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Critique de Isidoreinthedark


L'idée ridicule de ne plus jamais te revoir est un livre inclassable : il ne s'agit pas d'un roman même s'il en a la fluidité ni d'un essai même si l'en a la profondeur. L'ouvrage est une manière pour Rosa Montero de faire le deuil de son mari décédé d'un cancer. Elle tisse un lien très fort avec Marie Curie qui a perdu son mari Pierre, tragiquement écrasé par une calèche à seulement quarante sept ans. Fascinée par les jeux de correspondances qui nous relient par des liens ténus et invisibles, à la manière d'une immense toile d'araignée, elle finit par faire de la vie romanesque de la célèbre physicienne le sujet principal du livre.

L'auteure revient ainsi longuement sur la jeunesse de Manya Sklodowska, son parcours parsemé d'embûches, et notamment les difficultés relatives à l'émancipation d'une jeune femme polonaise incroyablement brillante à la fin du XIXème siècle. Elle retrace sa venue à Paris, les années de dénuement, sa rencontre avec Pierre, ses recherches sur les radiations qui seront tout à la fois la chance et le malheur de sa vie, lui permettant d'obtenir les prix Nobel de physique puis de chimie et détruisant sa santé ainsi que celle de son mari.

Par un surprenant jeu de miroirs, L'idée ridicule de ne plus jamais te revoir nous permet de partager un instant l'intimité de Marie Curie, notamment lors de la mort tragique de son mari, tout en restant évasif sur le ressenti de Rosa Montero lors de la perte du sien. Et pourtant une forme de mystère demeure. On referme le livre sans vraiment savoir qui était cette grande dame polonaise, à qui l'on doit la découverte du polonium et du radium, une femme passionnée au regard d'une tristesse impénétrable, sportive, généreuse, obsessionnelle, une femme au courage immense qui n'a jamais pris au sérieux les dégâts que causait l'exposition aux radiations sur sa santé. La fulgurance des grandes découvertes scientifiques est bien entendu au centre de l'ouvrage mais on sent confusément que l'essentiel est ailleurs et se niche au coeur de la contemplation de la beauté du monde.

L'idée ridicule de ne plus jamais te revoir est un livre parfois étrange, d'une pudeur touchante, paradoxalement empli d'une poésie émouvante alors qu'il est largement consacré au labeur rigoureux et à la persévérance sans faille de Pierre et Marie Curie. Comme le dit si bien l'auteure : « il faut avoir vécu longtemps, je suppose, et avoir su apprendre de la vie, pour en venir à comprendre qu'il n'y a rien de plus important ni de plus splendide que le chant d'une enfant sous un figuier ».
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