Les villes ne furent plus que des flaques de verre entourées de vastes étendues de décombres. Des nations avaient disparues de la surface de la terre, le sol était jonché de cadavres d'hommes et de bétail , et toutes les bêtes sauvages , et les oiseaux dans les airs et tout ce qui qui nageait dans les fleuves ,rampait dans l'herbe , creusait des trous ,gisait aussi sur terre ; ils avaient tous péri ...
Le frère bibliothécaire gémit tandis qu'on roulait hors de la cave un autre tonneau plombé. Le fait que le savant séculier ait, en deux jours, éclairé une énigme complète pendant douze siècles n'était pas de nature à impressionner Armbruster. Aux yeux du gardien des Memorabilia, ouvrir ces tonneaux équivalait à diminuer la durée probable d'existence de leur contenu et il ne fit pas le moindre effort pour cacher sa désapprobation. Pour le frère bibliothécaire, dont la tâche en ce monde était de conserver les livres, la principale raison d'être de ces livres résidait dans leur conservation perpétuelle. S'en servir était secondaire, il valait mieux éviter de le faire car cela menaçait leur longévité.
Le père Cheroki, revêtu de son étole, regardait le pénitent agenouillé de profil devant lui sous le soleil brûlant dans l'immense désert. Il se demandait comment ce jeune homme (pas particulièrement intelligent d'après ce qu'il en savait) avait bien pu s'arranger pour trouver des occasions de péché, alors qu'il se trouvait complètement seul dans un désert stérile, loin de toutes distractions, de toute source apparente de tentations. Un jeune homme ne pouvait pas faire grand-chose de mal dans ce coin-là, armé seulement d'un rosaire, d'une pierre à briquet, d'un canif et d'un livre de prières. C'était en tout cas ce que croyait le père Cheroki.
Le soleil brulant ,envoyait sa malédiction de midi sur la terre desséchée, jetait l’anathème sur toutes choses humaines.
c'était le temps et non plus l'homme qui effaçait désormais la croisée des chemins.
Pendant un instant, dans l'esprit du novice quelque peu égaré par le soleil, le pèlerin s'était confondu avec Satan.
Mais dans ce sombre océan des siècles où rien ne semblait s‘écouler, une vie n‘était qu‘un infime remous, même pour l‘homme qui la vivait.
On disait que Dieu, pour mettre à l'épreuve l'humanité devenue aussi orgueilleuse qu'au temps de Noé, avait ordonné aux sages de l'époque, [...] de construire de grandes machines de guerre, [...] des armes d'une telle puissance qu'elles contenaient le feu même de l'Enfer. Et Dieu avait permis que ces mages plaçassent ces armes entre les mains des princes, en leur disant: "Nous n'avons construit cela pour vous que parce que les ennemis ont eux aussi de telles machines et pour qu'ils sachent que vous les avez et qu'ils aient peur de frapper. [...]
Mais les princes, ne tenant aucun compte des paroles des sages, pensèrent tous: Si je frappe assez vite, et en secret, je détruirai les ennemis dans leur sommeil, personne ne m'attaquera en retour et la terre sera à moi.
Car telle était la folie des princes. Et ce fut le Déluge de Flamme.
Première Partie: Fiat homo. Chapitre 6, page 70.
Il arriva immédiatement à cette conclusion : le ciel venait de lui donner un gage de sa vocation.
Un appel du ciel n’entraînait pas nécessairement la charismata nécessaire pour dompter les bêtes sauvages ou devenir un ami des loups affamés.