Mouna a peur de mourir, moi, j’ai peur de vivre
Alice, Laurence, Mouna, une chaîne de montagnes, trois sommets, trois visions différentes, du monde, de l’amour, des hommes, et ma pomme en dénominateur commun. Peut-être que c’est ça une famille, se faire trait d’union entre des étrangers.
Entourée par cette saloperie de solitude la vie des vieux prend des allures de mégots ; je me dis que Mouna est en train de fumer le filtre et qu’elle le sait.
Mouna ne connaît pas les Doors et moi, je n’ai pas fait la deuxième guerre mondiale.
Ca ne nos empêche pas de nous aimer d’amour, ma grand-mère et moi, et de nous regarder sans parler en roulant droit vers la mer.
Une fois, à trop croquer le fruit défendu, un pensionnaire a chopé la chiasse et tout le monde s’est moqué de lui quand il s’est fait dessus liquide, dans l’ascenseur. Ca a coulé sur ses pantoufles et il est reparti la morve au nez en chialant, de honte et de solitude, une main tremblante sur la rampe, l’autre sur son dentier.
Son casque blanc est parfaitement laqué, à vue de nez la mise en plis date de 10h30. On dirait une barbe à papa, une boule de nuage dessinée par un feutre d’enfant, une installation d’art contemporain. J’ai très envie d’y plonger les deux mains et d’y laisser mes empreintes.
On est toujours hypocrite au début d'une histoire. On cache ses zones d'ombre et ses vilains défauts. On prend facilement l'autre pour une Ferrari avant de lui en vouloir de n'avoir à offrir qu'un moteur de 2CV.
Les vieux rêvent toujours de leur amour perdu.
Elle me dit souvent qu’elle va mourir demain, c’est sa façon de rester vivante.
Elle a le sommeil léger, moi le passé lourd.