AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de afriqueah


A la suite de René Caillé, l'explorateur de Tombouctou , Olivier de Sanderval a un objectif : être le premier à aller jusqu'au Fouta Djalon, le pays des eaux vives et des fruits, du lait pur et des érudits, les cascades, les contreforts et les vallons à l'intérieur des terres de l'actuelle Guinée(ex Conakry). Même et surtout si c'est dangereux et que les premiers Peuls qu'il rencontre le dissuadent.

Tierno Monénembo, en bon Peul, non seulement raconte ces dangers, « la sournoiserie des habitants, les caprices des princes, les aléas du ravitaillement, les défections des porteurs, les coliques et les crises de palu », mais aussi l'aide absolue qu' Olivier notre héros reçoit de ses traducteurs ( qui parfois, pour lui éviter de se faire couper la tête, affirment le contraire de lui et inventent sa parenté avec le roi de France!) et qui lui expliquent cette culture , un peu florentine, où la ruse et l'esquive sont des manières de déjouer les pièges et de faire de la politique.

Les Peuls sont les Anglais de l'Afrique, dit il, « tous les défauts et toutes les qualités de la terre : radins, perfides, ombrageux ; intelligents, raffinés, foncièrement nobles », sournois, tordus, valeureux, tout à fait fascinants. Leur communauté fondée sur l'islam lutte contre la traite esclavagiste, c'est un islam de sages, de mystiques et de prophètes, un islam de grands seigneurs, avec,( démocratie oblige bien que le Fouta Djalon soit étiqueté comme théocratie) alternance des princes.

Olivier de Sanderval a réellement existé, au moment où rêver d'apporter le progrès sous la forme d'un chemin de fer, le rayonnement de la science , bref de faire de ce pays de cocagne une nouvelle Rome, une nouvelle Athènes est juste passé de mode. Les pays européens imaginent ( à tort) que le temps des explorations est terminé et qu'il faut coloniser, et leur pré carré dont ils définiront chacun les frontières à la conférence de Berlin de 1884, donne lieu en réalité à des guérillas entre pays colonisateurs, et contre les pays qu'ils veulent conquérir. Longtemps, l'intérieur du continent africain ne les a pas intéressé, par peur et par ignorance et ils se sont contentés de comptoirs côtiers, des factoreries. Moins de risques, et des gros sous.
Ayé, c'est décidé, ils y vont.

Sanderval ne veut pas conquérir, on pourrait presque dire qu'il veut vivre en paix, supporter tous les inconvénients, la faim la prison, le palu, les maux divers et jusqu'au coma, à la condition d' être reconnu comme Peul, cette grande civilisation, venue sans doute d'Egypte, comme la beauté longiligne de ses habitants le montrent, et cultiver, se repaitre chaque jour de la splendeur des vallées, du vert des montagnes, de l'Eden terrestre, qu'est cette terre isolée.

Construire un chemin de fer, en 1879, c'est un peu nouveau, cependant à cette date le premier à être envisagé sera Dakar/ Saint-Louis, donc le rêve commence à être crédible.

Tierno Monénembo , avec la figure d'Olivier de Sanderval , dont il a consulté les archives de famille, nous présente un aventurier un peu moins « explorateur » qu'un Mungo Park ou qu'un René Caillé, et parallèlement un peu moins proche au niveau humain que ces nouveaux ignorants/ commerçants /administrateurs qui décident en 1884 d'annexer la Guinée, et d'y faire régner le travail forcé.
De chemin de fer, nenni.

Il voulait être roi de Kahel, c'est à dire du paradis sur terre.
Mais.
Les crocodiles d'Afrique ont infestés les ministères français.

Je ne peux m'empêcher d'évoquer les Peuls du Niger, les Wodaabés, qui venaient danser à Niamey après leur fête du Geerewol, les hommes maquillés de jaune et de rouge, avec plumes et perles sur la tête, la bouche peinte en noir, et derrière, ne dansant pas, les femmes habillées de gris : c'est le moment où chaque femme choisit un homme, pour la nuit, la semaine, ou pour toujours, s'il est gentil, ah, il faut qu'il soit à la hauteur et gentil, et les hommes se laissent choisir en faisant de leur mieux pour plaire avec leurs sauts, leurs mimiques, leurs magnifiques bijoux. Ils sont splendides, et à la différence des Peuls de Guinée, ils sont nomades.
( cf le livre de Carol Beckwith : Nomades du Niger).

Les peuls de Guinée, eux, se sont sédentarisés il y a des siècles.
Commenter  J’apprécie          397



Ont apprécié cette critique (37)voir plus




{* *}