- Comment va-t-elle ce matin ?
Bellamy relève le menton et voit Clarke qui les dévisage, lui et sa sœur, d'un air mal à l'aise.
- Bien, je crois.
- Tant mieux, dit-elle en arquant un sourcil légèrement brûlé. Ce serait quand même dommage que tu mettes à exécution ta menace d'hier soir.
- J'ai dit quoi ?
- Tu as promis que si je ne sauvais pas ta sœur, tu ferais « sauter cette saloperie de planète et tout ce qui vit dessus ».
- Encore heureux que ce soit juste une entorse, déclare-t-il dans un sourire.
Ce que nous devons accomplir est loin d'être toujours facile. Mais notre mission est cruciale. L'intérêt commun de la survie de l'espèce rend hélas certains sacrifices nécessaires.
S'il devait décrire le goût de cette eau, il dirait volontiers qu'elle est le parfait mélange du goût de la Terre et de celui du ciel. Et si quelqu'un a le malheur de se moquer de lui, il lui cassera la gueule.
Un baiser qui a un goût de joie, et la joie a meilleur goût sur Terre.
-Nous n'avons pas eu le choix, répète sa mère au désespoir.
-On a toujours le choix ! S'emporte Clarke, tremblante d'indignation. Vous auriez pu dire non ! J'aurais préféré mourir plutôt qu'obéir à des ordres aussi monstrueux !
-Il n'a jamais menacé de nous tuer, répond son père d'un ton insupportablement calme.
-Putain ! Mais pourquoi avez-vous fait tout ça, alors ? Explose Clarke.
-Il a dit qu'il te tuerait.
Les humains ont abandonné la Terre à ses heures les plus sombres. Cette dernière se fiche sans doute éperdument de combien mourront en tentant d'y revenir.
-Nous vous accordons une opportunité unique de tirer un trait sur votre passé. La mission que vous vous apprêtez à mener est périlleuse, mais votre bravoure sera récompensée. Si vous réussissez, vos crimes vous seront pardonnés, et vous pourrez commencer une nouvelle vie sur Terre.
Il renverse la tête en arrière et, où qu'il pose les yeux, le ciel s'étend à perte de vue. Peu importe l'endroit où ils se trouvent sur cette planète, ça ne pourra qu'être infiniment mieux que dans le monde aseptisé qu'ils viennent de quitter.
Pour la toute première fois de sa vie, il se sent libre.
Une symphonie de couleurs est en train de s’y jouer : des traînées orange viennent s’inviter dans le bleu royal. Tel un hautbois rejoignant une flûte, le solo devient duo. L’harmonie s’enrichit ensuite crescendo, des touches jaunes et roses ajoutent leurs voix au chœur multicolore. Le ciel alentour s’assombrit, accentuant encore les contrastes. Les mots coucher de soleil ne peuvent rendre justice à l’indicible beauté du spectacle qui les surplombe, et pour la centième fois depuis qu’ils ont atterri, Wells remarque intérieurement que tous les mots qu’il a appris pour décrire la Terre sont inadéquats pour rendre compte de sa splendeur.
Tu dois t'autoriser à être heureuse. Sinon, la vie n'a plus de sens.