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Quand on éprouve le mal de mère…

Elle est partie, nonagénaire sans mémoire. Elle est partie et ainsi ses enfants sont devenus des orphelins. Quel que soit leur âge, il n'est pas facile d'apprivoiser ce nouveau statut.

Cette mère, née en France, qui a connu la guerre, mais qui reste attachée à sa patrie qu'elle n'a pas vue depuis 1971. Elle habite Montréal depuis ce temps, mais n'a jamais aimé son nouveau pays. En fait, dans sa vieillesse, elle méprise le monde entier.

L'auteure, sa fille, aurait bien voulu que sa mère veuille cultiver son jardin et en apprécier la beauté, et qu'elle puisse jouir un peu plus des douceurs de l'existence, de la littérature et des paysages.

Un court roman, touchant, sur le deuil de la première femme qu'on a aimée.
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Dans ce « journal de deuil » qui s'étale sur une année, la narratrice nous confie petit à petit son amour pour sa mère morte récemment. On perçoit cette mère comme une femme un peu étrange, pleine de pensées contradictoires. Elle a l'habitude d'accaparer l'attention de ses enfants, surtout celle de la narratrice qui s'occupe beaucoup d'elle. On la sent bien peu partageuse : le monde tourne autour d'elle et elle pousse parfois ses proches dans leurs retranchements, comme pour mesurer son pouvoir. Elle ne s'est jamais acclimatée à Montréal, cultive un mépris plus ou moins appuyé pour le Québec, et reste accrochée à sa Normandie natale, à Paris, où elle a vécu, et à la France dans son ensemble. Elle considère sa vie au Québec comme un exil, regrettant sans cesse sa vie d'avant et se plaignant souvent auprès de la narratrice.
***
Catherine Mavrikakis confie son chagrin, le déchirement qu'elle subit, les petits riens qui accentuent l'absence qu'elle vit avec désespoir, mais aussi une vraie culpabilité. Ce deuil est infiniment douloureux, mais la mort de la mère se révèle libératrice, et ce sentiment, cette constatation est difficile à assumer. La passion de l'autrice pour les jardins, les arbres, les plantes et les fleurs, tient une grande place dans sa vie depuis toujours, et cet amour prend, dans le récit, une dimension à la fois réelle et métaphorique. On trouvera le sens du titre expliqué dans les deux derniers chapitres. Dans les nombreux passages en italique, de longueur variable, l'autrice s'adresse directement à l'absente et confie parfois ce qu'elle lui reproche. L'amour qu'elle lui porte est infini, mais lucide aussi. Cela lui permet de développer cette relation ambiguë avec une mère possessive, égoïste, vaniteuse, ingrate et parfois cruelle, mais la lucidité a un prix : la culpabilité induite par la peur de ne pas en avoir fait assez, de ne pas avoir assez donné de sa personne, d'avoir jugé comme elle était jugée... Un beau récit, très loin des épanchements et des idéalisations que suscite souvent la mort d'une personne aimée !
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Catherine Mavrikakis a choisi la forme d'un journal du deuil pour rendre compte de la relation difficile avec sa mère tant aimée Denise, décédée en juin 2019, une mère amère, trompée par son mari, nostalgique d'un pays - la France -, où elle n'est jamais retournée, pouvant se montrer cruelle envers ses enfants, et dont l'auteure tente de se séparer par l'écriture, tout en lui rendant hommage. C'est une belle trouvaille que la métaphore du jardin, qui permet de parler tant de la vie que de la mort d'une façon lumineuse, éclairant joliment un chemin sur lequel nous pouvons ne pas avoir toujours envie d'aller, nous accompagnant ce faisant dans l'acceptation de cette réalité que nous finirons tous par perdre nos parents, et par nous faner... Dans l'article de Manon Dumais, du journal le Devoir du 07 novembre 2020 intitulé « Tout sur ma mère », Catherine Mavrikakis dit ceci de sa mère : « Ça me fait beaucoup de peine de le dire, mais ma mère a cultivé un jardin stérile. Elle était une grande dépressive qui ne faisait rien de la journée. Elle s'ennuyait, elle s'ennuyait, elle s'ennuyait… Je pense que j'ai hérité de son ennui, mais je ne m'ennuie jamais parce que je fais toujours quelque chose : je cultive mon jardin. Ma mère a pris soin d'elle physiquement, mais je lui en veux beaucoup de ne pas avoir pris soin d'elle intellectuellement et psychiquement, ce qui aurait pu l'aider à se sortir de l'ennui. Je lui en veux parce que quand on a des enfants, on a une responsabilité. » de l'importance de cultiver nos jardins... Une bien belle lecture, doté d'une dimension universelle aidant à prendre de la distance avec le tragique de la vie.
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La chronique du deuil de la mère m'a paru le terreau du regret de ce qui aurait pu être si la défunte n'avait cultivé la nostalgie d'un pays perdu et également celle d'une décennie d'insouciance avant la deuxième guerre mondiale.
Cette légèreté, mère et fille l'ont connue lorsqu'elles se réveillaient la nuit, nouant une rare complicité, rieuses autour d'une tisane et d'un lait au chocolat, à se raconter des sottises.
Les souvenirs de l'auteure tressent le portrait d'une mère rigide, ego centrée et peu affectueuse. Malgré les reproches adressés à la disparue, un amour inconditionnel apparaît envers une femme exilée, en exil d'elle-même aussi. La fille parle de la mère en je, à la troisième personne, la tutoie et convie un nous dans l'élan d'une phrase étirée.
Catherine décrit ce qu'elle tient de sa génitrice (pas grand'chose), ce qu'elle retient d'elle, en gardant une distance délibérée, évitant d'idéaliser une mère qu'elle ne peut s'empêcher d'aimer, coûte que coûte.
C'est beau, triste et long comme un sanglot à jamais enfoui. La fille se déleste de l'amertume maternelle, exprime, au contraire de la mère, à l'inverse de l'amer (la mère). Elle éprouve la présence lancinante de l'absente.
Phrases ciselées, ton en apnée, solitude assumée,
un an défile, secrète une perle littéraire, le but avoué étant de réinventer, seule au clavier, la mère qu'elle aurait aimé avoir.
Quant à moi, j'aurais aimé un rai de gaieté, longtemps espéré, à jamais absent. Néanmoins, ce récit endeuillé m'a ramené à l'incroyable bonheur de vivre.
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J'avais entendu une interview de l'auteure sur France Culture il y a quelques semaines qui m'avait intéressé. Un article dans Lire m'a convaincu de découvrir ce texte.

Je dois dire que j'ai été dubitative en lisant ce journal de deuil.

D'abord parce qu'il a parfois résonné en moi, mais surtout parce que je ne vis pas le deuil de la même façon que l'auteure. Je me suis parfois sentie très éloignée d'elle.

Quelques citations :

Tu n'as jamais cultivé ton jardin. (p.11)

Pourtant, je m'apperçois que je suis aussi capable de donner naissance au monde. Ca pousse, ça pousse. Les fleurs travaillent toutes seuls à exister. (p.53)

Je me régalais, éberluée que la vie soit simplement à portée de main. Dans le jardin. (p.67)

Le passé ne sert à rien. Il n'y a pas à le ruminer. Ton mari et toi partagiez cette façon de vous taire sur vos souffrances les plus violentes. Là-dessus, je ne serai pas votre fille. (p.106)

Néanmoins, dans ce retrait où ton existence s'était installée, toi qui t'étais pris l'Histoire et la Grande Guerre en pleine gueule de seize à vingt ans, tu m'as donné de quoi cultiver ma solitude. Je t'en suis infiniment gré. (p.131)

Sachant que de la peine de ton fils, comme de celle de tous tes enfants, tu ne voulais rien connaître. J'étais celle qui prend soin des autres. Cela me donnait une place dans ce monde dont, toi, tu ne voulais pas. (p.143)

Tu n'as jamais mangé les lotos (de l'Odyssée). Tu as gardé le passé vivant jusqu'à ta mort. Quelle douleur ! (p.173)
Lien : https://alexmotamots.fr/labs..
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« Ici, je n'écrirai pas la violence, les tortures, les
méchancetés. Ici, je n'exposerai pas crûment ma colère.
Je transforme tout en petits fragments mélancoliques. »

180 pages de morve à l'encontre de sa mère, qu'elle faint de modérer avec du « je t'aime comme tu es » niaiseux et des commentaires comme ci-dessus.
J'ai poussé la lecture jusqu'au bout, attendant une rédemption, une épiphanie ou quoi que ce soit qui puisse justifier de publier ça.
En vain. Juste la vengeance d'une vieille autrice qui n'a pas su dépasser l'adolescence, comprendre l'altérité, qui n'a pas compris qu'elle s'est construite en opposition.
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