Citations sur Les crimes du marquis de Sade, tome 1 : L'affaire Ros.. (37)
Elle est à sa merci, proie nerveuse et paralysée attendant le coup de grâce de l’horrible créature. Elle a peur. Non, elle est terrifiée. Elle ne veut pas que l’inconnu la touche. Elle le lui a dit. Hélas ! Il n’est pas genre à se contenter d’un refus. Lui a-t-on seulement déjà dit non ?
Rose ne voit rien. L’homme lui a placé un traversin sur la tête. Elle se demande pourquoi. Est-ce pour qu’elle ne voie pas ce qu’il va lui faire subir ou simplement pour atténuer les cris qu’elle ne manquera pas de pousser ?
Où est-il ? Aucun moyen de le situer dans cette tanière. Elle ne l’entend pas. Aucun bruit, pas un soupir ni même un souffle. Elle sait juste que la bête est là, quelque part dans cette pièce aux rideaux tirés, habillée simplement d’un gilet sans manches, fesses et sexe gonflé d’envie à l’air. Provocation ultime à sa pudeur de jeune veuve et la promesse d’un acte violent qu’elle redoute plus que tout.
La femme a froid. Allongée sur le ventre, nue, les quatre membres attachés à un lit de repos d’Indienne rouge parsemé de taches blanches, elle frissonne. Une autre corde de chanvre la ceinture. Elle lui fait mal. Lui brûle les chairs même. Il lui faut ne pas bouger pour en atténuer la douleur de l’étreinte.
Il n’avait pas daigné répondre. Le silence était lourd. Une arme facile, à la portée de tous et qui, bien gérée comme elle l’était par cet homme, pouvait faire bien des ravages. Et en effet, Rose se liquéfiait. Lui, n’ayant que peu de considération pour sa compagne de voyage, fit mine de dormir.
- Savez-vous où je vous mène ?
- Comment le saurais je ? Vous ne m’avez point dit et je n’y vois goutte, lui avait elle répondu avec un certain aplomb.
Avec un sourire carnassier, il l’avait fait monter dans un fiacre dont il avait très vite monté les petits volets de bois pour en occulter les glaces. La peur, elle, n’avait que décuplé. La voiture s’ébranla dans un noir d’encre. Pas un mot n’avait été échangé durant le trajet à l’exception d’une fois, environ à mi parcours.
Il était revenu comme il le lui avait dit. Environ une heure après l’avoir laissée dans cette chambre des Halles avec des questions, des doutes et cette peur qui peu à peu l’avait envahie durant ces longues et interminables minutes. Une première torture mentale avant bien d’autres qui ne manqueraient pas de survenir. Avant aussi toutes ces tortures physiques dont elle serait victime. Mais cela, elle ne le savait pas encore.