La nuit où elle mourut, mon premier geste fut de lui baisser les paupières. En même temps que je lui fermais les yeux, les rêves qu'elle n'avait cessé de faire durant soixante-dix-neuf ans s'en allèrent aussi silencieusement qu'une pluie d'été sur le chemin, et ensuite, il ne resta plus rien.
[...] il n'y a pas de surhomme. On est tous pareils. Ceux qui possèdent quelque chose ont peur de le perdre, et ceux qui n'ont rien angoissent à l'idée qu'ils n'auront rien pour l'éternité. On est tous pareils. Plus vite tu le comprends, plus vite tu cherches à devenir plus fort. Ou à faire comme si. Tu ne crois pas ? Il n'existe nulle part d'hommes vraiment forts. Il y a juste des hommes qui font semblant de l'être.
Mais comme sur une feuille de papier-calque qui s'est un peu décalée, toute chose était légèrement mais inexorablement différente de ce qu'elle avait été dans le passé.
Tant que vous êtes en mesure d'apprendre sur des choses, il n'est pas trop douloureux de vieillir.
Le Rat continue d'écrire des romans. Chaque année à Noël, il m'en envoie plusieurs copies. L'an dernier, c'était l'histoire d'un cuisinier travaillant à la cafétéria d'un hôpital psychiatrique. Il y a deux ans, une comédie tirée des Frères Karamazov. Fidèle à ses habitudes, il n'y a jamais de scène de sexe et aucun des personnages ne meurt.
La première page, en papier japonais, porte toujours la mention :
"Happy birthday", et puis "White Christmas".
Parce que mon anniversaire est le 24 décembre.
C’est une ville horriblement ennuyeuse. Je n’arrive même pas à imaginer dans quelle intention on a pu construire une ville aussi embêtante.
Ceux qui possèdent quelque chose ont peur de le perdre, et ceux qui n’ont rien angoissent à l’idée qu’ils n’auront rien pour l’éternité.
"Un texte parfait, ou ce que l’on pourrait qualifier comme tel, ça n’existe pas. Pas plus que n’existe un désespoir parfait. "