AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,11

sur 14 notes
5
3 avis
4
5 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le Salvador est l'un des pays les plus meurtriers du monde. Les gangs (« pandillas ») les plus violents s'y livrent depuis des années une guerre sans merci, à laquelle s'ajoutent les « affrontements » réguliers avec la police. Pourquoi des guillemets ? Je m'explique.
S'il est légitime pour un gouvernement de vouloir mettre fin à la violence des gangs et à l'insécurité qui en résulte, encore faut-il en donner les moyens aux forces de l'ordre d'abord, aux tribunaux et aux prisons ensuite.
Et c'est bien là tout le problème : corruption à tous les étages d'une part, et spirale infinie de violence d'autre part : sans qu'on sache très bien qui a commencé (version salvadorienne de l'oeuf ou la poule), les pandilleros tuent les flics pour se venger ou se défendre, d'autres flics abattent d'autres pandilleros pour se défendre ou se venger, la surenchère de vengeance s'étend aux familles des uns et des autres et cela ne s'arrête jamais. Sauf que cela devrait s'arrêter puisque les flics sont censés représenter la loi, l'autorité et l'Etat, et que même si au Salvador, il est très peu question d'Etat de droit, on ne devrait pas pour autant en arriver à une loi du Talion exponentielle. Mais que cela ne s'arrête pas, parce que les flics sont en l'occurrence eux aussi constamment harcelés, menacés, ciblés, torturés, tués par les gangs, et que les opérations commandos tournent régulièrement en bavure, la plupart du temps même pas accidentelles.
Et donc quand l'auteur parle d' « affrontement » avec la police, il veut dire en réalité « massacre commis par la police ».
C'est un énième de ces épisodes sanglants qui a mené à ce livre : dans le bled paumé de Santa Teresa, un groupe de policiers a abattu, en pleine nuit et dans une église, un groupe de pandilleros désarmés, ainsi qu'un jeune homme qui n'était membre d'aucun gang, et a ensuite maquillé la scène de crime en affrontement « authentique », certain de son impunité. Sauf qu'il y avait deux témoins, qui ont accepté de parler au journaliste, lequel, après investigations et recoupement de multiples indices, a publié l'histoire, qui a mené tant bien que mal à la mise en accusation et au procès de huit policiers.
Mais tout est mal qui finit mal, puisque par la suite, un des témoins a été assassiné, avec deux autres personnes innocentes, et que l'autre témoin vit encore sous la menace permanente des bourreaux assoiffés de revanche et de violence.
Dans « Les morts et le journaliste », Óscar Martínez, journaliste d'investigation spécialiste des thèmes de la migration et de la violence en Amérique centrale, revient sur ce crime et son enquête. Il s'interroge plus largement sur son métier, sa déontologie, explique comment il ne publie que des enquêtes dont il a pu prouver le moindre élément, parle de celles auxquelles il a dû renoncer, pour la raison inverse. Il questionne également les liens entre le journaliste et ses sources : si ce sont des victimes, faut-il sympathiser avec elles, faire preuve d'empathie, essayer de les aider, de les sauver, garder le contact après l'enquête ? Et si ce sont des bourreaux, comment interagir ? Des réflexions sur le pourquoi et le comment de ce métier si particulier dans cette zone si dangereuse du monde, sur cette violence infernale qui semble sans fin ni solution.
Malgré une structure qui aurait pu être plus claire (on sent que cela a été écrit d'un seul jet), « Les morts et le journaliste » est un livre terrible, dur, brutal, qui ne laisse pas de place à l'espoir ou à la rédemption. Mais la démarche est nécessaire et ici, remarquable d'honnêteté et de courage.

En partenariat avec les Editions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          423
Ce livre est un essai dans lequel l'auteur, un journaliste salvadorien, se questionne sur son métier, notamment sur le rapport qu'un journaliste doit entretenir avec ses sources.

Le Salvador, ce petit pays d'Amérique Centrale, est l'un des endroits les plus dangereux au monde avec un taux d'homicide extrêmement élevé. C'est un pays ultra violent, avec une justice quasiment invisible, des politiciens pourris et incompétents, une police corrompue et sanguinaire, et des pandillas (gangs) qui gangrènent tout le pays.

Dans ce pays sans foi ni loi et à travers le décès de trois de ses sources, le journaliste se remet en question lui et le métier qu'il fait. Qu'a-t-il le droit de faire, jusqu'où aller pour ne pas mettre en danger ses sources, comment les protéger, où faut-il s'arrêter, la question de la rétribution se pose aussi... Où placer le curseur ? Toutes ces interrogations affleurent sans pour autant obtenir forcément de réponse.

Ce journaliste est très courageux pour le métier qu'il effectue dans un pays ultra dangereux en tentant de dénoncer la violence de tout bord et pour avoir écrit ce récit. Les questions qu'ils se posent sont légitimes.

Par contre, le récit manque de construction, parfois de clarté, ce qui fait que l'on peut être de temps en temps un peu dérouté. Mais c'est un récit fort, où l'auteur essaie de rendre compte de la difficulté de son travail de façon la plus honnête possible.

Un essai coup de poing écrit par un journaliste téméraire qui n'est pas encore résigné mais qui s'interroge sur son métier, son efficacité et son utilité dans ces pays gangrenés de partout.




Commenter  J’apprécie          210
Oscar Martinez , journaliste salvadorien nous livre un témoignage poignant, bouleversant et exceptionnel sur son métier et la façon de le faire.
Le titre de cet essai est clair : les morts et le journaliste.
Le Salvador petit pays d'Amérique Centrale est gangréné par la violence des gangs ( pandilla ) et la pauvreté de sa population. le nombre d'homicide annuel est supérieur à 100 pour 100 000 habitants. Dans tous les quartiers les plus chauds de la planète , ce nombre dépasse à peine 50 pour 100 000 habitants.
Le titre du premier chapitre annonce la couleur : lisez ou laisser tomber. et Oscar Martinez de continuer : "La fin, je vous l'ai déjà racontée :les cadavres démembrés de trois frères salvadoriens jeunes et pauvres ont été retrouvé dans un champ de canne à sucre sans nom. si vous décidez de ne pas me lire, je vais vous éviter de tourner les pages . La dernière ligne de ce livre sera la suivante :Il y a des morts. Point. "
Ces trois frères salvadoriens sont des sources d'Oscar Martinez. Ces trois frères ont décidé de témoigner et ces témoignages seront la cause de leur mort à venir.
Dans son essai, Oscar Martinez va entremêler le regard qu'il porte sur les faits et témoignages ainsi que ces réflexions sur ce qu'est le journalisme .
A tout moment cela est éloquent , qu'il s'agisse de la violence de la société salvadorienne ou qu'il s'agisse de la réalité du journalisme. Tout devient universel. Que ce soit le sort d'un paysan d'un enfant , du membre d'un gang ou d'un journaliste.
Cet essai nous rappelle les risques et les raisons du métier de journaliste. Ce rappel est salvateur, brutal mais tellement pertinent.
" Tellement de journalistes l'ont dit. Notre travail ne consiste pas à être à l'endroit indiqué à l'heure indiquée. Ca, c'est le boulot des livreurs de pizzas ou de trains. Notre travail implique d'autres verbes : comprendre, expliquer, dévoiler, révéler, affirmer, questionner."
"Je crois que journaliste, ce n'est pas le plus beau métier du monde. C'est juste un slogan. Ne le répétez pas., remettez le en cause "
"L'honnêteté est un lieu commun. Sois honnête, sois honnête, sois honnête. C'est ce qu'on appelle enfoncer une porte ouverte. Etre honnête c'est surtout être brutal. Etre honnête c'est quelque chose qui se gagne.
Si l'honnêteté ne bouleverse pas le journaliste qui la propose, ce n'est pas de l'honnêteté, c'est tout au plus de l'angélisme ou de l'hypocrisie: je veux te sauver, je veux que le monde connaisse ton histoire, je veux changer ce monde, je veux la justice...
Ce n'est pas la même chose de dire à une source que tu veux raconter son histoire que de dire que tu veux le faire sans que cela signifie en aucune façon lui sauver la vie "
Je remercie les Editions Métailié et Babelio pour l'envoi de cet essai.
Lien : http://auxventsdesmots.fr
Commenter  J’apprécie          200
Les morts et le journalisteOscar Martinez, c'est quoi?
Un essai coup de poing sur un pays, le Salvador et sur une profession, journaliste.
Oscar Martinez nous raconte trois enquêtes au plus près des victimes des violences policières de son pays.
Chronique de trois morts annoncées, conséquences de témoignages mettant en cause l'inertie de justice.
Description méthodique de la violence endémique qui gangrène le Salvador.
Description minutieuse du travail de journaliste d'investigation dans un pays où la corruption est systémique.
Comment vivre dans un pays minuscule de moins de sept millions d'habitants, un pays où la police tue autant que les cartels.Un livre brutal, sec et précis, un livre nécessaire pour rendre compte d'un métier à haut risque dans un pays à la politique intérieure instable.
Comment vivre normalement lorsque l'on est témoin du pire de la nature humaine et comment oser mettre des mots pour en rendre compte.
Oscar Martinez nous livre un témoignage intime et sincère sur un métier qu'il adore mais qui, chaque jour, lui laisse de brulantes cicatrices.
"Les morts et le journaliste " est un polar ultra violent formidablement écrit qui se lit d'une traite mais ici tout est vrai, ce qui rend ce récit absoluement terrifiant.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          120
Un essai qui dépeint durement l'abîme de la violence et de la misère au Salvador. Une lecture coup de poing, dérangeante.

Votre mission si vous l'acceptez : essayer de comprendre la violence, trouver comment une société monstrueusement violente peut se créer.

Lieu de l'enquête : en plein coeur du triangle nord de l'Amérique Centrale, au Salvador, le pays le plus meurtrier de la planète.

Óscar MartÍnez est un journaliste travaillant depuis cinq ans au sein de la Sala Negra, un service d'enquête sur la violence du journal El Faro.

Dans « Les morts et le journaliste », Óscar, notre narrateur, va nous livrer treize ans d'enquête sur la violence avec la peur comme unique compagne. Il nous explique sa relation avec les informateurs mais, surtout, « Les morts et le journaliste » est un monologue intérieur d'une beauté captivante et inconfortable. Brutal.

Notre fil conducteur est l‘histoire de Rudi, membre de la pandilla (gang) et de ses frères. Dès le début, le lecteur sait que trois vont mourir et qu'un seul survivra. Et il sait aussi que ses yeux vont parcourir difficilement les pages suivantes. Car il sait qu'Óscar raconte des histoires vécues, vraies, qui semblent tirées d'un film d'horreur. Des histoires de vies humaines qui habitent des quotidiens monstrueux. Des paysans étouffés par l'impunité. Des policiers qui commettent des massacres. Des victimes qui sont aussi des agresseurs.

« Les morts et le journaliste » est un essai. Parfois carnet de notes ou carnet de voyage. Parfois confessionnal ou récit de souvenirs. Óscar y prône une certaine force de courage, celui de douter. le doute permanent. Des doutes épineux mais précis. Des doutes profonds. Ses recherches ne sont qu'une fouille effrénée. Les réflexions de l'auteur sont à la fois terrifiantes et bourrées de pénitence. Jusqu'où aller, quand s'arrêter, qu'est-ce que je veux savoir et pourquoi ? Avec ses investigations, Óscar met ses sources en danger, et il le sait.

« Quand quelqu'un ne peut aspirer selon certaines règles qu'à n'être rien, il cherche à être quelqu'un selon d'autres règles. Être quelqu'un est dans la nature humaine. Être quelqu'un n'est jamais être rien. La vie, c'est la recherche d'un sens, et le monde est fait pour que beaucoup d'individus ne le trouvent pas. »

Au-delà du doute, le journalisme permet de comprendre. Comprendre le monde. Continuer malgré tout à se poser des questions et éclairer l'indicible dans ces régions du monde où la mort violente est une politique d'État et une histoire quotidienne.

La plume d'Óscar est lucide, factuelle, objective. La volonté de comprendre dégorge de chaque phrase. Óscar creuse son sujet jusqu'à la moelle.

Dans ce livre dérangeant, il reste une note d'espoir : parfois le journalisme change quelque chose. Consuelo est une mère ayant été témoin du massacre de son fils de vingt ans par un groupe de policiers. Dans cette affaire, grâce au journaliste, une enquête s'est ouverte, se transformant en procès et condamnation internationale.

Un roman déroutant, dont l'impact sur le lecteur est immense. Acceptez de plonger au coeur de la violence salvadorienne en compagnie d'Óscar. Une lecture éprouvante, je dois bien l'avouer, mais tellement riche.

« Sa vie avait toujours été un désastre dans les grandes largueurs. Les histoires de dépassement existent, mais elles ont leurs limites. Dans ce cas précis, il n'y avait pas de rédemption possible. Personne ne la recherchait, personne ne la lui offrait, et ce n'était pas dans les environs qu'il risquait de la trouver. Survivre, tel était l'objectif. Fuir le mieux possible. Toujours fuir. »

Je remercie les Éditions Métailié et Babélio pour cette lecture.

#ÓscarMartÍnez #Lesmortsetlejournaliste #ÉditionsMétailié
Lien : https://soniaboulimiquedesli..
Commenter  J’apprécie          50

Autres livres de Óscar Martínez (1) Voir plus

Lecteurs (63) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2879 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}