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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
En 1975, en Inde, dans un train, se trouvent trois personnages, Ishvar Darji, tailleur, Omprakash Darji, dit Om, tailleur lui aussi, son neveu, et Maneck Kohlah, un jeune étudiant. Une accélération impromptue du train provoque une chute des livres que transporte Maneck sur Om ; les trois personnages font ainsi connaissance. Ils se rendent compte qu'ils vont exactement au même endroit, chez Mrs Dina Dalal. Les tailleurs vont y travailler car elle vient de créer une petite entreprise de couture, tandis que Maneck sera un hôte payant. En effet, Dina, malgré un frère riche et prospère, manque d'argent et veut conserver son indépendance. Ensuite, on va remonter le temps dans les premières années de l'indépendance de l'Inde, à la fin des années quarante et au début des années cinquante, pour observer les jeunes années de Dina en ville ainsi que celles d'Ishvar, dans un village pauvre à l'écart des métropoles. ● C'est une fresque fascinante, très romanesque et aussi très réaliste, qui porte à la fois sur un pays et sur trois familles : les Darji, les Schroff-Dalal et les Kohlah. On y voit combien le système des castes, au moins dans les campagnes, autorisait tous les abus de pouvoir des hautes castes, sous prétexte de l'« équilibre du monde » : une place pour chacun et chacun à sa place. ● Mais « l'équilibre » du titre reçoit d'autres définitions dans le roman, comme : « ‘ Il faut parfois utiliser ses échecs comme marchepieds vers le succès. Maintenir un bon équilibre entre l'espoir et le désespoir. ' Il s'arrêta, considérant ce qu'il venait de dire. ‘ Oui, répéta-t-il. Au bout du compte, tout est une question d'équilibre.' » ● On se rend compte aussi de l'autoritarisme du régime indien sous le gouvernement d'Indira Gandhi (dont j'avais pourtant une image plutôt positive), et tout spécialement sous l'état d'urgence et le « MSI » (Maintien de la Sécurité Intérieure) des années 1975-1977, qu'elle décréta pour être en mesure de conserver le pouvoir. Cet état d'urgence a autorisé tous les abus, toutes les corruptions, toutes les violences. ● La première ministre est ridiculisée dans les meetings qu'elle tient en forçant des milliers de pauvres hères à y assister pour faire nombre. ● le roman montre avec brio la vie des « gens ordinaires » broyée à la fois par les hautes castes et par le gouvernement, la police et tous leurs affidés. C'est ainsi par exemple que sous prétexte de limiter la population, des stérilisations forcées furent réalisées à grande échelle, ou encore, sous prétexte de l'embellissement des villes, on démolit les bidonvilles à tour de bras et sans préavis, jetant leurs habitants dans la rue du jour au lendemain. « Tu ne comprends donc pas ? Pour eux, nous sommes moins que des animaux. » ● Une ironie féroce est parfois utilisée par l'auteur : « Certaines blessures sont si banales que ça ne marche plus. Par exemple, arracher les yeux d'un bébé ne rapporte plus automatiquement d'argent. Des mendiants aveugles, il y en a partout. Mais aveugle, avec les orbites vides, des trous à la place des yeux et un nez coupé – pour ça, n'importe qui paye. Les maladies aussi, c'est pas mal. Une grosse tumeur sur le cou ou la figure, d'où suinte du pus jaune, ça marche très bien. » ● J'ai appris beaucoup de choses que j'ignorais sur cette période dans ce pays. Mais le livre n'est pas didactique, c'est un vrai roman, d'une ampleur et d'une flamboyance magnifiques. On ne voit pas passer les 880 pages, on ne s'ennuie pas une seconde, car l'auteur est un conteur hors pair. Il donne d'ailleurs une sorte de définition du récit : « Veillait-il à agencer les événements spécialement pour elle ? [Maneck raconte sa vie à sa mère.] Peut-être pas – peut-être que le fait même de raconter créait un dessin naturel. Peut-être les êtres humains possédaient-ils ce don de mettre de l'ordre dans leurs existences désordonnées. » ● Les personnages, fort bien décrits, complexes, riches, sont extrêmement attachants, y compris les personnages secondaires, comme le mendiant Shankar, le Maître des mendiants, Ibrahim le collecteur de loyers ou encore les parents de Maneck. ● C'est aussi une réflexion sur la précarité de la vie, sur l'impossibilité du bonheur qui pourtant n'empêche pas de rester au moins fataliste dans l'adversité. « La vie ne garantit pas le bonheur. […] Tout finit mal. C'est la loi de l'univers. […] En ce qui concerne les êtres humains, les seuls sentiments valables qu'ils puissent nous inspirer sont l'étonnement, pour leur capacité à supporter l'adversité, et la tristesse, car ils n'ont rien à espérer. » Car Dieu nous a abandonnés : « Maintenant je préfère croire que Dieu est un géant qui fabriquait un patchwork. Avec une infinité de motifs. Et le patchwork a tellement grandi qu'on ne peut plus discerner le modèle ; les carrés, les rectangles et les triangles ne s'emboîtent plus les uns dans les autres, tout ça n'a plus de sens. Alors Il a abandonné. » ● de plus, cet ouvrage est particulièrement bien traduit. ● Je remercie l'ami babeliote @traversay qui m'a recommandé ce livre superbe, qu'à mon tour je recommande vivement.
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Une fresque de l'Inde des années 1970, vue à travers le peuple.
Quelques personnages dont on suit les heurts et malheurs : Dina, jeune femme qui aurait dû avoir un avenir souriant mais que la mort de son père puis de son mari obligé à gagner sa vie comme elle peut. Les tailleurs Ishvar et Om qui travaillent pour elle. L'étudiant Maneck qui ne supporte plus sa résidence universitaire et s'installe chez elle comme hôte payant, le mendiant Shankar…. Et bien d'autres qui gravitent autour de ceux ci. Certaines des parties sont consacrées à l'histoire d'un personnage.

Le quotidien est souvent sordide, outre la faim jamais très loin, il y a la saleté, les vers, les cafards, la distribution d'eau intermittente. Également les relations entre les castes et particulièrement envers les intouchables totalement à la merci de la méchanceté des classes supérieures qui considèrent avoir droit de vie et de mort sur eux. Mendiants ramassés dans la rue et emmenés loin pour travailler contre un logement inconfortable et une maigre pitance.L'administration bien sûr corrompue qui échange droits contre stérilisation ou fait pire encore...

Et au dessus de tout cela la figure du premier ministre, jamais désignée nommément, Indira Gandhi. Il me semble qu'elle bénéficie en Occident d'une image assez positive , mais ce n'est pas le cas sous la plume de Rohinton Mistry. Légèrement ridicule, autoritaire, elle se déplace dans les campagnes pour prononcer de longs discours sur ses efforts en faveur des plus pauvres mais ses meetings ne déplacent les foules que parce que des rabatteurs viennent dans les bidonvilles promettre nourriture et argent à ceux qui montent dans les bus. Promesse même pas correctement tenue. Culte de la personnalité digne d'autres pays considérés comme dictatures, tricherie dans les élections, état d'urgence, Indira Gandhi à bien perdu de sa valeur à mes yeux.

On est souvent entre le rire jaune et les larmes comme dans cette scène ou un homme possédant deux singes qu'il nourrit comme il peut et un chien qui doit se débrouiller seul retrouve après avoir été embarqué pour un meeting, lesdits singes dévorés par le malheureux chien qu'il essaie alors s'étrangler.

Je conseille chaleureusement ce roman dans lequel on ne s'ennuie pas un instant malgré ses 882 pages. Et si vous connaissez un livre équivalent sur l'Inde de ces trente, quarante dernières années parmi les plus pauvres, je suis preneuse. Déjà il y a les deux autres titres de Mistry Un si long voyage et surtout Une simple affaire de famille que je retiens, mais ils concernent les classes intermédiaires.
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Ecrivain à succès dont j'ignorais jusqu'alors l'existence, Rohinton Mistry est un auteur canadien, originaire de l'Inde, qui mérite toute mon attention. C'est en me “promenant” dans une librairie, que j'ai découvert, par hasard, le romancier. La première de couverture de son troisième roman, l'Equilibre du monde (1996), édité en Livre de poche, a suscité toute ma curiosité.

La couverture est pleine de couleurs. du jaune, du vert, du rouge… des couleurs vives. Mes pupilles sont exaltées. La rue est peuplée de monde, tous s'affairent à leurs activités. Je devine l'Inde grâce aux saris portés par deux femmes. Par une telle présentation, j'imagine une histoire aussi colorée et vivante que la première de couverture et me dis qu'en ces temps festifs (le soleil, l'été, les vacances) il me plairait bien de lire un roman de ce type. Ce qui, par la même occasion, me permettrait peut être de découvrir l'Inde et de m' aventurer vers d'autres horizons.

A la lecture du roman, je me rends compte finalement que mes sens m'ont trompée. Disons que la première de couverture m'a trompée. L'auteur écrit à l'encre noir, pas en rouge, jaune ou vert. Il déverse sur le papier pauvreté, misère, corruption, violence… autant de tâches qui noircissent la page blanche, autant de tâches qui noircissent la vie, si tant est que la vie soit aussi blanche qu'une page.

Au travers de ces quatres personnages principaux- Mme Dina Dalal, Ishvar et son neveu Omprakash et enfin Maneck- et d'autres protagonistes, l'auteur nous raconte l'Inde aux cours des années 70-80. le système de caste qui perdure encore dans les villages, les crises politiques, la corruption, la violence entre communauté religieuse, la misère et la pauvreté qui sévissent alors que l'état d'urgence est décrété par Madame le Premier ministre, accusée de malhonneteté lors des dernières élections. Au prétexte de prétendus troubles intérieurs qui risqueraient de mettre à mal la sécurité du pays- c'est pour se maintenir au pouvoir en réalité- Madame le Premier ministre applique le MSI, décret sur le maintien de la sécurité intérieure. Ce décret installe le pays dans le chaos le plus totale.

Et comme souvent, ce sont les plus pauvres que choisit le chaos. Alors que les plus riches se satisfont de la politique gouvernementale et de l'état d'urgence, parlant d' “ordre” et de “sécurité”, désignant les salariés et les SDF de “bandes de paresseux”, les plus pauvres sont livrés à eux mêmes et tentent de survivre dans cette jungle immense qu'est devenue l'Inde. Les syndicats, les mouvements d'oppositions sont interdits. La liberté de la presse condamnée. le chômage explose. La famine accompagne. L'exploitation est de rigueur. La corruption, tel un cancer, se propage à tous les niveaux. La société est malade, profondément. Les plus pauvres sont dans la boue. Dans cette jungle, aucune branche à laquelle ils pourraient s'attacher pour fleurir. Toutes sont pourries. La Justice et l'Etat les ont abandonné… abandonnés à leur sort, le hasard, le destin disent les protagonistes alors que leur vie sont dessinées, en réalité, par un coup de crayon volontaire.

Ainsi, dans ce désordre le plus complet, le Premier ministre décide, au nom de la politique d'embellissement de la ville, de raser les bidonvilles sans se soucier de sort de ces pauvres habitants et citoyens qui déjà s'appauvrissent et subissent les changements d'ordres économiques. Et cas plus absurde, pour faire face à la surpopulation de l'Inde, elle décrète une politique de stérilisation massive dont les pauvres, comme d'habitude, sont les principales victimes. de nouveaux fonctionnaires émergent: les incitateurs, chargés de convaincre les citoyens des bienfaits de la stérilisation. Mais la population étant réticente et les fonctionnaires devant remplir leurs quotas, les dérives et catastrophes humaines apparaissent très rapidement. Très vite, l'Homme ne devient qu'une marchandise, on le vend, le mutile. On l'utilise pour remplir le quotas, pour gagner sa vie, pour avoir de quoi manger, pour survivre. Très vite l'Homme est réduit à bien peu de chose et se voit sacrifié pour des ambitions personnelles. D'humanité, il n'y en a plus et on n'y croit plus… Toute est sombre, noire, vide, sans espoir.

Mais à cette noirceur, nos quatres personnages, si attachants, apportent un peu de couleurs vives. Par le jeu du hasard (si l'on croit au hasard), leurs chemins se rencontrent et se tissent entre eux une réelle amitié. La maison de Dina Delal, où ils habiteront tous, illumine de bonheur, de sourires, de rires au milieux de tracas et du chaos qui, dehors, assombrit tout sur son passage. L'humanité, par la solidarité et l'amour, brille de plus belle. Mais la lumière, bien qu'intense, n'est que temporaire… le chaos les conduisant en effet vite à l'ombre.
Où est l'équilibre dans ce monde? Y'en a-t-il d'équilibre? Si il y en a, celui là n'est-il pas fragile? Il a suffit d'une loi, d'un décret pour plonger l'Inde dans le chaos et la violence. Il suffit de bien peu pour que la lumière vire à l'ombre. Un coup de main sur la lampe, un léger vent, un petit changement… et le cours de nos vies se voit modifié. Comment faire pour revenir à la lumière? Comment faire pour équilibrer le monde si celui-ci se penche plus sur un côté que l'autre? L'espoir dans le désespoir semble nous expliquer l'auteur. L'amour dans la haine. La douceur dans l'horreur. La paix dans la violence. La joie dans la tristesse…

L'équilibre du monde est un roman dense, riche, émouvant et drôle quelques fois. Les personnages sont si touchants que l'on s'y attache au point de ne leur souhaiter aucun malheur. Et pourtant… Et pourtant, c'est avec tristesse que nous avons à les quitter à la dernière page. L'équilibre du monde est un de ces romans que je conseillerais au plus grand nombre….
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Om, le jeune tailleur impulsif, Ishvar, son oncle plus modéré et résigné (pas toujours cependant), Maneck, l'étudiant suicidaire et Dina, la veuve esseulée me hanteront longtemps, je pense.
Voilà quelques uns des personnages de ce roman-fleuve sur l'Inde de 1975 à 1985, mais j'ai bien peur que la situation n'ait guère évolué depuis - ou peut-être si, mais en pire.
D'autres êtres, à l'influence souvent néfaste, parsèment aussi ce roman. Mais eux, ces malheureux, en sont les principaux protagonistes.
Accrochez-vous et sortez vos mouchoirs mais ce livre n'est, me semble-t-il, que le reflet de la réalité, dans un pays dominé par des archaïsmes et un système de castes qui s'avère très difficile à abolir (je viens de lire - merci wikipedia - que la constitution indienne a seulement interdit toute discrimination, de quelque ordre qu'elle soit).
Toujours est-il que je recommande vivement ce roman si complet à toutes celles et ceux qui souhaitent en connaître un peu plus sur cet immense pays.
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Malgré quelques réticences initiales, je ne regrette pas de m'être rangée aux avis de Babéliautes enthousiastes en plongeant dans cet Equilibre du Monde qui m'a toute de suite happée.

J'ai dévoré les près de 900 pages de cette formidable fresque, très accessible grâce à un paradoxe qui na cessé de me surprendre tout au long du livre : le style et la structure narrative sont dans les purs canons occidentaux (R.Mistry est canadien) mais n'empêchent pas, bien au contraire, de ressentir de manière quasi sensuelle toutes les couleurs, la densité, les contradictions de l'Inde des années 70 : l'élégance dans le sordide contre la vulgarité dans l'aisance, la foule contre la solitude, la laideur contre la beauté, la pauvreté du village contre celle de la ville, le tryptique infernal démocratie - bureaucratie - corruption, la fleur chatoyante posée sur un étron.

A travers les pérégrinations d'Ishvar et Om son neveau entre lutte pour la survie et efforts d'ascension sociale hors de leur condition d'intouchables, c'est toute l'histoire de l'Inde post indépendance que traverse le roman, ponctué de scènes marquantes : le vote floué au village; l'enrolement forcé pour assister au meeting d'Indira Gandhi; la scène au tribunal, la brutalité de la politique de planning familial...
Mais aussi la procession pour la mort du mendiant, les repas partagés, le patchwork de Dina...

L'empathie pour les principaux personnages, Ishvar et Om mais aussi Dina la veuve luttant pour son indépendance et Maneck le jeune étudiant qu'elle accueille chez elle, fonctionne à plein.

C'est vivant, c'est riche, c'est palpitant, c'est émouvant et parfaitement rhytmé, et l'on ne sort pas tout à fait indemne de la lecture car autant le dire, ce qui leur arrive à tous en dernier lieu, malgré des moments de lumière, est parfaitement dégueulasse.

L'auteur fait dire à un moment à l'un de ses personnages que l'équilibre du monde est affaire de lutte pour la survie et se joue entre l'espoir et le désespoir: un équilibre plombé dans le roman par l'impossibilité à dépasser sa condition, mais aussi rétabli par la lumière qui le traverse.
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C'est superbe, grandiose, émouvant, bouleversant. C'est l'Inde, la vraie, sa misère, sa corruption, ses contradictions, son immobilisme et ses castes, sa violence et sa douceur, sa sensualité.
Rien ne se passe jamais comme on le souhaite. Toujours on est rattrapé par un sort hostile, son karma, les mauvaises actions de sa vie antérieure. On est rattrappé par la misère, parce qu'on est né dans la mauvaise caste et du mauvais coté. On est rattrappé par ceux qui ont réussi à mieux s'en sortir, ceux qui ont compris le fonctionnement du système, ce qu'on n'a pas osé comprendre et pas osé faire. Alors on se résigne, parce qu'en Inde c'est comme çà, et qu'il n'y a aucune raison pour que les choses changent.
Est-ce cela, l'équilibre du monde, l'équilibre de ce monde à part qu'est l'Inde, quand tout s'acharne sur les héros et quand la fin est pire que le début ?
Et pourtant ce qui reste, c'est l'amour, c'est la joie, c'est les couleurs éclatantes qui jaillissent d'un tas d'ordure. "Ces deux-là la feraient toujours rire" pense l'héroïne à la fin du livre. Et pourtant le sort s'est acharné sur "ces deux-là", comme il s'est acharné sur l'héroïne. Mais c'est çà l'Inde, une immense contradiction. Et des couleurs qui jaillissent des ordures.
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Un seul mot pour résumer ce livre : résilience !
Nous sommes en Inde et nous suivons plusieurs personnages dont les destin vont se croiser.
Dina Dalal, une jeune veuve, doit absolument trouver un moment de gagner de l'argent. Deux intouchables, deux tailleurs, Ishvar et son neveu Omprakash, cherchent un emploi. Maneck lui étudie la réfrigération et la climatisation.
On découvre petit à petit ce qui amène toutes ces personnes dans le même quartier et je dois bien avouer que certains passages m'ont fait hurler/pleurer et fermer les yeux devant tant d'horreur : je ne vais pas spoiler mais sachez que tout ce que vous connaissez déjà de plus sordide sur l'Inde est condensé dans ce roman. Et hélas ce ne sont pas des légendes urbaines.
J'ai trouvé ces personnages absolument héroïques, courageux et braves devant chaque obstacle, d'une humanité et d'une intelligence sans limite face à la violence du monde qui les entoure.
Certains passages sont infiniment poétiques : le couvre lit, les chats, le jeu d'échecs … ou comment des objets se retrouvent animés d'espoir et de confiance dans un avenir meilleur.
J'ai retrouvé dans ce roman des caractéristiques que j'attribue aux auteur.e.s indien.ne.s : une sensibilité et une pudeur qui leur permettent de dépeindre les situations les plus abjectes sans de départir d'une grandeur d'âme.
Un coup de coeur !
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Une plongée passionnante dans l'inde des années 70 et 80 avec toutes ses dérives : politiciens et policiers corrompus, abus de l'état d'urgence, maintien du système des castes, mise à l'index des musulmans puis des sikhs, campagnes de stérilisation forcée, bidonvilles éphémères et plus généralement extrême pauvreté. A travers la vie de deux tailleurs intouchables, d'une veuve et d'un jeune parsi dont la famille vit la fin d'un monde, ce roman fleuve nous immerge dans une société malheureusement authentique, dans lequel j'ai retrouvé tous les ingrédients du roman documentaire " Bombay" décrivant pourtant une époque plus récente. le livre, bien écrit, est prenant, et ses 800 pages se dévorent sans qu'on ne les voit passer. Je vous en recommande la lecture, non seulement pour le caractère poignant de l'histoire racontée, que vous n'oublierez pas, mais aussi pour son ouverture sur une Inde que l'on a du mal à imaginer.
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Si, comme moi, vous connaissez très peu l'Inde mais que vous avez envie de la découvrir, alors ce roman est fait pour vous.

Le voyage sera fait d'expressions fleuries, de couleurs, de parfums d'épices, et d'une envie irrésistible de chapatis (petits pains).

En revanche, le voyage aura un prix, celui de l'histoire complexe d'un pays, celui des vies de quatre personnages imparfaits, ballottés par le destin, implacable, et par leurs choix.

Une fois encore, je tombe KO sous les coups de la bêtise humaine, de la sombre folie qui s'empare de l'Homme qui reçoit quelques grammes de pouvoir. Je pleure les morts et leurs cendres ont un goût de sel dans ma bouche. Je hurle aux vivants de s'enfuir, loin, quitte à vivre au fond d'une grotte glacée de l'Himalaya.

Vous l'aurez compris, je suis pourtant d'un naturel optimiste mais à chaque fois que je lis des romans qui nous parlent d'une (triste) réalité, ici les années 70-80 en Inde et notamment l'état d'urgence de 1975 à 77, je ne peux m'empêcher, quelle que soit la beauté de l'histoire ou de l'écriture, de ressentir un profond écoeurement pour les dérives de l'âme humaine.

Quoi qu'il en soit, ce roman est très bien écrit et vaut la peine d'être lu, même s'il fait mal au coeur. (mal au coeur peut-être nécessaire pour que la phrase "plus jamais ça" ait un tout petit peu de sens)

Dina, Om, Ishvar et Maneck, j'ai souffert de ce que Rohinton Mistry vous a fait subir, bien qu'il ait écrit un chef d'oeuvre, et je vous aime.
Lien : http://oxybeurresale.canalbl..
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Raconter les années 1970 et 1980 dans cet immense pays qu'est l'Inde à travers le destin de petites gens, voilà le pari réussi de @Rohinton Mistry. On n'est pas loin du coup de coeur mais quelques longueurs, le roman fait 900 pages, et ma préférence pour le roman de @Salman Rushdie, @Les enfants de minuit qui racontait la période antérieure, m'ont empêché de lui attribuer les 5 étoiles qu'il aurait sans doute mérité car j'ai pris un immense plaisir à la lecture de cette histoire à la fois drôle et tragique, et toujours profondément humaine.

Afin de garder son indépendance vis-à-vis de son frère, Dina, la jeune veuve issue de la classe moyenne, ouvre un atelier clandestin de confection dans son appartement. C'est à cette occasion qu'elle rencontrera Ishvar et son neveu Omprakash, deux tailleurs, « intouchables », venus à la ville pour s'offrir un avenir qu'ils espèrent radieux. Une des grandes forces du roman c'est l'évolution des rapports humains entre ces trois personnages, les préjugés des uns envers les autres tomberont au fur et à mesure de l'avancée de l'histoire, un quatrième personnage, Maneck, l'étudiant en pension chez Dina, sera l'élément déclencheur du rapprochement des susnommés.
En plus de ces quatre personnages principaux, il y a toute une galerie d'autres personnages (une vingtaine) comme Shankar le mendiant cul-de-jatte ou Rajaram le collecteur de cheveux qui participent activement à la compréhension de la société indienne.

Car l'autre grand personnage du roman, c'est l'Inde, son Histoire toujours tumultueuse, ses différentes castes, les clivages entre les différentes religions, les différences abyssales entre la vie à la campagne, la montagne et l'effervescence des mégalopoles. @Rohinton Mistry livre ici une fresque magistrale de ce pays aux mille facettes. Il raconte la période où Indira Gandhi fut première ministre, l'état d'urgence décrété par celle-ci, la suspension des libertés publiques avec les conséquences terribles que cela occasionna sur les principaux protagonistes du roman. Il raconte les élections truquées, la pauvreté exacerbée par une corruption endémique. Il raconte la tragédie du temple d'or d'Amritsar qui conduira à l'assassinat d'Indira Gandhi par un de ses gardes du corps Sikh, puis les massacres communautaires qui suivirent.
Il raconte tout cela, et bien plus encore, toujours au travers des yeux des anonymes, victimes collatérales des décisions prises au sommet de la pyramide. @Rohinton Mistry est un conteur brillant, je me suis attaché à ses personnages, il y a toujours de l'espoir et beaucoup d'amour dans son roman fleuve dans lequel j'ai plongé passionnément. A la relecture de mon billet écrit plusieurs semaines après que j'ai terminé le roman, je vais lui attribuer sa cinquième étoile bien méritée.


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