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Le drame qui touche le Maroc et nos amis et amies marocains ce jour même , mérite seulement des gestes de solidarité et de compassion aussi je me permettrai de passer sous silence mon commentaire sur un roman concernant la vie , les traditions , les coutumes de ce pays proche . Je vous dirai simplement qu'il m'a énormément plu , tant par son contenu que par le style d'une autrice de grande qualité que l'on retrouvera sans aucun doute bientôt .
Le roman vient de paraître en poche et je ne puis que vous inciter à le lire pour mieux comprendre la complexité dans laquelle se trouvent , notamment , les jeunes des différentes classes sociales . Pour cela , suivez deux jeunes femmes , Kenza et Fathia .
Pour l'heure , une grande pensée pour les Nadia , Karim , Fathia ou Kenza frappés par la tragédie et le deuil .
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Kenza est une fille de bonne famille au Maroc. Ses parents étant décédés fort jeunes, elle a été élevée par ses grands-parents. Son grand-père a longtemps été proche du Palais-Royal et a été gouverneur d'une province, avant de se retrouver sur la touche, plein d'amertume. Ils ont comme domestiques Ali, le chauffeur, et Milouda, la bonne. Celle-ci a une fille, Fatiha, que Kenza considère comme une soeur, malgré les remontrances de son grand-père pour qui chacun doit rester à la place que les hasards de la naissance lui ont assignée. Nous allons lire le récit entrecroisé de la vie de ces deux filles devenant des femmes. ● C'est un récit qui se dévore. On y voit le cloisonnement social à l'oeuvre au Maroc, les difficiles relations entre ce pays et la France, la vie des Marocains en France et celle des Européens au Maroc, la jeunesse dorée de Casa et l'univers des bonnes à tout faire, proies faciles et sans défense pour les jeunes gens sans scrupules qui ne les considèrent pas plus qu'un animal. Les rapports de domination s'étendent à tout le spectre des rapports humains : sociaux et économiques, bien sûr, mais aussi amoureux et sexuels. ● Les hautes classes monopolisent les postes qui comptent en les attribuant d'un seul coup de fil à leur progéniture. Les autres peuvent crever. Tout – la moindre chose – est affaire de passe-droit, jusqu'au renouvellement d'une simple carte d'identité marocaine. L'autrice met bien cela en lumière, et la façon dont s'exerce l'injustice du grand-père est particulièrement répugnante. ● « Je vais retourner au Maroc et tout se mélange, la chaleur de mon enfance, mon arrivée ici, les personnes nées en France, mais qui ne rêvent que de la quitter, les amoureux de cette culture qui sont obligés de s'en aller, la diabolisation de l'islam, les nouveaux convertis qui m'angoissent, Rayan qui pense faire peur au monde et qui a raison, cette double culture qui n'entre dans aucune de leurs cases. » ● La narration est très habile. On passe insensiblement de Kenza à Fatiha, et d'une époque à une autre, de façon remarquablement maîtrisée. L'intrigue est fort bien menée. Les personnages sont travaillés, complexes, très intéressants (sauf peut-être Mamoun). C'est là un premier roman fort réussi, signalé avec à-propos par l'Académie Goncourt dans le cadre de ses « conseils d'été ». J'espère qu'il est le premier d'une longue liste !
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Une critique enthousiaste de Milllie et hop ! j'emprunte ce livre, premier roman d'une auteure née au Maroc.
Avec ce roman vous partez dans ce pays et vous rencontrez Kenza, fille d'une riche famille de notables, et Fatiha, la fille de la bonne de cette famille. Si les deux enfants sont élevées comme soeurs, elles vont néanmoins avoir des voies très distinctes, le poids de la classe sociale étant autrement important au Maroc.
Ce livre permet de découvrir les relations hommes-femmes (on est très très loin de l'égalité ou même du respect).
Kenza va découvrir, lors de ses études à Paris, le racisme anti maghrébin. Fatiha subit les pressions des hommes et doit en gérer les conséquences.
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J'ai aimé ce voyage, vous découvrirez à la fin du récit ce que veut dire le titre (pour moi c'était une découverte).
Un petit bémol : j'aurais préféré rester plus souvent et plus longtemps avec Fatiha, Kenza ayant un côté "pauvre petite fille riche" exaspérant.
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Petit message pour les éditions JC Lattès : "collocation" et "colocation" sont des mots différents. Ici il aurait fallu écrire "colocation" pour désigner les deux jeunes filles vivant ensemble. le même mot avec deux "l" a un sens complètement différent, du droit pur. J'avoue, les fautes, dans un bouquin, ça m'exaspère et là pour le coup j'ai souvent eu droit à "collocation".
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2011, c'était hier, ce peut être encore aujourd'hui dans ce pays où les rêves qui germent dans un corps féminin ont tant de mal à trouver place dans une réalité injuste et cruelle. Ce premier roman de Zineb Mekouar, aux chapitres courts, à l'écriture fluide et pleine de vivacité, fait vivre deux jeunes Marocaines, deux femmes issues de deux milieux différents puisque l'une, Kenza, est la petite-fille de l'ancien gouverneur de Casablanca alors que l'autre, Fatiha, est la fille de la bonne au service de la famille bourgeoise. Notre rencontre, à Casablanca, avec ces deux destins émouvants se fait en plein désarroi, pour l'une comme pour l'autre.

En cette fin d'année 2011, Fatiha a fait confiance à Soufiane, à ses promesses. Il lui faut maintenant supporter la lâcheté et la cruauté de l'homme qui promet, prend son plaisir puis argue que ses parents n'accepteront pas qu'il se marie avec une Fatiha qui n'est plus vierge ! Sofiane se défile, en toute légitimité pour un homme qui se doit de respecter les données de sa religion, et Fatiha va voir une voyante pour faire passer l'enfant.
Kenza, son passeport vert qui la remplit d'amertume à la main, quitte la France et revient à Casablanca avec le regret de ne pas être Européenne, libre. Elle rentre chez elle où l'attendent son grand-père et Milouda, la mère de Fatiha. Ses parents sont décédés il y a bien longtemps et sa grand-mère, sa Mamizou qu'elle adorait, n'est plus là non plus pour lui insuffler optimisme et amour. Dans ses pensées, qu'elle désire refouler, les images de sa vie avec Alexandre.

Entre présent, enfance puis jeunesse, Fatiha et Kenza nous montrent la place qu'elles occupent au Maroc, dans une société qui détermine leur chemin éducatif et professionnel, leurs droits ou plutôt leur absence de droits, leur obligation à garder leur virginité jusqu'au mariage donc leur interdiction d'avoir des rapports alors que les hommes les harcèlent.

Dans leur enfance, main dans la main pour s'endormir, elles étaient déjà sur deux échelons différents de l'échelle, Kenza dans son lit et Fatiha, au pied de celle-ci, sur une couche de fortune. Elles se sentaient, se voulaient comme deux soeurs. Dans leurs jeux, elles étaient soeurs car l'enfance tente de cacher ce qu'elles voyaient, ce qu'elles ressentaient, ce qu'elles comprenaient déjà sans le vouloir. Elles ne fréquentaient pas les mêmes écoles, leurs amies respectives les éloignaient l'une de l'autre, laissant la jalousie traîner dans le sillon de leurs vies.
Leur amitié, distendue par moments, resserrée à d'autres, s'accorde avec réalisme à ce que l'on peut imaginer dans leurs univers si éloignés l'un de l'autre. La France, pourtant loin d'être une terre d'accueil irréprochable, creuse aussi le fossé entre Kenza partie y faire ses études et Fatiha restée au Maroc. Leurs regards diffèrent, l'amour s'en mêle aussi…

Du Maroc, j'ai appris les langues utilisées, les difficultés à apprendre l'arabe classique tandis que de multiples images du pays se dégagent de ce petit roman : les youyous, les tajines, la traditionnelle fête de l'Aïd-el-Kebir et son mouton sacrifié, les volets fermés à la mort d'Hassan II. Quelques incursions politiques, des visions différentes du ramadan. L'exécrable lenteur des droits des femmes qui se heurtent à la politique et la religion.

Vers la fin de cette lecture, le titre, qui m'a intriguée, fait une apparition remarquée et attendrissante. Un joli point supplémentaire pour découvrir ce beau roman.
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Dans leur pays, au Maroc, un monde les sépare. Les chances ne seront pas les mêmes. Kenza ira en France et fera des études, Fatiha restera au pays. L'une est fille de bonne famille, l'autre enfant de domestique. Elles auront beau grandir ensemble, étreindre leurs mains, rire en cachette, les traditions s'imposent ramenant à sa place celle qui oserait rêver. L'enfance s'abandonne, l'hypocrisie contient.

On compose : l'amour, le sexe, on s'en fait des guirlandes. Par derrière.

« La poule et son cumin » évoque le Maroc et tout ce qui se tait entre le dialecte classique et celui des mots de tous les jours. Un univers tiraillé entre les aspirations et les conventions, la liberté et la culture. On ment tant que l'honneur reste sauf. Faudra-t-il alors rafistoler l'hymen pour plier aux lois d'un monde archaïque et hypocrite ? Parce qu'au fond, occident ou orient, les pulsions sont les mêmes, tout comme l'amour ou l'amitié, les histoires de faiblesse et de vie à croquer.

Choc générationnel collé aux coutumes, ce roman évoque le désir de s'émanciper et la chute face aux promesses non tenues de la France. La matière grise s'est étiolée : Sciences Po, Normale Sup ou Polytech., ils se sont défoncés, ont été diplômés et puis ont reçu, dans les regards et dans les mots, la couleur de leur origine.

Roman juste et poignant, extrêmement intéressant et bien écrit, « La poule et son cumin » est finaliste du prix Goncourt du premier roman et j'espère de tout coeur qu'il en sera lauréat parce qu'il le mérite. Passionnant, il ne s'embarrasse pas de faux semblants et livre un texte abouti qui ne peut laisser indifférent.

Une lecture à ne surtout pas bouder.
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Une très bonne surprise ce petit roman que j'ai dévoré en peu de temps. Kenza et Fatiha sont élevées ensemble au Maroc, même si l'une est issue d'une famille aisée et la seconde, fille de la domestique. Kenza ira faire de brillantes études en France alors que son amie reste au Maroc où elle sera infirmière. Toutes les deux cherchent l'amour mais tomberont sur des hommes égoïstes qui pensent d'abord à leur plaisir. le roman les suit sur plusieurs années. Ce roman nous permet de connaître les traditions marocaines, le patriarcat et la difficulté pour les femmes de s'émanciper, en conciliant modernité et respect des traditions familiales. de beaux personnages de femmes, touchantes. Un très bon moment de lecture. J'attends avec impatience le second roman de cette auteure qui promet.
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Kenza, orpheline élevée par ses grands parents au sein d'une famille riche et reconnue de Casablanca, et Fatiha, la fille de la bonne, grandissent comme deux soeurs, partageant la même chambre et les mêmes jeux. Mais arrivées à l'adolescence, leurs destins se séparent peu à peu sous l'influence de leurs mondes respectifs. Dans un Maroc gangrené par le poids des traditions et d'un système politique corrompu, où la femme est si peu de choses, chacune essaiera de trouver sa place, chacune à sa manière sera confrontée à des épreuves pour essayer de vivre libre.

Coup de coeur absolu pour La poule et son cumin, roman d'une jeune autrice marocaine vivant maintenant en France. J'ai lu ce roman en une soirée, impossible de le lâcher une fois commencé. Pour un premier roman, l'autrice maîtrise totalement son sujet, son récit et l'art de nous faire partager les sentiments de ses personnages. Tout commence assez classiquement, dans un monde relativement protégé derrière les grilles de la belle propriété des grands parents de Kenza avec ces 2 gamines qui ne viennent pas du même monde mais sont malgré tout amies dans toute l'innocence de l'enfance. On pressent que cette innocence sera vite balayée et le roman ne nous donne pas tort sur ce point, l'adolescence arrive et dans un pays aussi inégalitaire, attaché aux traditions et corrompu que le Maroc, il est impensable qu'une fille de bonne puisse avoir le même destin qu'une fille aisée de la bonne bourgeoisie locale. Mais là où l'autrice donne une dimension beaucoup plus universelle à son roman c'est qu'elle entrelace le destin (forcément sombre) de Fatiha avec celui de Kenza. Kenza, la gamine privilégiée, la francophile, la cultivée, celle qui a été nourrie par ses grands parents de littérature, de chanson française comme de rythmes marocains, Kenza qui vient d'une famille reconnue (descendants directs de Mahomet) et dont le grand père a pourtant été écarté du jour au lendemain du pouvoir par le roi, Kenza qui comme tous les jeunes issus de la bourgeoisie locale va partir étudier dans les meilleures écoles françaises (Science Po pour elle).

En France, Kenza découvrira la vie réelle que mènent ces Marocains pauvres immigrés si fiers de rentrer au pays chaque été. Elle découvrira aussi que loin de son pays natale les classes sociales locales ne s'appliquent plus : pour certains français elle est juste "une Arabe", une pas d'ici, une immigrée de plus. Mais en France Kenza découvrira surtout qu'on peut vivre autrement, qu'une femme peut être libre et mener la vie de son choix, loin des conventions, des carcans sociaux et religieux qu'on lui imposait jusqu'ici. Et puis son rêve s'écroulera, comme ceux avant elle de Fatiha, deux jeunes femmes, c'est à dire pas grand chose dans ce pays patriarcal où les pères, les frères, les maris décideront toujours de leur vie avant elles.

En peu de pages et un récit toujours fluide dans une langue magnifique, Zineb Mekouar nous dit plus sur le Maroc et sa relation complexe avec la France que bien des essais sur ce pays, sur l'immigration ou sur le racisme. La poule et son cumin ce sont de nombreuses scènes totalement bouleversantes, on ressent l'injustice, on ne peut être que totalement révolté face au sort réservé à ces jeunes femmes que ce soit d'ailleurs par le Maroc ou par la France. L'autrice ne cherche pas la polémique, ne se lance pas dans de grandes analyses, elle se contente de décrire une société, deux pays la France et le Maroc dont les destins ont été liés pour le meilleur et pour le pire. Malgré la noirceur de certains passages, c'est un livre qui nous offre aussi de beaux moments de poésie, qui nous donne le goût d'un pays, de ses paysages, de son histoire si riche, je connaissais très peu le Maroc et j'ai terminé ce roman en rêvant de le découvrir malgré toutes ses contradictions. Et puis surtout La poule et le cumin ce sont de magnifiques portraits de femmes : Maminou, la grand mère de Kenza qui l'a élevée, une femme exceptionnelle malgré les contraintes encore plus rudes qu'imposait la société de son époque, Fatiha qui affronte courageusement et avec fatalisme son destin et Kenza, la solaire Kenza, cette jeune femme libre qui ne cesse de lutter et qui semble représenter l'avenir du Maroc.

Grand, énorme coup de coeur pour ce roman magnifiquement intelligent et humain qui démonte un à un tous les clichés pour nous faire partager une petite tranche de vies de personnages qu'on aimerait serrer dans nos bras. A découvrir, à faire découvrir, à partager, j'aimerais tant qu'il ait le succès qu'il mérite !
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Deux jeunes filles au Maroc, deux trajectoires différentes. A travers ce premier roman plutôt réussi, Zineb Mekkouar nous parle du Maroc d'aujourd'hui, de ses relations, ambigües, avec la France, par le biais de deux jeunes filles que tout oppose, et qui tracent leur parcours comme elles le peuvent, avec les cartes qui leur ont été données à la naissance.

Kenza et Fatiha se connaissent depuis l'enfance. Kenza vient d'un milieu aisé, elle habite avec ses grands-parents qui l'élèvent, depuis la mort accidentelle de ses parents, dans une certaine opulence, le grand-père ayant été un haut fonctionnaire au palais de Mohammed V. Fatiha, quant à elle, est la fille de la gouvernante de la maison. Par conséquent, même si elles s'aiment – ou veulent s'aimer – comme des soeurs, leur relation n'en sera pas moins marquée par leur différence de niveau social qui viendra de plus en plus s'interposer au fil des années et de leur parcours. En effet, les différences de classes sociales sont encore bien visibles et vivaces au Maroc entre les années 1990 et 2010, si bien que Kenza et Fatiha ne lutteront jamais à armes égales, car la plupart du temps, la naissance conditionne la vie des Marocains et leurs possibilités…

Le fossé entre Kenza et Fatiha se creusera ainsi encore plus quand la première partira faire ses études en France, la « voie royale » pour revenir par la suite au Maroc faire une carrière prestigieuse. Kenza découvrira la liberté en France, et pourra vivre dans cette modernité qui n'existe qu'en apparence dans son pays, voudra s'intégrer dans ce pays auquel elle se sent appartenir, par ses idées comme son comportement. Mais la donne n'est pas la même en France, et les désillusions seront nombreuses pour cette jeune femme habituée à se comporter en princesse…

Si la première partie de ce roman, composé en chapitres alternant histoire actuelle et flashbacks (pourquoi Kenza est-elle de retour en France ? Qu'est-ce qui s'est passé pour que Fatiha et Kenza se soient autant éloignées ?), montre nos deux héroïnes en difficulté, pour des raisons différentes, et se concentre sur leur enfance au Maroc, montrant ainsi les inégalités sociales (et sexuelles, quelle misère…) qui y ont cours, la difficile séparation entre religion et politique, la deuxième partie, qui raconte prioritairement le parcours de Kenza en France, est intéressant également en ce qu'il montre la relation ambigüe qu'entretient la France avec le Maroc, son ancienne colonie, via le personnage de Kenza, d'une part, mais aussi du jeune Rayan et de ses parents, arrivés en France grâce aux grands-parents de cette dernière : les élites marocaines sont ainsi biberonnées à l'histoire de France pendant toutes leurs études, mais ne sont pas forcément bien accueillies si elles viennent poursuivre l'idéal républicain en France, en tout cas aussi peu que les enfants nés en France de ressortissants marocains. Elle montre aussi que la séparation État/religion en vigueur en France, reste poreuse pour les personnes musulmanes, même quand elles souhaitent être discrètes quand, comme Kenza, elles arrivent dans le pays (« Mamie, je voulais rester neutre. Ne pas choisir de clan. Ne pas décider ce que je pensais du voile, de leur islam, de leurs banlieues. Mon prénom, mon origine, ce sang qui coule en moi. L'Histoire m'embarque malgré moi. On a choisi pour moi et je fais partie des autres. Je ne l'aurais jamais cru. Pourquoi voulait-on que j'aime la France, dès mon plus jeune âge, si on me dit de m'en aller ? Et pourquoi ne fait-on pas aimer la République à celles et ceux qui y naissent ? Tant de choses ne tournent pas rond. […] Je vais retourner au Maroc et tout se mélange. La chaleur de mon enfance, mon arrivée ici, les personnes nées en France, mais qui ne rêvent que de la quitter, les amoureux de cette culture qui sont obligés de s'en aller, la diabolisation de l'islam, les nouveaux convertis qui m'angoissent, Rayan qui pense faire peur au monde et qui a raison cette double culture qui n'entre dans aucune de leurs cases. La France manque de voyages, par la route ou par les mots. Et le Maroc. Ce Maroc que j'aime tant, où il reste tant à faire. J'ai peur d'y retourner, d'y vivre. Je veux qu'on me laisse penser comme je veux. Croire si je veux. Sans me cacher pour manger, boire, faire l'amour. Sans subir un cadre dépassé. le monde est si grand, les pays si nombreux, mais je ne me sens chez moi qu'à travers les lettres que je t'écris. Ce sont ces pages, ma vraie patrie »).

Comme je l'ai écrit en introduction, « La poule et son cumin » est le premier roman de Zineb Mekouar, et il est réussi en ce qu'il montre deux réalités différentes pour deux personnages féminins aussi forts l'un que l'autre dans les épreuves qu'elles traversent. Mention spéciale aussi pour la relation particulière qu'entretient Kenza et ses grands-parents, et surtout sa grand-mère, personnage plein de douceur qui sera un véritable pilier pour sa petite-fille dans sa vie d'adulte. Un beau premier roman.
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Le premier roman de Zineb Mekouar, La poule et son cumin, se termine de manière quelque peu brutale, nous laissant simplement deviner ce qu'il adviendra de ses deux héroïnes, alors que leur vie ne fait (presque) que commencer. Ce petit reproche est somme toute le seul que l'on peut faire à ce récit qui se distingue par la souplesse et la clarté de sa langue ainsi que par son habileté à manier les temporalités et à entrecroiser les vies de ses deux personnages majeurs, à savoir Kenza et Fatiha, l'une issue de la bonne société de Casablanca, promise aux plus hautes études à Paris et l'autre, la fille de sa nourrice, qui ne peut que compter que sur elle-même pour évoluer dans une société marocaine qui évolue à pas comptés. Déterminisme social, écart de classes, émancipation féminine et arrogance masculine : la romancière a voulu mettre beaucoup dans La poule et son cumin, à l'aune de sa propre expérience, ce qui, dans de nombreux cas, constitue un travers commun aux premiers ouvrages. Mais chez Zineb Mekouar, cette somme d'ingrédients ne pèse pas, au contraire, et participe au plaisir pris devant une narration rapide et aiguisée qui laisse la plus grande place à la sensibilité des portraits, ceux de Kenza et de Fatiha, mais aussi ceux de nombreux "seconds rôles", décrits avec une profonde finesse. En résulte un roman très rythmé, qui varie les tonalités et nous attache durablement à ces jeunes marocaines dont l'avenir s'inscrit dans celui d'un pays dont les mutations sociales sont loin d'être achevées.
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Ce roman apporte un bel éclairage sur le Maroc d'aujourd'hui au travers du regard de deux jeunes femmes, deux amies d'enfance. La première, Kenza, grandit dans un milieu privilégié, étudie au Lycée français au milieu d'autres enfants de bonne famille. Fatiha est la fille de la servante de la famille et, bien qu'elle grandisse aux côtés de Kenza et partage ses jeux, elle reste avant tout au service de la famille. C'est donc une amitié sincère mais fondée sur un déséquilibre, un fossé qui se creuse au fil des ans. La bulle de Kenza éclate quand elle part étudier en France. Là-bas, elle est ramenée à son statut de "maghrébine" qui se voit refuser le droit de travailler une fois achevée ses brillantes études. J'ai beaucoup aimé l'écriture de Zineb Mekouar et la façon très juste dont elle parle de la situation des femmes dans une société à deux vitesses où les pauvres subissent le harcèlement permanent des hommes, se voient refuser le droit à avorter ou d'avoir une relation hors mariage.
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