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Critique de gruz


Nul doute que si Katie avait vécu de l'autre côté de l'Atlantique, 100 ans tout rond après, elle aurait sans cesse chantonné le tube de 1963 de Claude François. Si j'avais un marteau, je cognerais le jour, je cognerais la nuit, j'y mettrais tout mon coeur… Michael McDowell nous emmène aux États-Unis en 1863, là où le personnage-titre sévit, à frapper violemment de son outil les têtes des femmes riches qui ont le malheur de croiser son chemin.

Son adresse et son impulsivité à cogner plus vite que son ombre ne sont pas ses seules singularités. Katie est une voyante au don exceptionnel, capable de sentir le futur de ceux qui la croisent de (trop) près, et même de flairer la somme de billets qu'ils ont dans leurs poches. Deux « talents » qu'elle contient difficilement, sachant qu'elle est aussi brutale que bête à manger du foin.

Cette jeune femme est un tel phénomène qu'elle a donné le nom à ce roman alors qu'elle n'en est pas l'héroïne principale. Philomela (surnom Philo) Drax est le coeur palpitant du récit, jeune femme sans le sou qui va voir le destin subitement animer sa vie, et pas mal s'acharner aussi. Une belle personne, discrète, aux belles valeurs, qui va se retrouver confrontée à la violence en croisant le chemin de Katie qui est accompagnée de son père et de sa belle-mère (au même tempérament, qui se ressemble, s'assemble…).

Michael McDowell aime tout particulièrement raconter des histoires qui nous ramènent aux temps passés des USA. Blackwater débutait en 1919, Les aiguilles d'or se déroulait en 1882, Katie prend place en 1871. Autant dire que les univers se rapprochent, l'écriture également.

Ce roman a été édité initialement en 1982, juste un an avant Blackwater. Autant dire qu'on est dans une période particulièrement inspirée de la carrière de l'auteur. Qui n'aime rien tant que raconter des histoires de famille au sein de fictions historiques.

L'éditeur présente le roman comme une rencontre de Jane Austen et Stephen King. C'est plutôt drôle, et assez bien vu. On est en plein dans le genre d'histoires populaires qui faisaient fureur au XIXe siècle, mettant en scène des histoires familiales, avec des personnages confrontés à l'horreur qu'on suit dans leurs quotidiens chamboulés.

On s'attache vite à Philo, avec passion, et on frissonne face à l'accumulation de ses malheurs, mais en ouvrant aussi de grands yeux face à ses coups de chance qui vont chambouler sa vie. Un très beau personnage, dont on prend fait et cause, et dont la sobriété détonne avec le caractère cruel de Katie.

L'écrivain aime dessiner des personnages atypiques, souvent déviants, au sein d'une ambiance qui nous fait littéralement voyager dans le passé. McDowell est un raconteur, entièrement au service de ses protagonistes, qu'il fignole avec soin, même dans leurs pires traits.

450 pages d'immersion qui nous font vivre intensément les scènes et ressentir les odeurs, à se retrouver plongés au sein même des drames et des tensions. Avec, comme Blackwater, cette pointe de fantastique à peine esquissée, qui ne fait que renforcer l'étrange attrait qu'on ressent à cette lecture qui reste pourtant bien ancrée dans la réalité.

De la fiction, dans sa plus belle des définitions populaires, avec comme objectif premier de divertir le lecteur. Ce qui n'empêche pas l'auteur d'avoir l'ambition de traiter son histoire avec soin, de travailler son écriture pour qu'elle soit d'une fluidité rare, tout en ayant l'ambition d'une plume enlevée. Pas loin d'être un joli tour de force.

Avec cette histoire, comme toutes celles de l'auteur, on ne sait jamais ce qui nous attend la page suivante, un moment de grâce ou une scène de pure violence, de bonnes ondes ou les pires vilenies. Un grand huit émotionnel, prenant et parfois effrayant. Surprenant toujours, jusqu'aux derniers mots de la dernière phrase du roman !

Katie est une nouvelle réussite, mélange de fiction historique et d'histoires de famille. de l'aventure, de l'émotion, des rebondissements étonnants, des passages cocasses et décalés, de la tension, et une belle peinture des milieux argentés du XIXe. Tous les bons ingrédients qui font une lecture populaire de qualité et démontrent une fois de plus le formidable talent de raconteur d'histoires de Michael McDowell.

Un mot pour saluer la nouvelle oeuvre d'art de Pedro Oyarbide bien mise en valeur par l'éditeur Monsieur Toussaint Louverture. Une couverture magnifique, à ranger dans la collection en cours des oeuvres de McDowell (trois autres romans suivront).
Lien : https://gruznamur.com/2024/0..
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