheureux romancier à chaque page, de sorte que celui-ci finit par intérioriser son censeur, prévoir les mots à biffer, pensées à dissimuler. Tel est le véritable danger : ne plus pouvoir penser une littérature libre. S'interdire de concevoir, à l'instar de cet homme aux pensées traquées. C'est le sens du titre, ce me semble : écrire EN censurant, dans le même temps. En psychologie, cela s'appelle une injonction contradictoire et cela rend non seulement incapable d'agir mais également cinglé. Comment ne pas devenir cinglé ? En écrivant. Oui mais alors… ?

La véritable intrigue du roman, on l'a compris, est bien d'écrire un roman, et pour ce faire l'auteur lutte pied à pied avec les institutions, sa propre «iranité», la littérature en général qui hante les pages par paquets de 10 références. Épuisant. Presque épuisant à lire, d'ailleurs, trop brillant, quasi clinquant, trop dense et il est difficile d'oublier que les deux protagonistes n'ont aucun intérêt, même si c'est fait exprès. L'auteur lui-même finit par totalement s'en désintéresser pour mieux souligner l'amer constat qui émerge du chaos final : écrire un roman d'amour iranien, ce n'est pas possible. Est-ce seulement souhaitable ? Sous couvert de galéjades, d'anecdotes, de set de ping-pong avec le lecteur, le propos est plus que pessimiste. La lecture, elle, reste en demi-teinte
Lien : http://luluoffthebridge.blog..
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Peut-on écrire un roman d'amour en Iran, à l'heure de la République islamique ? C'est à cette question que répond Shahriar Mandanipour. Il ne se contente pas de répondre "Non" dans le vide, mais il nous en donne la preuve tout au long de son ouvrage.

L'écriture est triple : celle du roman d'amour est en gras, les passages à censurer sont biffés et, en caractères simples, les tâtonnements, les interrogations, voire les explications de l'auteur sur ses doutes et ses difficultés à faire aboutir son projet, ainsi que la véritable histoire de ses deux protagonistes, histoire impubliable en Iran de nos jours.

L'intérêt du roman réside bien sûr dans la partie du dialogue avec lui-même, avec ses personnages, et avec ses lecteurs. On y découvre un pays où toutes les activités sont soumises aux diktats du ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, dont les sbires sont toujours prêts à intervenir dans la moindre activité quotidienne. Et pourtant, sa jeunesse ne manque pas d'audace ni de rêves : l'héroïne, n'hésite-t-elle pas à ôter son voile en pleine rue en échange d'un livre auquel elle tient beaucoup ?

Le propos est intéressant, mais à la longue, le roman s'épuise et tourne autour de son procédé. Mais au moins la démonstration est faite, l'histoire d'amour proprement dite est insignifiante, digne des romans de la série Arlequin et ne peut être terminée.
Lien : http://meslecturesintantanee..
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Un sujet tragique traité avec beaucoup d'humour. Ou comment l'humour est finalement le meilleur exutoire pour oublier au sein de quelle monstruosité le pouvoir religieux fait vivre des amoureux.
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En censurant un roman d'amour iranien raconte exactement ce que son titre évoque : l'écriture d'une romance sous la censure du régime islamique iranien.

Comment écrire un roman d'amour quand un homme et une femme non mariés ne peuvent pas se voir seuls légalement et que tous les mots évoquant le corps d'une femme ou l'érotisme sont censurés ?
L'auteur décortique dans ce roman atypique les obstacles à l'écriture d'un roman dans un régime de censure et explique comment il essaie de les contourner. La censure l'oblige à passer tout un pan de l'histoire sous silence, laissant le lecteur imaginer les non-écrits.
L'auteur joue avec la typographie : la narration normale en écriture normale, son roman d'amour en gras et en barré les phrases de son roman d'amour qui sont ou seront censurées.

Deux histoires s'entremêlent donc : la romance presque impossible entre Sara et Dara écrite par l'auteur tout au long du roman et le dialogue à trois voix entre l'auteur, son lecteur et son censeur, M. Petrovitch.
Ce n'est pas toujours évident à suivre, mais certains éléments sont vraiment passionnants, que ce soit la réflexion sur l'écriture, la description de la vie en Iran ou les nombreuses références culturelles qui émaillent ce livre.

Je ne pense pas avoir tout saisi, mais j'ai passé un bon moment de lecture. Même si j'étais plutôt d'humeur à lire un roman rapidement, ma curiosité concernant ce livre est maintenant assouvie et je suis ravie de l'avoir découvert !
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