Citations sur La Peur (10)
Nous restions immobiles, livides, dans l'attente d'un événement affreux, l'oreille tendue, le coeur battant, bouleversés au moindre bruit. Et le chien se mit à tourner autour de la pièce, en sentant les murs et gémissant toujours. Cette bête nous rendait fous ! Alors, le paysan qui m'avait amené se jeta sur elle, dans une sorte de paroxysme de terreur furieuse, et, ouvrant une porte donnant sur une petite cour, jeta l'animal dehors.
La peur (et les hommes les plus hardis peuvent avoir peur), c’est quelque chose d’effroyable, une sensation atroce, comme une décomposition de l’âme, un spasme affreux de la pensée et du coeur, dont le souvenir seul donne des frissons d’angoisse. Mais cela n’a lieu, quand on est brave, ni devant une attaque, ni devant la mort inévitable, ni devant toutes les formes connues du péril : cela a lieu dans certaines circonstances anormales, sous certaines influences mystérieuses en face de risques vagues. La vraie peur, c’est quelque chose comme une réminiscence des terreurs fantastiques d’autrefois.
A mesure qu'on lève les voiles de l'inconnu, on dépeuple l'imagination des hommes.
Mais sait-on quels sont les sages et quels sont les fous, dans cette vie où la raison devrait souvent s'appeler sottise et la folie s'appeler génie ?
Alors mon compagnon, ayant pris l’autre bougie, se pencha. Puis il me toucha le bras sans dire un mot. Je suivis son regard, et j’aperçus à terre, sous le fauteuil à côté du lit, tout blanc sur le sombre tapis, ouvert comme pour mordre, le râtelier de Schopenhauer.
Je me sentais la volonté bien ferme de ne point avoir peur, mais il y avait en moi autre chose que ma volonté, et cette autre chose avait peur.
Comme l’obscurité des soirs devait être sombre, terrible, autrefois, quand elle était pleine d’êtres fabuleux, inconnus, rôdeurs méchants, dont on ne pouvait deviner les formes, dont l’appréhension glaçait le cœur, dont la puissance occulte passait les bornes de notre pensée, et dont l’atteinte était inévitable ?
Avec le surnaturel, la vraie peur a disparu de la terre, car on n’a vraiment peur que de ce qu’on ne comprend pas. Les dangers visibles peuvent émouvoir, troubler, effrayer ! Qu’est cela auprès de la convulsion que donne à l’âme la pensée qu’on va rencontrer un spectre errant, qu’on va subir l’étreinte d’un mort, qu’on va voir accourir une de ces bêtes effroyables qu’inventa l’épouvante des hommes ? Les ténèbres me semblent claires depuis qu’elles ne sont plus hantées.
La peur, c'est quelque chose d'effroyable, une sensation atroce, comme une décomposition de l'âme, un spasme affreux de la pensée et du cœur, dont le souvenir seul donne des frissons d'angoisse.
Le surnaturel baisse comme un lac qu'un canal épuise ; la science à tout moment recule les limites du merveilleux.
Oh ! personne ne peut comprendre, à moins de les avoir ressenties, ces épouvantables et stupides terreurs. L’âme se fond ; on ne sent plus son coeur ; le corps entier devient mou comme une éponge, on dirait que tout l’intérieur de nous s’écroule.