Emily Byrd Starr, quelle étrange et merveilleuse enfant. Orpheline de sa mère, elle aurait pu vivre heureuse auprès de son cher papa et de ses chats mais le destin en fit autrement.
Papa emporté par la maladie, Emily se retrouve bien malgré elle imbriquée dans la famille côté maternel :
Les Murray, ce clan bourgeois dont la réputation sévère et peu empathique n'est plus à faire sur l'ïle-du-Prince-Edouard en cette fin du IXXème siècle.
La jeune enfant à l'imagination débordante et au caractère bien trempé, dont le rêve est de devenir poétesse, suivra l'éducation de la chef de famille: l'intransigeante et exigeante Tante Elisabeth.
Emily ira à l'encontre des idées de sa tante, si protestante et peu enclin au monde artistique et imaginaire, en lui tenant tête et en ne cessant d'écrire des vers.
Mais leurs conflits sont souvent délectables d'un point de vue scénaristique ou des dialogues qu'on en redemande.
Tante Elisabeth possède l'immense ferme de New Moon, qui s'avérera un merveilleux lieu pour Emily grandir, elle qui aime par-dessous tout la nature et la liberté d'imaginer.
L'enfant pourra compter sur le soutien de la douce Tante Laura et du soi-disant simple d'esprit qu'est le cousin Jimmy.
Emily rencontrera aussi une jeune fille tout aussi effrontée qu'elle, qui deviendra sa meilleure amie : Ilse.
Sans compter les jeunes garçons comme Teddy, artiste dessinateur qui a tout pour plaire ou Perry, garçon de ferme qui sera toujours le premier à défendre notre héroïne.
J'ai retrouvé dans ce roman tout le style si personnel de
LUCY MAUD MONTGOMERY : de nombreuses descriptions, des détails croustillants sur le physique des personnages, des pointes d'humour.
L'humour est plus sarcastique que dans les romans de ANNE car Emily est franche et directe dans ses propos donc LUCY MAUD a plus l'opportunité d'aller dans l'ironie et l'effronterie.
La poésie est encore plus présente qu'à Avonlea car écrire est indubitablement essentiel à notre jeune fille. Faire rimer les choses la rend vivante.
MONTGOMERY a aussi créé une protagoniste ayant un penchant pour l'obscur, qui n'a pas peur de la mort et qui en parle souvent.
Certains passages sont presque fantastiques et oniriques. On parle souvent de fées, d'elfes ou de prédictions et cela donne une dimension supplémentaire et intéressante à ce monde déjà très poétique.
Emily est une savant mélange entre JO MARCH et WEDNESDAY ADDAMS comme le cite la maison d'édition dans le descriptif du roman et je suis totalement d'accord avec ce propos.
On peut cerner cette osmose entre ce deux types de personnages quand elle parle de son ILLUMINATION, ce moment où s'emboîte la réalité et l'imagination, comme découvrir un vers parfait pour un poème...
Vous aurez compris que je suis sorti de ce livre avec un enthousiasme très immodéré.
Je trouve les personnages secondaires plus aboutis que dans la saga ANNE.
La complexité apportée au rôle de Tante Elisabeth, avec ce poste de fausse marâtre et de représentante indéfectible de la famille Murray, est pour moi remarquable.
Nous ne sommes pas dans l'émotion constante lorsque l'on parcourt les pages, mais quand elle est présente, elle est d'une forte intensité.
On ne peut qu'apprécier cette petite fille à la fois si mature, mais tout autant fragile pour son jeune âge.
Les longues lettres qu'elle écrit à son père sont de la tendresse pure et les larmes viennent souvent percuter le coin des pages à leur lecture.
J'ai le livre édité par
MONSIEUR TOUSSAINT LOUVERTURE.
C'est un objet magnifique et qui rend superbement hommage au travail d'orfèvre que sont les écrits et les mondes créés par
LUCY MAUD MONTGOMERY.
Je recommande éperdument ce magnifique récit, certes destiné à la jeunesse, mais qui donne aux adultes la chance de revenir dans un univers où l'imagination est reine.
ANNE restera toujours dans mon coeur, mais Emily vient largement d'y gagner une place.
Donc, c'est un coup de COEUR !!! (Vivement les autres tomes)