AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Antyryia



Pour commencer ta critique, tu remercies naturellement la personne qui t'a offert ce roman.
Tu ignorais en t'inscrivant sur Babelio il y a bientôt un an que tu y ferais de belles rencontres et que tu allais non seulement pouvoir partager ta passion pour la lecture mais que tes échanges iraient parfois bien au-delà. Et que s'offrir des livres allait parfois devenir naturel même avec des personnes que tu n'as pourtant jamais réellement croisées.

Tu savais que ton amie appréciait Valentin Musso, et maintenant tu n'as plus le choix : c'est à ton tour de le découvrir. Toi tu ne connaissais que son grand-frère Guillaume. Il y a quelques mois tu ignorais d'ailleurs encore que les deux auteurs avaient un lien de parenté.

Quand tu as lu la quatrième de couverture, tu as tout de suite pensé à un autre roman que tu avais lu il n'y a pas si longtemps. Cette histoire de randonnée en montagne t'a en effet immédiatement fait songer aux six fourmis blanches de Sandrine Collette. Tu t'attendais d'emblée à une histoire similaire, avec une promenade meurtrière lors de laquelle les hommes ne seraient plus rien face à une nature déchaînée.
Mais tu prends rapidement conscience qu'ici, le danger ne vient pas forcément uniquement d'une nature impitoyable.
Si ton amie t'invite un jour dans son chalet pour découvrir ensemble les glaciers avoisinants, tu devrais déjà réfléchir à une bonne excuse pour décliner sa proposition.

Théo lui a accepté. Il ne sait même pas pourquoi. Toi non plus d'ailleurs. Il a revu par hasard son vieil ami Romuald et celui-ci a ensuite organisé un petit séjour lors duquel un circuit escarpé les emmènera dans les vallées pyrénéennes.
"A quoi ces retrouvailles riment-elles ?"
"Comment s'est-il laissé embringuer dans ce week end à la montagne ?"
Ces deux hommes, dès le début, tu les vois comme deux paons qui s'affrontent. Qui a le mieux réussi sa vie professionnelle dans la finance ? Qui a la plus belle voiture ? Ils sont les deux principaux personnages, ils semblent s'affronter de façon muette et toi, tu ne sais pas de quoi il retourne exactement.
Mais ils sont plus nombreux pour cette expédition. Cinq en tout. Théo est accompagné de Dorothée, sa compagne, même si leur couple semble vaciller depuis quelques mois déjà. Et il y a David également qui lui aussi est en couple avec la fragile et anorexique Juliette. Sa condition lui permettra-t-elle d'avoir l'endurance nécessaire pour un tel parcours physique ?

Tu lis un thriller alors tu te doutes que tout ne va pas bien se passer. Vont-ils se perdre et affronter les crevasses, le froid ? Vont-ils subir la faim, la neige, les avalanches ? Eh bien en tout cas, les massifs ne vont pas les épargner.
"Ils ont froid. le vent souffle avec fureur."
"Il avait soif, terriblement soif."
"Tu ne vas pas me dire qu'on s'est trompé de chemin ?"
L'exploration des névés va rapidement se muer en cauchemar. Pourtant Romuald prétendait connaître les lieux par coeur. Comment a-t-il pu se laisser surprendre ainsi ? Oublier la carte et même une partie du matériel d'escalade, qui auraient assuré à tous un voyage serein ?
"Je me demande s'il ne s'amuse pas à nous foutre la trouille."

Et puis tu lis le premier flash-back. L'auteur te fait entrer dans la peau de Romuald en te tutoyant. Cette originalité dans le style te permet de savoir immédiatement si tu lis un retour en arrière ou si tu es de nouveau avec les randonneurs dans le présent sans que l'auteur n'ait besoin de te l'écrire. Et bien sûr ce procédé te permets de t'identifier plus facilement à cet homme puisque tu te retrouves littéralement dans sa peau.
"Tu avais envie de la prendre dans tes bras, de te perdre dans l'odeur de sa chevelure."
Tu apprends que Romuald est d'origine martiniquaise et issu d'un milieu plus que modeste.
"Romuald ne rêvait que d'une chose : quitter son quartier, changer d'univers."
"Et puis un jour, il parvient à intégrer un prestigieux lycée, qui lui ouvre les portes d'un nouveau monde."
C'est dans cet établissement que Romuald et Théo lieront une étrange et malsaine amitié. David, lui, y est également scolarisé mais tu constates rapidement qu'il ne joue que le rôle de sous-fifre de Théo, qu'il ne fait que suivre le mouvement sans avoir de réelle personnalité.
Très vite, tu apprends qu'il y a eu un drame par le passé. Une fille est morte. Mais cette tragédie et sa corrélation avec le parcours montagneux ne te seront révélées que progressivement.

Et Valentin Musso sait y faire pour maintenir le suspense. Quand un chapitre se termine sur une note angoissante ou une révélation, tu peux être sûr qu'il va revenir à l'autre période pour te faire languir un peu plus longtemps. Tu te souviens du premier flash-back ? Il est intervenu alors que l'un des cinq randonneurs chutait dans le précipice. Et c'est pareil dans l'autre sens. Mais toi tu n'es que le lecteur et tu ne peux pas intervenir. Tout a déjà été écrit, même les pages qu'il te reste à lire et tu ne peux donc qu'assister à ces tensions entre les marcheurs sans en comprendre le sens.
"Les disputes sont la plaie des randonneurs, elles sont fréquentes et naturelles, mais elles arrivent rarement au bout d'une demi-journée de marche."
Et tu attends passivement l'explosion. Tu la sais imminente mais tu ne sais pas comment ni pourquoi. Tu n'es même pas sûr de savoir qui.
Certains promeneurs ont des secrets, mais davantage que connaître ces derniers, tu te demandes si leur amitié est sincère et ce qui résulte en vérité de ces non-dits. Comme si toute leurs relations n'était qu'hypocrisie et faux-semblants.
Théo a-t-il raison de se penser "Tourner la page ? ... Rien d'autre ? Pas de rancoeur, pas de haine ... ?"
Mais quelle page Romuald a-t-il ou n'a-t-il pas tournée ?

Romuald et Théo, c'est l'alpha et l'oméga, le yin et le yang. Sur le papier ils se ressemblent et pourtant, au fur et à mesure que leurs histoires nous sont contées, tu t'aperçois que tout les oppose. L'un d'eux est une victime. Mais les rôles ont changé. En tout cas rien n'est gravé dans le marbre. Au lycée, Romuald était une sorte de jouet entre les mains du jeune Théodore, un fils à sa maman aux humeurs changeantes, une figure incontournable de l'école qui s'amusait aux dépends d'autrui, qui se droguait, qui ne savait pas que les actes avaient des conséquences. Et Romuald, à contrecoeur, pardonnait ces excès parce que Théo était pour lui un besoin, un symbole de son désir d'intégration.
"Tu n'arrivais pas à en vouloir à Théo, encore moins à le détester, c'était au-dessus de tes forces."
Mais aujoud'hui le terrain de jeu a changé, on n'est plus dans une école de riches où trouver sa place est d'autant plus difficile qu'on est issu d'un milieu défavorisé.
La montagne, c'est une immense cour de récréation dans laquelle Romuald tient cette fois les rennes. Tandis que Théo se demande ce qu'il fait là en réalité. Cette fois il ne maîtrise plus rien.
"Il n'arrive pas à se débarrasser de l'impression désagréable qu'il a acquis un ascendant sur eux. Son chalet. Sa montagne."

Si le rôle des deux hommes semble avoir été modifié, tu sais en revanche que l'issue des deux histoires ne peut être que dramatique. Non pas que l'histoire se répète, les deux sont liées mais uniques et ne se ressemblent pas. Mais tout converge à chaque fois vers une issue fatale et tu ne peux qu'attendre et tourner les pages pour connaître l'ampleur des dégâts à venir. Tes sentiments s'égarent. Tu ne peux pas apprécier Théo, dur et cynique. Tu te ranges donc aux côtés du plus faible, Romuald. Mais quand Théo souffre le martyre en montagne ( "une migraine qui l'élance derrière les yeux" , "une douleur fulgurante lui traverse le ventre" ) tu ne sais plus s'il est le plus méchant des deux. Malgé ses erreurs passées, tu ne peux pas vraiment prendre parti pour l'un ou pour l'autre. Ton avis change régulièrement. Ton empathie également.

Tu refermeras cependant le roman avec un avis mitigé. Cette lecture t'a plu mais ne t'a pas totalement transporté. En fait, tu n'as jamais réussi à t'intéresser aux deux histoires parallèles avec le même intérêt. Tu as eu du mal avec les épisodes "souvenirs" quand ils ont commencé parce que tu t'intéressais davantage au périple des cinq randonneurs, et il faut avouer qu'il t'a fallu un temps d'adaptation pour te faire au tutoiement, quand tu entrais dans la peau de Romuald. Et à l'inverse, tu attendais ces retours ensuite avec impatience parce que quoi qu'il se passe durant le périlleux circuit touristique du présent, tu sais que tu ne trouveras ton explication qu'en remontant le temps, encore un peu plus loin. Selon toi, le roman est assez inégal. Parfois il est arrivé à te passionner et tu tournais les pages frénétiquement et parfois d'autres passages n'ont pas su maintenir en revanche ton attention avec autant d'efficacité.

Et tu l'as donc forcément un peu comparé à Six fourmis blanches parce que même si les trames des deux histoires n'ont que quelques similitudes, le point de départ est le même et tu as quand même entre les deux préféré d'une courte tête le roman de Sandrine Collette.

Peut-être que demain, Babelio t'attribuera enfin la si convoitée étiquette de novice en montagne ?

Commenter  J’apprécie          273



Ont apprécié cette critique (24)voir plus




{* *}