J'attendais que le ciel s'ouvre, qu'il m'avale, qu'il m'engloutisse, qu'il me mâche lentement sous ses grandes dents d'acier. Mais la nuit était douce, désespérément douce et le ciel fermait sa gueule avec obstination. Pas moyen de disparaître. En attendant, je taillais mes crayons.
Ça n'a pas de sens l'Histoire, on croit que l'humanité avance mais elle fait des tours sur elle-même et refait les mêmes conneries.
Papa me parle souvent de mes études, de plus tard. Qu’est-ce que je peux dire de plus tard ? Demain, je m’en fous. Demain, c’est noir et ça pèse trois tonnes. Demain, ça me donne envie de vomir. Je veux qu’on me parle de là, maintenant, tout de suite.
Je dis OK, pas de problème. Et puis, je tourne les talons et je m’en vais tout en espérant très fort qu’il me coure après. Quitte ou double, la vie est un pari ! Mon cœur cogne très fort à chaque pas que je fais et puis, ouf ! Il se rapproche, il me rattrape, il me saisit par le bras et dit qu’il prendra le train suivant. Je souris imperceptiblement, mais au fond je suis ravie.
Je n'ose pas me relire.
C'est du n'importe quoi tout ça.
Je suis folle.
Mais j'ai une vie à moi.
Le Mondes est à moi.
Même si ce n'est qu'en rêve...
J'aime les heures qu'il m'a données. Et puis les instants qui les ont précédées. Et puis aussi, celles qui ont suivi. Celles qui suivront.
C'est terrible, la beauté.
Ça vous donne des excuses pas méritées.
Mes doigts pianotent sur l'infini.
Il dit que je suis une petite fille gâtée et que je fais n’importe quoi. Je l’emmerde, je m’en fous. Je ne suis pas gâtée, et je ne suis pas une petite fille. J’ai mes règles depuis quatre ans.
Je n'ai pas osé lui dire qu'il ne pensait qu'à lui, qu'il ne savait rien de ce que les femmes ressentaient, qu'il était un papillon et que les papillons ne savent pas ce que ressentent les fleurs, c'est comme ça...