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Critique de andras


Curieuse lecture et curieuse écrivaine que cette Rosa Montero dont je n'avais lu jusqu'alors aucun livre. Il ne s'agit ici ni d'une biographie de Marie Curie ni d'un autoportrait de l'auteure mais d'une sorte de patchwork combinant les deux. Et je suis assez partagé entre l'impression que les réflexions de l'auteure sur le deuil, la société, les femmes, les hommes sont un contrepoint intéressant au récit de la vie de Marie Curie et l'impression inverse que ces apartés encombrent ce récit. La première impression l'emportait au début du livre mais c'est la seconde qui a peu à peu pris le pas sur la première, malheureusement.

Rosa Montero se flatte de sa légèreté, une qualité que j'apprécie beaucoup en littérature et que revendiquait par exemple Italo Calvino. Elle nous avoue d'emblée son "envie d'écrire comme on respire. Avec naturel, avec #Légèreté." Vers la fin du livre, elle revient sur ce thème : "Vous savez que j'aspire à être libre, totalement libre en écrivant. Je veux voler, je veux atteindre l'apesanteur parfaite." Mais cette légèreté recherchée et revendiquée m'apparaît au fil des pages comme de la désinvolture, comme une excuse pour ne pas se donner la peine de réfléchir, de creuser les thèmes qu'elle aborde.

C'est ce que l'usage du fameux "hashtag" met en relief. J'ai été interpellé par cette utilisation du hashtag (ou mot-dièse) à la twitter (comme ci-dessus avec le mot #Légèreté, mais aussi avec #HonorerSonPère, #Coïncidences et même avec le mot #Mots), mais ici dans un ouvrage "papier" donc non cliquable (je ne sais pas ce qu'il en est de la version électronique de l'ouvrage). On en compte 18 différents, rassemblés à la fin du livre dans un index qui renvoie aux pages du livre où chaque hashtag est utilisé. Il n'y a pas de mode d'emploi fourni donc c'est à chaque lecteur de trouver le sien. Il semble que chaque hashtag corresponde à une thématique chère à l'auteur. Il semble donc signaler que la phrase dans lequel il apparaît fait écho à cette thématique. Mais nulle part cette thématique n'est exposée en tant que telle. Il semble même que ce hashtag fonctionne comme une autorisation à ne pas creuser le thème, comme si les occurrences du hashtag tenait lieu de discours, comme si évoquer était mieux que parler, comme si la force d'une idée tenait au nombre de fois où elle était citée dans le texte.

A cet égard, il n'est pas étonnant de trouver dans la liste des hashtags le terme #Coïncidences. Les coïncidences ne sont bien souvent remarquables que parce qu'on leur attribue, inconsciemment ou non, un sens caché. Si on se donne la peine de rechercher ce sens caché, alors oui, une coïncidence peut être la source d'un dévoilement de la réalité. Collectionner les coïncidences est pauvre. Expliquer pourquoi une coïncidence fait sens pour nous, voilà la richesse. Ici, Rosa Montero s'en tient à la collection et c'est dommage.

Le hashtag a revêtu peu à peu pour moi un intérêt qui n'était pas, j'imagine, prévu par l'auteure : celui de me signaler les nombreux clichés qui émaillent le texte. le plus flagrant pour moi fut celui qu'elle a nommé #FaiblesseDesHommes. Je ferai court sur ce sujet car je sais bien que cette idée est assez répandue qu'il faille aujourd'hui inverser la formule absurde et méprisante selon laquelle "le féminin est le sexe faible" en une formule qui me semble tout aussi absurde et méprisante, à savoir "le masculin est le sexe faible". Page 134 du livre, Rosa Montero dit vouloir ouvrir une parenthèse pour nous expliquer en quoi cette inversion lui semble justifiée. En un peu moins de trois pages, c'est plié, avec à l'appui trois exemples littéraires (dont un "micro-récit" qu'elle a elle-même écrit) et la cause est entendue : "l'homme" est un être faible et "la femme" a peut-être tort de le surprotéger, ça lui donne de mauvaises habitudes. Rosa, on peut revenir à Marie Curie, s'il te plaît ?

Car au moins dans les passages concernant la vie de Marie Curie, j'ai pris du plaisir à suivre les envolées de la romancière. #PointFinal
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