La blancheur absolue
... j’ai appris que ton nom vient du soleil en crue, que l’inondation solaire t’avait rempli de lumière. que les blessures viennent d’un excès de lumière. que le côté noir des choses leur donne du repos. à travers tes tombeaux, j’ai parsemé des graines de fleurs sauvages, sur le coup de midi, j’ai sorti un voile de mon coeur vide. pour me rendre décente, je me suis voilé les yeux, la bouche, les mains qui cherchaient du feu.
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la forme extérieure du corps ressemble aux pierres animées. l’écorce terrestre blanchit sous la lumière. l’eau coule partout. le visage des bouleaux est sauvage. la parole se cache sous les feuilles de l’aulne. l’autre soir, Sibylle a sorti toutes ses affaires au moment où le vent se tait et où la sève du chêne brille sous le crépuscule. la forme extérieure du corps ressemble aux feuilles de chêne. l’écorce est dure et le bois pèse doucement sur la terre.
… tu ne poses pas tes mains sur mes paupières. la nuit est froide. la fièvre monte de l’intérieur du regard. la mort est là, dans le jardin, nous avons lutté toute la nuit pour préserver la barrière entre ce qui chante et ce qui s’installe au centre du coeur.
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j’ai appris que le centre du coeur n’a pas de fond, que le silence autour des veines est absolu.
il neige pendant que nous parlons. au nord il n’y a que le vent. ici, au seuil de la lumière, la blancheur absolue.
pp. 86-8.