Nos grands-parents ont connu la guerre, nos parents Mai 68, nous aurons à traverser la fin de l'histoire.
Nous sommes deux, ils croient que nous sommes toujours des enfants et le monde est vaste.
J'imagine souvent ce que serait la Terre si tout était conservé, une asphyxie d'archives, un inarpentable musée.
Montrer, pas démontrer ;
donner à sentir plus qu'à penser ;
écouter plutôt qu'assener ;
attraper les flocons de sensations plutôt que les blocs lisses de généralités.
Tout relire c'est s'enivrer et s'écœurer du passé, sur la tempe le pistolet du temps assassin.
Il y a un universel de la douleur, une condition humaine de ça. Les dos se courbent, les épaules s'affaissent et il n'y a plus de larmes, juste la sensation archaïque de tomber sans fin.
Nous est morte, vivre n'existe plus et le chagrin est une maladie longue.
Il y a sous nos comportements une sous-couche d'enduit social, une manière de se tenir, de parler, de rire qui nous ancre, qu'on le veuille ou non, dans un milieu.
L'habitus, c'est ma grand-mère qui me tire par la manche.
...l'habitus : c'est comme une peau, un impensé toujours présent, l'on est d'où l'on vient même lorsqu'on n'y est plus.
Nous sommes 2, le monde nous infuse et nous sommes le monde.