Après avoir préalablement apprécié
Notre petit secret puis
Plongée dont j'ai pensé le plus grand bien, j'ai attaqué confiante
La sentinelle, n'envisageant pas une déception, et ce d'autant moins que le thème de l'enfance bousillée par un secret, résurgence à l'âge adulte et règlement de comptes entre soeurs ennemies me plait. Et pourtant, la dernière page tournée, je suis loin d'avoir éprouvé le plaisir escompté... Qu'est-ce qui a cloché ?
Comme souvent, ça partait bien et ça s'est gâté en cours de route : Ruth arrive enceinte chez Alex sa soeur et lui demande l'asile politique alors que les frangines sont en froid et s'ignorent depuis une décennie. Ruth est présentée comme la vilaine, sexe, drogue et rock and roll, drogues surtout ; elle déclare évasivement fuir un ex à ses trousses. Alex est la gentille, vit dans un joli loft avec Chase, garçon beau et niaiseux, spécialiste des smoothies et de l'alimentation healthy. Elle est assistante sociale au service de l'aide à l'enfance et s'est entichée d'un bambin qu'elle a décidé de sauver contre vents et marées ...
La narration est simple, linéaire, les soeurs s'expriment à tour de rôle, livrant des bribes de leur vérité sur leur enfance commune, dénoncées comme des mensonges lorsque l'autre prend la parole. L'une des deux ment, laquelle, qui est la vraie-vilaine et qui est la vraie-gentille, laquelle abrite un monstre en elle, prêt à jaillir ? On assiste à une partie de ping-pong entre les deux sur la mode c'est-pas-moi—c'est-toi—c'est pas toi-c'est moi, qui finit par être lassante et sans intérêt, car au final peu importe, aucune des deux n'étant sympathique ou émouvante.
Dans certaines conditions, cela aurait pu être intéressant de les suivre, si l'auteure avait fait preuve d'un peu de finesse, ce qui n'est pas le cas. Toutes les situations sont effleurées, esquissées à l'emporte-pièces et surtout, bon nombre d'entre elles sont invraisemblables. Juste pour illustration et sans bien sûr spoiler, la facilité avec laquelle on décide ou pas de retirer un enfant à une famille - il suffit semble-t-il d'avoir un siège auto dans le véhicule qui l'emporte – est irréaliste ; tout comme ce personnage de flic détaché de toute hiérarchie et commissariat qui ne semble là que pour balancer des infos confidentielles à Alex en jouant les ténébreux dans un troquet ; je n'insiste pas - pour ne pas trop l'accabler - sur la naïveté de Chase, qui ne voit rien venir en naviguant autour de l'îlot central de son séjour ; et enfin Alex ne semble pas professionnellement débordée, uniquement affairée à régler la situation d'un seul enfant.
Bref, le lecteur assiste à une sorte de ballet mal réglé entre les 4 personnages principaux qui donne au roman un petit air de vaudeville où ils entrent côté salon et sortent côté jardin en claquant parfois les portes, qui, c'est bien connu, doivent être ouvertes ou fermées. Il y aurait eu beaucoup à dire sur les carences éducatives ou affectives subies par de nombreux enfants ou sur la psychologie perturbée de femmes ayant justement connu une enfance déglinguée. Au lieu de ça,
Roz Nay lisse, édulcore, aplanit son récit jusqu'à raboter la moindre aspérité. Dommage !
Je remercie les Editions Hugo Thriller pour ce partage. Non, je déconne, j'ai fait un emprunt numérique auprès de ma médiathèque :-)).