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sur 1201 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'équilibre du monde nous emmène au coeur de l'Inde des années cinquante, secouée par de violents conflits internes : système de castes toujours présent dans de nombreuses régions, mouvements séparatistes, affrontements entre hindous et musulmans, mise en place de l'état d'urgence.

Au milieu de ce tourbillon, quatre personnages vont bon gré mal gré devoir vivre ensemble pour garder quelques lambeaux de dignité : Dina Dalal, destinée à des études de médecine jusqu'à la mort de son père, et la prise en charge de la famille par son frère, qui la destine à un rôle d'esclave domestique, ou à devenir rapidement l'épouse d'un de ses amis. Elle parvient tout de même à conserver son indépendance, au prix d'un travail acharné ; Maneck, qui vient des montagnes, et a été envoyé à l'université par ses parents, inquiets par la soudaine modernisation de tout le pays, et qui ont bien du mal à s'adapter aux nouvelles règles du jeu ; Et enfin Ishvar et Omprakash, les deux personnages les plus poignants du récit. le père d'Ishvar fait partie de la classe des Intouchables, destiné à travailler le cuir, et a l'interdiction formelle de toucher à quoi que ce soit des plus hautes classes, sous peine de le souiller définitivement. Après une énième injustice, il décide de faire l'inconcevable : ses fils ne travailleront pas le cuir, mais seront tailleurs. Cette transgression aux lois ancestrales lui coûtera toutefois très cher.

Avec l'instauration de l'état de l'état d'urgence, les choses se compliquent encore pour le quatuor. La police a désormais le pouvoir d'arrêter n'importe qui sans procès, et se vend dès lors au plus offrant. Les rafles dans la rue se font de plus en plus nombreuses : pour former des assemblées importantes lors des discours du Premier ministre, pour s'approvisionner en main-d'oeuvre bon marché ou pour des campagnes de stérilisation forcée.

Le récit est dur : si les quatre héros parviennent de temps à autre à être heureux, on sent bien que ce bonheur est précaire, et qu'ils peuvent se retrouver à la rue sans ressource en un rien de temps. Pire encore, il n'y a pas vraiment d'échappatoire : à l'encontre de tout ce qu'on ressent d'habitude quand les héros de roman sont oppressés, on a envie ici qu'ils plient encore plus l'échine, plus vite, sans discuter, pour s'éviter des ennuis futurs.
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En Inde, dans les années cinquante. Dina est une jeune fille indépendante. Avant son mariage, de courte durée, puis pendant son veuvage : "si elle désapprenait à vivre seule, un jour elle le paierait cher". Pour survivre, elle emploie deux tailleurs Om et Ishram. Et loge Maneck, le fils d'une amie, étudiant. Om et Ishram, issus de la caste des cordonniers ont échappé à cette destinée par la volonté du père d'Ishram, refusant d'offrir à ses fils cette vie de misère et d'humiliation . Ishram s'en sort mais son frère payera de sa vie son insistance pour faire appliquer la loi qui l'autorise à voter. de sa vie et de celle de toute de famille, à l'exception de son fils Om alors absent. Oncle et neveu tentent leur chance dans une grande ville. Et sont embauchés chez Dina. Les conditions de vie des deux hommes sont épouvantables, et le malheur les poursuit sans relâche. Cependant des liens vont se tisser dans la petite communauté hébergée par Dina, renforcés par les difficultés qu'elle même rencontre pour survivre.

Plongé en plein coeur de cette survie quotidienne des miséreux, alors l'abolition du système des castes n'existe que dans les textes des lois, le lecteur est happé par l'exposé réaliste des absurdités de cette société. Totalement enchaînés par des coutumes ancestrales, peu ont la volonté et la lucidité de se révolter pour s'en sortir, d'où le risque de simplement de faire éliminer. le maintien des profondes inégalités n'est pas uniquement le fait des privilégiés : on le ressent dans le roman dans les attitudes de soumission des deux tailleurs qui sont sensées être celle de leur caste.

L'exposé des conditions de vie des mendiants, dont la perte d'autonomie les font entrer dans un système pourri de protection payante est odieux. À l'époque où se déroule les faits, le gouvernement a de plus lancé une grande entreprise d'"embellissement" de la ville, c'est à dire de destruction des bidonvilles et de réquisitions de sans abris pour des travaux forcés inhumains. Et c'est la tout le problème, la valeur de la vie humaine semble être extrêmement aléatoire, et marchandable pour le profit de quelques-uns.

Magnifique récit témoignant des conditions de vie aberrantes dans ce pays à la dérive, pour lequel on se demande par quel miracle ou quel drame les choses pourraient changer
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A quoi donc renvoie le titre de ce roman de Rohinton Mistry ? L'équilibre du monde (A fine balance pour le titre original) tel que nous le présente l'auteur, fait référence à la culture hindoue où le système immémorial des castes prime sur toute la société. En Inde où le destin de chaque personne est lié à son karma (कर्म), l'on nait brahmane ou intouchable et il faut l'accepter...

L'histoire se passe entre les années 1970 et 1980. Alors que l'Inde est la proie de tensions entre mouvement centraliste et mouvement séparatiste, l'état d'urgence est proclamé par Indira Gandhi alors premier ministre (1971-1977). Les libertés publiques sont suspendues car la situation économique est désastreuse. Corruption et injustice règnent. de nouvelles vocations se créent : facilitateur, contrôleur des bidonvilles (jodhpadpattis : झोपड़पट्टी), incitateur... Derrière ces noms de métiers se cachent des missions aussi affreuses les unes que les autres. Les gens subissent de force des vasectomies (nussbandhi : शुक्रवाहिकोच्छेदन) dans les planning familiaux destinés à contrôler les naissances ou arrêtés et tabassés de façon arbitraire. Des programmes d'embellissement de la ville imposent la destruction intempestive des taudis. Dans le dédale de la grande ville indienne (Bombay ou Mumbai) où les bidonvilles sont légion, la protection du Maître des mendiants est considérée comme une véritable bénédiction...


C'est dans ce climat politique et économique difficile qu'évoluent les protagonistes de l'histoire. Issus de classes sociales différentes, Ishvar, Om, Maneck et Dina (pour les principaux personnages) n'auraient jamais dû se rencontrer et pourtant : leurs destins irrémédiablement liés, les mènera à une cohabitation des plus improbables. Pour l'oncle et son neveu (Ishvar et Om sont originellement intouchables) qui viennent travailler comme couturiers chez Dina Dalal (parsi), le séjour en ville est censé être temporaire. de même pour Maneck (parsi) qui vient étudier en ville et qui loge chez Dina pendant son année d'études. Dénominateur commun entre les couturiers et l'étudiant, Dina est elle-même une femme meurtrie par son histoire. le patchwork qu'elle confectionne à partir de petits bouts de tissus tout au long du récit raconte leurs destins croisés. Comme si l'auteur voulait montrer que L'équilibre du monde ne tenait qu'à des bouts de tissus disparates rassemblés selon des codes incompréhensibles...

Fidèle à ma relative connaissance de l'Inde contemporaine, ce récit qui montre un envers du décor des plus réalistes, m'a bouleversée, émue, révoltée : l'hindhouisme, cette tradition ancienne fondée sur des concepts philosophiques, imprègne l'écriture de Rohinton Mistry. L'on découvre tout au long du roman des détails surprenants de la vie quotidienne des indiens et l'on ose y croire : c'est pourtant une réalité que l'auteur s'est donné pour mission de retranscrire dans L'équilibre du monde. Plus qu'un roman, ce livre est un poignant témoignage de l'histoire de l'Inde. Et l'on suppose une fin tragique mais l'on ne se résoud pas à renfermer le livre avant de l'avoir terminé. Si c'est un gros pavé de 890 p., pour ceux qui s'intéressent à cette partie du monde, je ne peux que le recommander. Il est passionnant.
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Enfin un roman sur l'Inde moderne écrit par un enfant du pays, et non un Occidental. L'équilibre du monde, c'est une fresque sur ce pays fascinant et pourtant si mal connu qui se déroule dans les années 1970-1980.

C'est réaliste, cru et terriblement humain. On est très loin des images d'Epinal des hippies baba-cool, des ashrams de yoga pour cinquantenaires cherchant à renforcer leur énergie vitale, ou encore des touristes amateurs d'acrobaties sexuelles tirées du Kamasutra.

Non ici on pénètre en plein coeur de l'Inde, avec ses paradoxes de modernité dans l'une des civilisations les plus vieilles au monde, son féodalisme dans les campagnes, sa corruption omniprésente, sa gestion très contestable de la pauvreté et de la surpopulation, ses émeutes raciales, ses fondamentalistes hindous, ses mafias de mendiants, …

Et toujours, toujours cet incroyable optimisme, en dépit de tout. L'Inde ce pays dont la devise pourrait être « Tout s'effondre et se reconstruit, joyeux est celui qui reconstruit » (Yeats).
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Avec "L'équilibre du monde" se pose la question épineuse suivante : peut-on apprécier un roman qui vous donne la nausée ?

Cette fresque chronologique de presque mille pages décrit une Inde des années 60 à 80 si violente, si noire, si terrifiante et si nauséabonde que plusieurs chapitres sont tout simplement insoutenables d'inhumanité. Et le fait d'être ici dans la chronique plus que dans la fiction n'arrange rien au malaise, tout comme la pensée que le portrait de cette Inde n'est sans doute hélas pas si éloigné de celui de l'Inde actuelle.

Rohinton Mistry est un maître-conteur. Né à Bombay, il connaît son sujet à fond et bien qu'ayant émigré au Canada et y vivant depuis de longues années, il explore ses racines et maîtrise les différents aspects de la culture indienne, cette nation-continent aux multiples identités.

Alors, pour revenir à mon interrogation première, oui, on peut apprécier un récit même s'il donne mal au coeur et à l'estomac. Déjà par la qualité littéraire de son traitement : style, rythme, personnages, recherches, lexique... Ensuite par l'éclairage cru et brutal mais vrai qu'il nous donne sur une période, un peuple, une culture qui nous sont peu familiers. Pour aussi pénibles que soient les sujets abordés à travers les existences de Dina, jeune veuve, de Maneck, étudiant, d'Ishvar et d'Omprakash, tailleurs issus de la caste Intouchable, et de Shankar, cul-de-jatte exploité comme mendiant, il est fondamental d'en prendre connaissance et de regarder la réalité en face, même au prix d'un écoeurement et d'un désespoir infinis.

Enfin, impossible de ne pas penser à "La tresse" de Laëtitia Colombani en lisant ce roman puisqu'il y est beaucoup question du trafic de cheveux mais comme ce modeste et récent best-seller semble bien fade et creux en comparaison du riche et coloré "Equilibre du monde" ! L'Inde est un sujet si dense qu'il mérite bien qu'on l'approfondisse, quelles que soient la souffrance et l'absurdité qui résultent de cette étude. Rester à la surface des choses équivaudrait à gravir seulement la partie émergée de ce brûlant iceberg.


Challenge MULTI-DEFIS 2019
Challenge BBC
Challenge PAVES 2019
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Pépite ! L'auteur, que je découvre, relate les destins de quatre personnes qui vont s'unir et tenter de vivre au mieux dans un pays où le gouvernement maltraite, torture ses citoyens au nom de faux prétextes économiques et politiques. Un livre d'une dureté implacable pour illustrer des faits réels qui se sont déroulés en Inde et sous le gouvernement d'Indira Gandhi. Malgré l'aspect horrifique, j'ai été touchée, émue par ces quatre destins voués au malheur et qui luttent sans cesse pour un semblant de vie. Un livre qui m'a marqué.
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Récit de la vie quotidienne en Inde dans les années 70, ce roman va suivre la destinée de 4 personnages principaux (une femme, 2 tailleurs et un étudiant) avec en toile de fond le mode de gouvernement d'un ministre tyrannique qui veut faire plier son peuple.
C'est réaliste, pessimiste et poignant.
Le destin terrible des 4 protagonistes et des personnages secondaires, leurs efforts, leur acharnement pour survivre malgré tout les rendent attachants.
C'est tragique, brutal, cruel avec quelques lueurs de tendresse, de soutien et de solidarité.
La plume de l'auteur rend parfaitement les odeurs, la promiscuité, les bruits, le système des castes et la violence.
Malgré l'épaisseur du volume, il n'y a aucune longueur dans ce roman bouleversant.
L'équilibre du monde est un équilibre entre l'espoir et le désespoir ; quand on tourne la dernière page, il n'y a aucune ambigüité de quel côté penche la balance.
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C'est en 1975 à Bombay, lorsque Indira Gandhi décrète l'Etat d'urgence, que quatre destinées radicalement différentes se rejoignent dans l'appartement de Dina Dalal, jolie veuve d'une quarantaine d'années laissée dans la misère par la mort de son mari. Sa seule ressource: le modeste appartement conjugal... qu'elle transformera en atelier de confection avec l'aide de deux tailleurs intouchables, en y ajoutant un hôte payant, jeune étudiant qui en quittant son père, règle froidement un conflit de générations. L'effroyable histoire des deux tailleurs intouchables soulève le gravissime problème des castes en Inde. Quatre personnages qui apprennent t à se connaître, à cohabiter, malgré leurs différences de caste, d'âge, de classe, de religion, pendant qu'au dehors l'Etat d'urgence fait rage avec le massacre des opposants et le scandale des stérilisations forcées. Outre l'étude des caractères, les tragédies personnelles et politiques, une multitude de silhouettes et d'aventures cocasses ou dramatiques animent cette fresque grouillante d'humanité, qui couvre avec humour et tendresse huit ans de vie contemporaine en Inde.Un magnifique roman-fleuve dans lequel l'auteur fait se croiser les parcours de ses personnages avec un art consommé du récit. Un grand roman de l'Inde où s'incarnent toute la souffrance, l'absurdité, mais aussi la beauté d'un pays. On en reste abasourdi et bouleversé !!!
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Superbe saga à la fois burlesque et dramatique ayant pour cadre et, peut-être, pour thème central, un pays qui m'est cher : l'Inde.

Certaines péripéties sembleront peu plausibles et certains personnages chimériques mais la réalité de l'Inde est souvent incroyablement effroyable et fabuleuse.

La trame romanesque m'a évidement emporté mais ne saurait, à elle seule, justifier l'émotion suscitée chez moi par cette lecture.

Ce charme supplémentaire émane de la richesse et de la justesse des détails de la vie quotidienne, des rues, des transports, des vêtements, de la nourriture, qui agissent sur moi comme l'auto-focus d'une camera, faisant resurgir, intacts et nets, des souvenirs qui gisaient dans ma mémoire, vagues réminiscences de mes pérégrinations en Inde dans les années 80.

Il me semble d'ailleurs de plus en plus souvent ressentir, et rechercher sans doute, dans mes lectures cette sorte de mélancolie que l'on appelle "saudade" au Brésil. L'ayant partagée ici à plusieurs reprises, j'espère, ce faisant, ne pas avoir lassé l'éventuel lecteur.

Je sais ce roman déjà largement plébiscité ici, mon propos, quelque peu nombriliste, n'a pas vocation à convertir les récalcitrants, je venais simplement saluer le travail de l'auteur et peut-être apporter modestement mon obole à "L'équilibre du monde".
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L'équilibre du monde
Rohinton MISTRY

Dans l'Inde des années 70 à 80 nous allons suivre les destinées de plusieurs personnages liés les uns aux autres par les hasards de la vie.
Ischvar et Omprakash (dit Om) sont un oncle et son neveu tanneurs de la caste des intouchables.
Mais grâce à la bienveillance,la clairvoyance et le courage de leur entourage ils vont être formés au métier de tailleur par un ami de la famille en ville. Métier réservé aux castes supérieures.
Forts de cette expérience ils doivent rejoindre la grande ville pour essayer de trouver des emplois.
Chose très difficile qu'ils ne trouveront qu'au bout de plusieurs mois dans un logement à l'activité de couture clandestine.
C'est Dina Salal, une jeune veuve, qui va donc accueillir (très froidement) les deux hommes qui ne sont pas de sa caste et qu'elle considère tout juste comme des employés.
Lors du voyage en train ils vont faire la connaissance de Maneck,un jeune étudiant universitaire qui sera logé contre rémunération chez Dina (son hôte payant) une ancienne camarade de classe de sa maman.
Le quatuor va se mettre en place et s'apprivoiser petit à petit.
Entre petits espoirs et grands désespoirs.
Dans la pauvreté, la saleté, la dangerosité et la corruption de l'Inde telle qu'elle était à l'époque.

Un grand roman sur l'Inde, son peuple, sa politique, sa violence, ses odeurs, ses coutumes et ses contradictions.
J'ai beaucoup aimé la destinée de ces personnages hauts en couleurs et fragilités.
On s'attache énormément à eux, on a tellement envie qu'ils s'en sortent !
Je quitte là des personnes auxquelles je penserai encore longtemps...
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